
Chapitre 19
Ecrit par Verdo
Chapitre 19 :
Ethiam marchait d’un pas lourd sur les cendres de ce qui avait été, quelques heures plus tôt, l’un de ses magasins les plus florissants. Le feu avait tout ravagé, ne laissant derrière lui qu’une carcasse noire et fumante. Des débris jonchaient le sol, des étagères métalliques tordues par la chaleur, des cartons réduits en poussière et une odeur âcre de destruction qui lui piquait la gorge. Les policiers prenaient des notes, photographiant les ruines, mais Ethiam était ailleurs. Il regardait les cendres comme s’il y voyait les restes de sa propre vie.
— « Monsieur, avez-vous une idée de ce qui aurait pu causer l’incendie ? » lui demanda un officier, tirant Ethiam de ses pensées.
Il secoua la tête, incapable de formuler une réponse cohérente.
— « Non… Non, aucune idée. » répondit-il d’une voix rauque.
Mais il savait. Oh, il savait. Les mots du prêtre du Fâ résonnaient dans son esprit comme un tambour de guerre. « Les signes commencent déjà. Si vous ne vous rendez pas à Fongbé-Zogbédzi pour confesser vos crimes, tout ce que vous aimez disparaîtra. »
Les signes étaient là, et ils s’abattaient sur lui avec la précision implacable d’un châtiment divin.
Après le premier site, Ethiam se rendit au second, puis au troisième. À chaque endroit, la scène était identique : destruction totale. Les flammes avaient tout pris, ne laissant aucune chance aux marchandises, aux meubles, ni aux espoirs qu’il avait placés dans ces entreprises. Chaque magasin était pour lui une pierre angulaire de sa réussite, une façade derrière laquelle il avait caché ses crimes et son ambition démesurée. Mais aujourd’hui, ces façades s’étaient écroulées.
En route vers le dernier site, Ethiam était silencieux. Le chauffeur de son véhicule, un jeune homme qui avait toujours admiré son patron, n’osait pas prononcer un mot. Il sentait le poids du silence, presque palpable, comme si le véhicule était rempli de spectres invisibles.
Quand ils arrivèrent, Ethiam resta dans la voiture quelques minutes, fixant le vide. Puis, il inspira profondément et descendit.
Sur place, un groupe de journalistes locaux s’était rassemblé, leurs caméras braquées sur les ruines fumantes. Ethiam les ignora et marcha droit vers les policiers.
— « Encore une perte totale, monsieur. Aucune trace d’effraction, mais l’origine de l’incendie semble suspecte. Nous continuons l’enquête. » dit un enquêteur.
Ethiam hocha la tête, les lèvres pincées. Il savait que les policiers ne trouveraient jamais d’explication rationnelle. Il n’y avait pas de court-circuit, pas de pyromane, rien de logique. C’était une force au-delà de leur compréhension qui s’acharnait sur lui.
Il se tourna vers les ruines une fois de plus, les yeux remplis de larmes qu’il refusa de laisser couler. Il pensa à Ayelévi et à Pépé, les deux seules personnes qu’il avait aimées sincèrement dans sa vie. Il se souvenait du rire de Pépé lorsqu’il le prenait dans ses bras, des regards pleins de tendresse d’Ayélévi lorsqu’elle croyait encore en lui.
Mais maintenant, il les avait perdus. Ils s’étaient éloignés, fatigués de ses secrets, de ses absences, de son aura de mystère. Et s’il continuait à se taire, à cacher ses crimes, ils seraient les prochains à payer le prix.
Ethiam sentit son cœur se serrer.
Il murmura pour lui-même, à peine audible :
— « Je ne peux plus fuir… Je dois les protéger. Je dois tout avouer… avant qu’il ne soit trop tard. »
Il leva les yeux vers le ciel gris, comme s’il cherchait une réponse, un signe, un pardon. Mais tout ce qu’il trouva, c’était le poids de ses actes, lourd comme une chaîne autour de son cou.
Lentement, il se détourna des ruines et marcha vers sa voiture. Les journalistes criaient des questions, mais il ne les entendait pas. Il était déjà perdu dans ses pensées, déjà en route vers une décision qui scellerait son destin.
La sacoche noire semblait peser plus lourd que jamais sur son esprit. Les jours à venir allaient décider de sa vie… ou de sa fin.
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La maison où vivaient Ayelévi et Pépé était plongée dans un calme absolu. Seul le bruit des grillons venait troubler le silence de la nuit. Ethiam se tenait devant la porte, hésitant à frapper. Sa main tremblait légèrement alors qu’il la levait pour toquer, mais avant qu’il ne puisse le faire, la porte s’ouvrit brusquement. Ayelévi se tenait là, vêtue d’un pagne noué négligemment autour de la taille, les yeux rougis par les pleurs.
— « Ethiam… » murmura-t-elle, avant de se jeter dans ses bras.
Le contact de son étreinte brisa quelque chose en lui. Il la serra contre lui, respirant son parfum familier qui lui avait tant manqué. Ils restèrent ainsi, immobiles, un long moment, leurs sanglots mêlés dans la nuit.
— « Je sais ce qui s'est passé avec les magasins, » finit-elle par dire, sa voix à peine audible. « J’ai entendu les nouvelles, et je suis désolée, Ethiam. Tellement désolée. Je sais combien tu as travaillé dur pour bâtir tout cela. »
Elle releva la tête pour le regarder dans les yeux, son regard empreint de douleur et de détermination.
— « Si tu veux, Pépé et moi pourrions revenir à la maison. Tu as besoin de nous. Nous pourrions traverser cette épreuve ensemble. »
Ces mots frappèrent Ethiam comme un coup de tonnerre. Il s’écarta légèrement, fixant Ayelévi avec une expression incrédule. Il n’avait jamais imaginé qu’elle pourrait encore envisager de revenir vers lui après tout ce qu’il lui avait fait subir, après toutes ses trahisons et ses silences.
— « Non, mon amour, » répondit-il doucement, une tristesse profonde dans la voix. « Vous êtes en sécurité ici. Je ne veux pas que quelque chose vous arrive, ni à toi, ni à Pépé. Vous êtes… vous êtes tout ce que j’ai de plus précieux sur cette terre. »
Il posa une main tremblante sur sa joue.
— « Écoute, je dois te dire quelque chose. Une vérité que j’ai gardée enfouie bien trop longtemps. »
Ayelévi l’interrompit en posant un doigt sur ses lèvres.
— « Je sais, » dit-elle, son ton calme mais ferme. « Je sais bien que tu m’as caché cette histoire de sacoche noire. Mais tu es mon mari, Ethiam. Et aujourd’hui, plus que jamais, tu as besoin de mon soutien. L’amour peut tout supporter, tu m’entends ? Je ne te laisserai pas tomber, pas maintenant. Peu importe ce que c’est, on trouvera une solution. Mais toi, tu dois te relever. Pour toi, pour moi, pour Pépé. »
Les mots d’Ayélévi étaient comme un baume sur les blessures d’Ethiam, mais ils ne suffisaient pas à dissiper l’ombre qui pesait sur son cœur. Les larmes qu’il retenait depuis trop longtemps commencèrent à couler librement.
— « Tu ne comprends pas, » dit-il, la voix brisée. « Ce n’est pas qu’une question de sacoche. Ce que je vais te dire pourrait tout changer entre nous. Je ne peux plus garder ces mensonges pour moi. »
Il marqua une pause, cherchant les mots. Ses mains tremblaient, son cœur battait à tout rompre. Ayelévi le regardait, la peur et l’inquiétude lisibles sur son visage, mais elle resta silencieuse, attendant qu’il parle.
— « J’ai tué huit personnes, » lâcha-t-il finalement, sa voix à peine un murmure.
Ayelévi recula légèrement, comme si elle venait de recevoir un coup. Ses yeux s’élargirent de stupeur, mais elle ne prononça pas un mot. Ethiam, quant à lui, continua, incapable de s’arrêter maintenant qu’il avait commencé.
— « Tout a commencé à Fongbé-Zogbédzi… »
Alors, comme un torrent incontrôlable, Ethiam déversa tout : le conflit autour de la ferme, la jalousie qu’il avait nourrie contre Mawugno, l’embuscade meurtrière qu’il avait orchestrée, la façon dont il avait pris le sac de Mawugno qui renfermait la sacoche.
Il parla des paroles du prêtre du Fâ, de la malédiction qui pesait sur lui, et de l’incendie des magasins qui, il en était sûr, n’était que le début.
À mesure qu’il racontait, Ayelévi semblait se décomposer. Ses mains couvraient sa bouche, ses yeux remplis de larmes. Mais elle n’interrompit pas.
Quand il eut fini, le silence s’abattit sur eux. Le seul bruit qui subsistait était le souffle irrégulier d’Ethiam et le tic-tac d’une vieille horloge dans la pièce voisine.
— « Pourquoi… » finit par murmurer Ayelévi, sa voix tremblante. « Pourquoi as-tu fait tout ça ? »
— « Je voulais ce que Mawugno avait, » répondit Ethiam, honteux. « Je pensais que je méritais cette ferme plus que lui, que j’étais destiné à quelque chose de plus grand. Mais je me suis trompé, Ayelévi. J’ai détruit ma vie et celle de tant d’autres pour rien. »
Ayelévi détourna les yeux, incapable de soutenir son regard.
— « Et maintenant ? » demanda-t-elle enfin.
— « Maintenant, je dois retourner à Fongbé-Zogbédzi, » dit Ethiam, une résolution nouvelle dans la voix. « Je dois confesser mes crimes et affronter les conséquences. Si je ne le fais pas, tout ce que j’aime disparaîtra. Toi, Pépé… Je ne peux pas laisser cela arriver. »
Un long silence s’installa à nouveau. Puis, contre toute attente, Ayelévi posa une main sur son épaule.
— « Si tu fais cela, Ethiam, si tu fais vraiment face à tout ça, alors peut-être qu’il y a encore de l’espoir. Pas pour nous… mais pour toi. »
Ses mots résonnèrent comme une promesse, un mince filet de lumière dans l’obscurité oppressante qui entourait Ethiam. Il hocha la tête, sentant pour la première fois depuis longtemps une lueur d’espoir naître en lui.
La route serait longue, mais il savait maintenant ce qu’il devait faire.
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Le salon exigu où elles se tenaient semblait soudainement trop petit pour contenir l’intensité de la conversation qui s’y déroulait. Nadine était assise sur le bord du canapé, ses mains serrées l’une contre l’autre, trahissant son anxiété. En face d’elle, Sélinam croisait les bras, le visage fermé, essayant de deviner ce qui allait sortir de la bouche de Nadine.
— « Sélinam, » commença Nadine, sa voix tremblant légèrement, « il faut que je te parle. C’est… c’est important. »
Sélinam hocha la tête, méfiante mais curieuse.
— « Je t’écoute, » répondit-elle d’un ton neutre, bien qu’un nœud commençait à se former dans son estomac.
Nadine prit une profonde inspiration, cherchant le courage de continuer.
— « Je ne sais pas comment te dire ça, mais… je vais être honnête. Tu te rappelles quand je t'avais raconté que j’ai trouvé ce nouveau travail grâce à une connaissance ? »
— « Oui, » répondit Sélinam, fronçant les sourcils. « Tu avais mentionné quelqu’un qui t’avait beaucoup aidée. Quel rapport avec moi ? »
Nadine détourna le regard, incapable de soutenir celui de Sélinam. Elle sentait son cœur battre à tout rompre.
— « Cette personne… c’est Kodjo, » lâcha-t-elle finalement, sa voix à peine un murmure.
Un silence glacial envahit la pièce. Sélinam resta figée, son cerveau essayant de traiter l’information. Kodjo. Ce nom résonnait dans son esprit comme une cloche lointaine.
— « Kodjo… mon ex-mari ? » demanda-t-elle, comme si elle espérait avoir mal entendu.
— « Oui, » répondit Nadine, les larmes aux yeux. « Je ne savais pas qu’il était ton ex-mari quand je l’ai rencontré. Il m’a beaucoup soutenue, Sélinam. Il m’a aidée à trouver ce travail quand j’étais au plus bas. Et… et avec le temps, je suis tombée amoureuse de lui. »
Sélinam sentit son cœur manquer un battement. Une vague de souvenirs douloureux s’empara d’elle : le mariage avec Kodjo, les disputes, la séparation. Elle se revit signer les papiers du divorce avant de partir pour épouser Sika, pensant que la vie serait plus simple ainsi. Mais elle ne s’était jamais attendue à ce que ce passé qu’elle avait cru enterré ressurgisse de cette manière.
Nadine continua, sa voix entrecoupée de sanglots.
— « Je suis désolée, Sélinam. Si j’avais su dès le début, je te promets que rien de tout cela ne serait arrivé. Mais… mais maintenant, c’est trop tard. Je suis complètement amoureuse de lui. »
Sélinam resta silencieuse, les bras croisés, regardant fixement un point invisible sur le mur. Elle voulait être en colère, hurler même, mais une part d’elle savait que ce n’était pas la faute de Nadine. Après tout, c’était elle qui avait quitté Kodjo, brisant leur mariage sans regarder en arrière. Et Kodjo… Il avait toujours été quelqu’un de bien, mais elle l’avait négligé, préférant poursuivre ce qu’elle pensait être une vie meilleure aux côtés de Sika.
Elle se tourna finalement vers Nadine, ses yeux brillant d’une émotion qu’elle ne pouvait pas encore nommer.
— « Alors, vous êtes ensemble maintenant ? » demanda-t-elle, sa voix étonnamment calme.
Nadine acquiesça timidement.
— « Oui. Mais je ne veux pas que cela détruise notre relation, Sélinam. Tu es de ma famille. Je voulais que tu l’entendes de ma bouche. »
Sélinam esquissa un faible sourire, bien qu’il soit chargé de tristesse.
— « Tu sais, Nadine… Ce n’est pas de ta faute. Et ce n’est pas non plus celle de Kodjo. C’est moi. Je l’ai quitté. Je l’ai abandonné à une période où il avait besoin de moi. Je n’ai jamais pris le temps de me demander comment il allait, ce qu’il ressentait. »
Elle marqua une pause, jouant nerveusement avec ses doigts.
— « Je suppose que je n’ai pas le droit de vous en vouloir. Mais ça ne veut pas dire que c’est facile pour moi. Kodjo a été… il a été tout pour moi à une époque. Le voir avec toi, ça… ça me fait mal. »
Les larmes coulaient silencieusement sur les joues de Nadine.
— « Je comprends, Sélinam. Et si tu veux que je m’éloigne de lui, je le ferai. Je ne veux pas te faire de mal. »
Sélinam secoua la tête, un sourire triste sur les lèvres.
— « Non. Tu ne peux pas contrôler tes sentiments, Nadine. Et moi non plus. Si tu es heureuse avec lui, alors… alors je devrai apprendre à vivre avec ça. Mais je vais avoir besoin de temps, d’accord ? »
— « Bien sûr, » répondit Nadine, essuyant ses larmes. « Je te promets de te laisser tout le temps dont tu as besoin. Merci, Sélinam. Merci pour ta compréhension. »
Sélinam hocha la tête, puis se leva, cherchant une échappatoire à cette conversation trop lourde.
— « Je vais me coucher. On en reparlera plus tard. Bonne nuit, Nadine. »
Nadine la regarda s’éloigner, un poids immense toujours sur sa poitrine. Elle savait que leur relation ne serait plus jamais la même. Mais elle espérait, au fond d’elle, que le temps pourrait apaiser les blessures qu’elle venait involontairement de raviver.
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La nuit était tombée sur la maison de Nadine, mais l'atmosphère à l'intérieur était loin d’être apaisée. Kodjo se tenait dans le petit salon, son regard déterminé fixé sur Sélinam, qui était assise sur une chaise en face de lui. Nadine, debout près de la fenêtre, semblait mal à l’aise, ne sachant où poser son regard. La mère de Nadine était assise dans un coin, observant la scène avec un air de sagesse silencieuse.
Kodjo inspira profondément, essayant de contenir le flot d’émotions qui le submergeait.
— « Sélinam, » commença-t-il d’un ton grave, « je suis venu ce soir pour clarifier les choses une fois pour toutes. Nadine m’a dit que tu sais pour nous deux, et je pense qu’il est temps que nous ayons une discussion franche. »
Sélinam, qui avait évité son regard depuis le début, releva lentement les yeux. Elle n’avait jamais vu Kodjo aussi déterminé, et cela la déstabilisa.
— « Kodjo, » murmura-t-elle, sa voix tremblant légèrement, « je ne suis pas venue pour créer des problèmes entre toi et Nadine. Je… je voulais juste comprendre. »
Kodjo croisa les bras, son visage impassible.
— « Comprendre quoi, Sélinam ? Comprendre pourquoi j’ai refait ma vie ? Pourquoi je ne t’ai pas attendu après que tu m’as abandonné pour Sika ? »
Sélinam baissa la tête, incapable de répondre. Les mots de Kodjo étaient comme des flèches, touchant des points sensibles qu’elle aurait préféré ignorer.
— « Tu sais, » continua Kodjo, sa voix se faisant plus dure, « quand tu es partie, tu ne t’es même pas retournée pour savoir comment j’allais. Tu m’as laissé dans une telle détresse que j’ai perdu mon travail. J’ai failli perdre ma vie, Sélinam. Tu étais ma femme, et tu m’as laissé tomber comme si je n’avais jamais compté. »
Sélinam sentit les larmes monter, mais elle se força à rester calme. Elle savait que Kodjo avait raison.
— « Kodjo, je suis désolée… Je… Je pensais que je faisais le bon choix à l’époque. Je croyais que ma vie avec Sika serait meilleure, mais je me suis trompée. »
Kodjo éclata de rire, un rire amer.
— « Ah, tu t’es trompée ? Et pendant ce temps, moi, je devais souffrir en silence, c’est ça ? Pendant que toi, tu construisais ta nouvelle vie, je me battais pour garder la tête hors de l’eau. »
Nadine, qui avait écouté en silence jusque-là, intervint timidement.
— « Kodjo… peut-être que… »
Kodjo leva une main pour l’interrompre, son regard toujours fixé sur Sélinam.
— « Non, Nadine. Elle doit entendre tout ça. »
Il se tourna de nouveau vers Sélinam.
— « Tu sais ce qui me blesse le plus ? Ce ne sont même pas tes choix, c’est le fait que tu n’aies jamais demandé de nouvelles de nos enfants. Nos enfants, Sélinam ! Ils avaient besoin de leur mère, et toi, tu étais où ? Avec ton pasteur Sika, à jouer à la bonne épouse ? »
Sélinam ne put plus contenir ses larmes. Elle se leva brusquement de sa chaise et se mit à genoux devant Kodjo.
— « Kodjo, je suis désolée. Je sais que j’ai fait des erreurs, de graves erreurs. Mais je te supplie de me pardonner. Je… je veux juste retrouver une relation avec mes enfants. Je ne veux pas gâcher ce que tu as avec Nadine, je veux juste… je veux juste réparer ce que j’ai brisé. »
Kodjo recula légèrement, surpris par son geste. Il regarda Nadine, qui semblait à la fois troublée et émue par la scène. La mère de Nadine, qui était restée silencieuse jusque-là, prit enfin la parole.
— « Kodjo, pardonner ne veut pas dire oublier. Mais tu dois reconnaître que Sélinam essaie de faire amende honorable. Peut-être qu’il est temps de tourner la page pour de bon, mon fils. »
Kodjo soupira profondément, passant une main sur son visage. Il fixa Sélinam, toujours à genoux devant lui, et sa colère sembla légèrement s’apaiser.
— « Écoute, Sélinam, » dit-il d’une voix plus calme, « je ne te déteste pas. Mais il faut que tu comprennes une chose : je suis passé à autre chose. Nadine est ma vie maintenant, et rien ne changera cela. »
Il posa une main sur l’épaule de Nadine, un geste plein de tendresse.
— « Elle a été là pour moi quand j’avais besoin de quelqu’un. Elle m’a aidé à reconstruire ma vie. Et je ne laisserai personne, pas même toi, gâcher ce que nous avons. »
Sélinam hocha la tête, ses larmes tombant sur le sol.
— « Je comprends, Kodjo. Je n’essaierai pas de me mettre entre vous. Mais… s’il te plaît, laisse-moi revoir mes enfants. »
Kodjo resta silencieux un moment, puis acquiesça lentement.
— « Tu peux voir les enfants, Sélinam. Mais ça s’arrête là. »
Sélinam releva la tête, une lueur d’espoir dans les yeux.
— « Merci, Kodjo. Merci. »
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La soirée était calme dans la maison de Sika. Installé dans son grand salon luxueusement décoré, il profitait d’un rare moment de détente. Son esprit, cependant, n'était pas en paix. Depuis qu'il avait extorqué les cinquante millions à Ethiam dans une affaire douteuse, une certaine anxiété le hantait; le départ de Martiella et les enfants n'a pas non plus arrangé les choses.
Plongé dans ses pensées, il ne remarqua pas immédiatement l’étrange changement d’atmosphère dans la pièce. Une brise glaciale s’insinua par les fenêtres pourtant fermées, faisant frémir les rideaux. Soudain, un éclat sombre, presque surnaturel, se forma au centre de la pièce.
C’est alors qu’elle apparut : la sacoche noire.
Flottant dans les airs, elle semblait vibrer d’une énergie malveillante. Sika écarquilla les yeux, son cœur battant à tout rompre. Il bondit de son divan en criant :
— « Fire! Fire! »
Sa voix résonna dans la maison vide, mais aucun secours ne vint. La sacoche noire s’ouvrit lentement, et une voix grave, sinistre, en sortit, emplissant l’espace d’un écho terrifiant :
— « Rends les cinquante millions que tu as anarqué à Ethiam si tu ne veux pas que je te tue, toi et ta famille ! »
Sika recula précipitamment, trébuchant sur la table basse.
— « Quoi ? Qui… qui parle ? Qu’est-ce que c’est que ça ? »
La sacoche tourna sur elle-même, et la voix devint encore plus menaçante :
— « Tu sais très bien qui je suis, Sika. Tu as osé manipuler Ethiam pour lui voler son argent; cet argent maudit, pensant m'anéantir! Maintenant, la justice des esprits est en marche. Rends cet argent, ou tu subiras ma colère. »
Sika, tremblant de peur, s’agenouilla au sol, levant les mains en signe de supplication.
— « Non, non, je vous en supplie… Je… je ne peux pas rendre l’argent. J’ai tout investi dans mes affaires. Je n’ai plus rien ! »
Un rire glaçant résonna dans la pièce.
— « Tu penses pouvoir tromper les esprits comme tu trompes les hommes, Sika ? Ne mens pas à celui qui sait tout. Tu as une semaine pour restituer cet argent, ou je viendrai te chercher. Et cette fois, il n’y aura plus d’avertissement, ni de coma. »
Sika secoua la tête frénétiquement, ses larmes coulant sur ses joues.
— « Mais… mais comment ? Je ne peux pas trouver une telle somme en si peu de temps ! Je suis désolé ! Je ne voulais pas… Je… Je vais essayer, je vous le promets ! »
La sacoche noire émit une dernière lueur, puis disparut brusquement, laissant derrière elle un silence glacial et une odeur de soufre.
Sika resta figé, tremblant de tout son corps, incapable de bouger ou même de penser clairement.
Il murmura pour lui-même, le souffle court :
— « Qu’est-ce que j’ai fait ? Oh mon Dieu, qu’est-ce que j’ai fait ? »
L’image de la sacoche noire restait gravée dans son esprit. Il savait qu’il n’avait pas le choix. Le compte à rebours venait de commencer, et avec lui, une course contre le destin.
À suivre…
Écrit par Koffi Olivier HONSOU.
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