
Chapitre 5
Ecrit par Josephine54
Beverly
Comme de coutume, je m'étais levée tôt et avais préparé tout le nécessaire pour les enfants. Je les avais ensuite réveillés et préparés pour l'école. Les bruits de la maison n'avaient en rien réveillé leurs deux parents, qui dormaient encore : l'un, toujours pris dans les vapes de l'alcool, et l'autre, se remettant sûrement d'une nuit endiablée. Je m'étais endormie vers une heure du matin après avoir étudié, et maman n'était toujours pas rentrée.
J’avais déposé les plus petits à l’école et avais pris un taxi pour me rendre chez Arthur.
Je me demandais encore pourquoi je m’investissais autant pour lui. J'avais passé une bonne partie de l'après-midi d'hier à faire des courses pour lui et, maintenant, je me rendais encore chez lui pour l'aider à préparer. Je n'avais déjà pas assez de temps pour moi-même et ma famille, mais il fallait en plus que je m'occupe de quelqu'un d'autre ?
Le manque de temps était d'ailleurs l'une des raisons de mon célibat. Où aurais-je trouvé du temps pour me consacrer à un homme ? Et pourtant, c'est nécessaire pour toute relation amoureuse. Je me consolais simplement en me disant que j'étais encore toute jeune et que j'aurais tout le temps plus tard pour trouver quelqu'un.
« Je suis devant la chapelle de Tsinga » écrivis-je à Arthur.
Malheureusement au Cameroun, bien que les rues soient numérotées et aient toutes un nom, nous ne les utilisions jamais pour nos déplacements. Nous nous référions généralement à des édifices importants dans les environs.
« Donne-moi juste une minute et je te rejoins ».
Arthur arriva en effet peu de minutes plus tard.
- T’as eu de la peine à trouver ? demanda-t-il gentiment.
- Mais non, t’inquiète, je connais très bien la zone. J’y passe très souvent pour me rendre au marché.
- D’accord, répondit Arthur avec soulagement.
Une petite gêne s’installa entre nous.
- On y va alors ? demanda Arthur.
Je hochai simplement la tête et Arthur me saisit naturellement la main pour me guider. Je me sentais embarrassée, mais je n’osais pas la retirer.
Il se faufila dans des ruelles étroites et quelques minutes plus tard, il s’arrêtait devant une porte. Il lâcha enfin ma main et plongea la sienne dans sa poche pour en sortir les clés.
Il ouvrit la porte et m’invita à y entrer. J’accédai à son antre et jetai un regard circulaire autour de moi. La pièce était très petite, d'environ vingt mètres carrés, avec un lit une place, un petit frigo et une cuisinière pour préparer les repas.
Je remarquai une porte au fond de la pièce. Ce devait être les toilettes.
- On devrait s’y mettre si nous ne voulons pas arriver en retard au cours, dis-je en me tournant vers Arthur.
- D’accord, répondit-il en se précipitant vers un des sacs qu’il avait ramenés hier.
- On pourrait faire une simple sauce tomate avec du poisson. On fera beaucoup de sauce, car la tomate met énormément de temps pour cuire. Tu pourras congeler une partie et l’utiliser plus tard comme base pour de la sauce d’arachide ou faire simplement des pâtes.
- D’accord, répondit docilement Arthur.
- T’as un couteau ?
- Euh... je n'en sais rien, mais je pense bien que oui. Jusqu'ici, je n'avais utilisé que les plats et les couverts pour manger. Je n'avais pas encore eu besoin d'un couteau.
Il ouvrit un petit tiroir où se trouvait tout le nécessaire de cuisine. Il y trouva un couteau et me le montra d’un air triomphant.
Roman écrit par Justine Laure (page Facebook Plume de Justine Laure)
- Il est là ! s’écria-t-il. La chambre a été louée avec tout le nécessaire, mais je n’avais pas fait attention.
- Je vois, répondis-je. Nous allons d’abord découper les oignons.
S'ensuivit un cours de cuisine assez accéléré où j'essayai de lui donner des notions de base, mais j'étais bien consciente que, partant de zéro, il faudrait bien plus qu'une séance pour qu'il soit un minimum indépendant en cuisine. Son air égaré confirmait mes pensées.
- Euh, tu vas déjà manger ceci, cela va t’aider pendant deux jours, aujourd’hui avec du riz et demain avec des pâtes, et on verra en semaine quand j’aurai un peu de temps libre.
- Merci, merci pour tout, dit Arthur d’un ton reconnaissant.
- Il n y a pas de quoi. Euh... je devrais prendre un bain maintenant, dis-je en jetant un regard autour de moi.
J’étais venue vêtue d’un caba (robe en pagne) et j’avais prévu des vêtements de rechange dans mon sac.
La pièce était tellement petite que je ne savais où me changer avant de me rendre aux toilettes.
- Je te passe déjà une serviette, lança Arthur en ouvrant une armoire. Je vais sortir pour te permettre de te changer et de prendre un bain.
- Mais non, je vais le faire directement à la douche.
- Hum... c’est extrêmement étroit, mais si tu veux bien essayer…
Je saisis de la serviette en question d’un air embarrassé et me rendis aux toilettes.
Je dus admettre qu’Arthur avec bien raison. Je devais carrément faire des acrobaties de contorsionniste pour réussir à me déshabiller. Je pris rapidement un bain et cédai ensuite la place à Arthur.
- Je peux attendre dehors, vu ta carrure, ce ne sera pas facile.
- T’inquiète ma belle, j’y arriverai. J'y suis habitué, répondit simplement Arthur en se rendant à son tour aux toilettes.
Il en ressortit près de 15 minutes plus tard. Il était vêtu d’une paire de jeans qui mettaient en valeur ses cuisses musclées et d’un t-shirt blanc. Mon regarda s’attarda un bref moment sur sa carrure imposante avant que je ne détourne les yeux.
- On y va ? demanda Arthur en se saisissant de son sac.
Je fis de même et on se dirigea vers la porte. Arthur posa la main sur la poignée, mais ne l’ouvrit pas immédiatement. Je tournai donc la tête d’un air incompris vers lui et mon regard croisa le sien.
Une espèce de vide se créa entre nous et on resta à se regarder un long moment.
- Euh... je tenais une fois de plus à te remercier. J’apprécie énormément ton geste, car je sais que tu es toujours très occupée. C’est vraiment gentil de ta part.
- Tu n’as pas à me remercier, dis-je d’un ton embarrassé. On devrait y aller si on ne veut pas arriver en retard au cours.
- Tu as raison, lança Arthur avec un sourire et il ouvrit finalement la porte.
Je poussai un ouf de soulagement en sortant de sa chambre. J'ai craint un bref instant qu'il ne tente quelque chose, mais heureusement, ce ne fut pas le cas. Cependant, je dois admettre qu'il m'a semblé, un moment, qu'il s'était simplement ravisé.
Arthur
J’étais maintenant à Yaoundé depuis un mois. Tout se passait bien. Je m’impliquais autant que je le pouvais avec les cours. Je donnais vraiment le maximum.
Durant ce mois, je m’étais lié d’amitié avec Beverly et Amanda. Nous passions beaucoup de temps tous les trois.
Amanda essayait toujours de m’aguicher, mais je faisais semblant de ne pas le noter. J'avais échangé mon numéro avec elle aussi et, pour être totalement sincère, c'est elle qui m'avait d'abord demandé le mien avant de m'envoyer un message pour me communiquer le sien. Depuis ce jour, elle m'écrivait presque tous les soirs, et je prenais tout de même le temps de lui répondre.
Quant à Beverly, je peinais à définir les liens qui nous unissaient. Elle était venue m'aider plus d'une fois à préparer mes repas, et je devais admettre qu'elle était d'une grande aide.
Je me débrouillais déjà assez bien en cuisine, mais je lui demandais encore quelques conseils par message et elle me répondait toujours très gentiment.
J’étais revenu des cours depuis peu et étais en train de réchauffer la nourriture de la veille quand je fus distrait par mon téléphone qui sonnait. L’appel venait, comme toujours, de maman.
Je décrochai en tournant la sauce dans la marmite quand la voix stridente de maman m’obligea à éloigner rapidement le téléphone des oreilles.
- Mvogo, on doit souvent te parler combien de fois pour que tu comprennes !? hurla maman au téléphone.
Quand maman utilisait mon nom de famille et surtout, quand elle utilisait ce ton de voix, cela ne présageait absolument rien de bon.
- Je t'ai parlé mille fois de tes amis, mais toi, tu étais trop grand pour m'écouter ! La police vient de quitter le quartier. Elle a pris un à un tes amis, et un autre a réussi à s'échapper.
À ces mots, mon cœur se mit à cogner très fort dans ma poitrine.
- De quoi parles-tu maman ? demandai-je tout de même.
- Je parle des délinquants avec qui tu traînais ici au quartier. Je t'avais parlé du braquage qui avait eu lieu dans le bar de monsieur Fotso il y a quelques semaines, non ? Le fils de la dame qui vend les tomates au carrefour est apparemment le chef de gang.
La maman de Raphaël, un de mes amis, vendait en effet des tomates à un carrefour près de la maison.
- Il a dit qu’il n'avait pas l'intention de tomber seul. Il a apparemment donné le nom de certains gars du quartier. Tous tes amis Mvogo, je dis bien tous tes amis.
Mon cœur accéléra sa course à ces mots. Si maman me le racontait, ça voulait dire que mon nom n’avait pas été cité et que personne n’avait toqué chez elle.
- Mais maman, j'étais déjà ici quand cela s'est produit, protestai-je mollement.
- "Mais maman, j'étais déjà ici quand cela s'est produit." me mima maman d'une voix ironique. Combien de fois t'ai-je parlé dans cette maison Mvogo ? J'espère que ton nom ne sera cité dans aucun de leurs coups précédents !
Un silence de plomb s'installa sur la ligne.
- Le fils de madame Njoya leur aurait échappé. Il aurait apparemment été averti de la présence de la police au quartier, mais je reste convaincue que ce n’est qu’une question de temps. Il sera pris, lui aussi.
Elle parlait d’Achille, un autre de mes amis. Dieu merci, je n’avais pas été cité, ce qui aurait déjà été une accusation mensongère vu que je m'étais déjà transféré à Yaoundé quand cela s'est produit. D'un autre côté, je craignais qu'ils ne citent mon nom dans un précédent coup, peut-être par vendetta.
À mon arrivée à Yaoundé, ils avaient essayé de me contacter, mais je n'avais jamais répondu à leurs appels. Après quelques jours, j'avais décidé de changer de carte SIM pour couper totalement les ponts avec eux. Si je voulais vraiment donner un nouveau départ à ma vie, je devais le faire de manière radicale.
- En tout cas, je ne veux plus te voir traîner avec eux ! Je ne veux même pas que tu les cherches quand tu viendras ici. De toute façon, si tu veux les voir, il te faudra te rendre à New-Bell, dit maman d’un ton moqueur. Voilà les amitiés pour lesquelles tu nous tenais tête dans cette maison.
New-Bell était le quartier où se trouvait la prison centrale de Douala.
- Ah maman, je n'ai plus de leurs nouvelles depuis que je suis parti. J'avais décidé de prendre un nouveau départ.
- C'est très bien, continue comme ça et concentre-toi sur tes études.
- J'en ai bien l'intention maman, répondis-je d'une voix ferme.
Maman raccrocha une fois de plus après mille recommandations et m'avoir prodigué toutes ses bénédictions.
Cette vie appartenait désormais au passé et je voulais commencer sur des nouvelles bases à Yaoundé. Je devais me concentrer sur mes études, mais en plus, je n'allais pas éternellement être une charge à vie pour mon frère.
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