Chapitre 8 : Pas le choix

Ecrit par Fleurie

Deux semaines après




°°° Anissa °°°



Après cet incident, je me suis rendue à l’hôpital, pour m’assurer que mon enfant se porte à merveille, et que tout va aussi bien de mon côté. Heureusement, le docteur m’a confirmé qu’il est encore en bon état. Je me suis difficilement remise de l’incident précédent.



-Vous devez prendre soin de vous. Vous avez de la chance que le coup n’a pas été si fort pour endommager quoi que ce soit. Gardez désormais votre sang froid, quel que ce soit le problème.


-OK merci docteur.


-Je vais vous prescrire des médicaments qui vont vous aider.



[ … ]



-Ouvre cette porte Ani, je t’en conjure.


-Va te faire foutre Eddy. Criai-je pour qu’il s’en aille et me colle la paix.


-Tu vas ouvrir cette porte, ou je la défonce dans la minute qui suit. Et tu me connais.


-Que tu es qui Eddy va loin, je ne veux pas te voir, tu me dégoûtes.



Il y a eu un petit flottement dans l’air. J’en ai profité pour essuyer mes larmes, pour qu’il ne me voit pas cet état.



-Anissa ne nous prenons pas la tête, s’il te plaît. J’aimerais qu’on discute calmement. Fit-il en cognant la porte.



Je savais qu’il ne plaisantait pas. Eddy est un homme qui pouvait être très impulsif par moment. Si je ne lui ouvrais pas, il risquait de faire une folie. J’ai toujours respecté cet homme. Il n’était pas question de faiblesse. J’ai un peu traîné avant d’enlever mon corps du carreau. J’ai arrangé mon visage pour qu’il ne s’aperçoive pas que j’ai pleuré.  Je ne devais en aucun cas, lui montrer ma fragilité. Après avoir flashé, je lui ai ouvert la porte. Il avait le front collé au mur. Je l’ai regardé sans broncher. Je ne pouvais pas imaginé qu’il allait changer à ce point.



-Anissa je suis désolé pour ce qui vient de se passer. Pardonne-moi ma chérie. J’avoue que j’ai été un con, enfin il n’y a pas de mot pour qualifier mon acte. 



Il m’avait l’air très abattu et je pouvais lire ce sentiment de culpabilité dans ses yeux. Ce sentiment de honte qui le rongeait. Il articulait difficilement les mots. Je lui ai fait face en croisant fermement les bras sur ma poitrine.



-Ton pardon ne peut rien effacer en moi. Le mal a déjà été fait. Tu n’as pas pensé à nous en faisant ta connerie. Que pensais-tu, que j’allais faire comme si de rien n’était. Non Eddy, pendant que je me tue pour cette relation et pour notre avenir, tu te la coules douce avec elle. Je parie qu’il y a d’autres, dont j’ignore l’existence.


-Il n’y a qu’elle seule. Je l’ai fait dans un moment d’inconscience. Et je te jure que j’aimerais tellement retourner en arrière.


-Tu as l’audace de me le dire en face. Une erreur qui a engendrée une grossesse ? Tu te moques de moi apparemment.


-Ne me dis pas que tu vas annuler la dot chérie. Je suis prêt à réparer le mal que je t’ai fait. Donne-moi une chance pour te montrer que je regrette vraiment ce qui est arrivé. Je ferai tout ce que tu voudras, tu as ma parole. Je suis suspendu à tes lèvres. Je mourrai si jamais tu me laissais tomber. Ne me rends pas le coup.


-Il  fallait y penser, tsuiiiip.



Il m’a fait pitié avec son visage de chien abattu, mais l’homme reste l’homme. Qui a bu, boira dit-on. Je ne savais plus quoi faire au juste. J’ai soupiré avant de continuer mon discours.


-Qu’est-ce qui me garantit que tu n’iras plus vers elle ?


-Tu as ma parole. Je n’ai plus rien à avoir avec elle. La dernière fois que nous nous sommes rencontrés, remonte à quatre semaines avant ta descente au pays. Tu dois me croire.


-Qu’en est-il de ton enfant qu’elle porte ?


- …


-C’est à toi que je m’adresse Eddy, réponds-moi merde, hurlai-je en reniflant.


-Je vais assumer mes responsabilités de père, rien de plus.


-Je n’ai jamais souhaité partager l’homme que j’aime. Ma confiance vient d’être brisée. Il me sera difficile de tout oublier.


-Ce qui veut dire que tu me pardonnes. Je ferai tout mon possible pour que tu aies de nouveau confiance en moi. Merci mon cœur.



Il s’est empressé de se jeter dans mes bras. Je l’ai lentement repoussé.



-Pas si vite.


-Qu’il y a-t-il encore ?


-Ne t’avise plus jamais de me faire un coup pareil.


-C’est promis. Je t’aime.



Je l’ai dépassé pour aller vers la sortie. Dehors tout était calme, même la musique ne résonnait plus. J’ai vu mes parents qui étaient en pleine discussion avec ceux de votre parent. Je me suis approchée d’eux. Ce qui s’est passé était un problème de famille. Je discuterai des détails avec les miens plus tard. J’ai toujours aimé mon homme. J’ai décidé de me battre jusqu’au bout. Les hommes sont tous les mêmes. J’ai longtemps réfléchi à la stratégie à adopter avec lui.



-Chérie, ça va ? Demanda ma mère toute inquiète.


-Oui ma mère, ça peut aller, où est mon oncle ?


-Il arrive, il ne saura tarder.


-J’ai besoin de m’entretenir avec toi.



Nous sommes allés à l’intérieur.



-Raconte-moi tout.



Je lui ai relaté les faits tels qu’ils étaient, sans omettre aucun détail.



-Et que comptes-tu faire ma puce ? Tu sais, la vie de couple ce sont les difficultés du genre.


-Je vois.


-Qu’il soit blanc ou noir, ils seront toujours ce qu’ils sont.



Elle m’a donné pleins de conseils. J’ai compris que le reste était à gérer par moi, et rien que par moi.



-Je vais continuer comme si de rien était. Maman c’est mon homme. Et je ferai tout mon possible pour le garder. Et avec la prière, je peux tout changer.


-Très bien ma fille, si tu as besoin de quoi que ce soit, je suis là.


-Merci maman.



Nous sommes ressorties, et mes oncles ont poursuivis la cérémonie. Je devais serrer le cœur.



°°° Yannaël °°°



Je donne le meilleur de moi-même depuis plus d’un mois. Et jusque-là, tout se passe sans encombre. Mike n’a pas eu à se plaindre de mon travail. Au contraire, il m’encourage davantage. C’est une très grande structure, il faut du professionnalisme pour la gérer. Et pour cela, je joue bien ma partition. Je suis l’homme le plus heureux dernièrement. J’ai enfin comblé ce vide qui me rongeait depuis des mois, pour ne pas dire des années. Je confirme, que Dieu existe vraiment. Et il est très miséricordieux.



Confortablement assis dans la dernière rangée, nous sommes tous présents à la célébration de la Ste Trinité ce matin, à St Michel de Cotonou. Nous avons apporté des présents en guise de remerciements à l’Eternel. Pour ses bienfaits, on ne finira jamais assez de lui rendre grâce. Je l’ai compris, mais un peu plus tard. Mais nous avons toujours la chance de nous rachter. La célébration a été divinement belle. Je me suis senti renaître.



A la sortie de l’église, j’ai amené ma famille passer du bon temps dans un hôtel au bord de la mer. Les filles ont tellement adoré ma surprise, sans oublier Lolo. Le reste de la journée s’est passé en beauté en famille.



Le lendemain dans l’après midi



-Alors mon cher ami, comment vas-tu ? Commença Mike, en tirant sur son tabac.


-Cool mon cher, je ne me plains pas.


-C’est une bonne nouvelle alors.


-Et tout ceci est grâce à toi. Je ne te remercierai jamais assez.


-C’est la volonté de Dieu. Tu sais que c’est par les hommes qu’il aide ses enfants. Et nous sommes des frères, dit-il en souriant.


-Effectivement.


-Euh, si je t’ai fait appel, c’est pour te remercier.



Son ton a commencé par m’intriguer. Je me suis senti un peu embarrassé, même sans savoir de quoi il s’apprête à me parler.



-Tiens ceci, c’est pour toi.


-Qu’est-ce que c’est Mike ?


-Ouvre et tu verras de toi-même. Continua-t-il en joignant le bout de ses doigts.



J’ai un peu hésité avant d’ouvrir l’enveloppe. J’ai été très surpris de voir cette somme.



-Mais c’est une fortune que tu m’offres Mike, à quoi dois-je ceci ?


-Je te l’offre pour ta loyauté et ta fidélité envers moi et envers mon entreprise. Reçois-le en guise de reconnaissance et d’aide de ton frère.


-Je ne peux pas l’accepter. Ce que tu me paies me suffit largement. Tu vas m’excuser, mais je ne peux pas Mike.


-J’insiste, et je serai blessé si tu me le retournes, alors garde le. Fit-il en repoussant l’enveloppe que je lui ai tendue.



J’ai fini par le prendre. Il a simplement souri. Nous avons déjeuné avant de quitter le restaurant, pour retourner au service.



[ … ]



-Je ne suis d’accord Yan, tu aurais dû refuser cette somme. S’en est de trop. Je ne vois pas pour quelle raison il t’offrirait une récompense pareille. 


-Bébé calme toi.


-Non chéri, tu vas lui rendre son argent et je ne veux plus rien entendre. Il est certes ton ami, mais nous ne voulons pas de ce genre d’aide. Nous ne sommes pas affamés dans cette maison. Je refuse qu’il nous achète avec son argent. Je lui suis déjà reconnaissante de t’avoir permis de travailler dans sa structure. Pour ma part, c’est suffisant.



Cette femme peut agir étrangement des fois. Je ne le comprends pas.



-C’est compris.


-J’espère pour toi que tu le feras.


-Hum


-Je te vois venir, je n’aime pas ça. Ne m’énerve surtout pas. Mon cœur n’augure rien de bon avec cet argent. Tu ferais mieux de faire comme je te dis.



Je l’ai simplement prise dans mes bras. Elle a un peu boudé avant de se détendre en me chipant.



-Bonne nuit mon cœur.



Contre toute attente, c’est son silence que j’ai reçu comme réponse. J’ai éteint la veilleuse du chevet, avant de tirer la couverture vers nous.



Tard dans la nuit



[ Bip message ]



Je me suis levé en sursaut, en ayant entendu la sonnerie du message.


《 Sois présent demain plutôt, j’ai besoin de toi pour un travail très urgent. Je suis désolé de te déranger à une heure tardive, mais ça en vaut vraiment la peine. 》



Je ne sais pas de quel travail il s’agit. Ne peut-il pas patienter jusqu’à demain avant de m’avertir. C’est difficilement que j’ai retrouvé mon sommeil.



Quelque part dans Cotonou



-Es-tu sûre de ce que tu veux faire ? Je connais un monsieur qui est très efficace concernant ce genre d’affaire.


-Okay, si tu le dis, tout ce que je veux tu le sais déjà.


-C’est comment avec toi ? Tu ne veux plus partir ? Je vais te laisser maintenant. Hurla-t-elle en regardant sa montre.



Cette sacrée dame ne joue pas avec la ponctualité. Si je ne me grouille pas, c’est par les cheveux qu’elle viendra me tirer.



-Tu n’as pas besoin de faire du bruit, toi aussi. J’arrive déjà, je portais mes escarpins. Je suis prête, on y va ?


-Tsuiiiip.


-Je t’aime aussi.



Une fois à l’extérieur de la maison, nous avons chacune pris un zémidjan pour nous rendre au lieu indiqué. Arrivées là bas, nous avons pris le taxi qu’il faut pour notre voyage.



[ … ]



-Ko ko ko mi do houé kan bio houè min daho mi ton ( nous vous saluons grand maître ).


-Mi bio ho min, min tché lè mi, mi kwabo ( entrez mes gens, soyez les bienvenues )



Nous nous sommes inclinées, et il nous a bénies en mettant son bâton à plumes sur nos têtes. Après s’être bien installées, j’ai expliqué la raison de ma visite chez ce grand redoutable maître.



-Ha ha ha ha, fi da gbé djin mi ko wa nin min. Noué gbé mi ton ko gni wiwa houè ( vous êtes au bon endroit, considérez que votre travail est déjà fait ).


-Ekana tchè nou mi min da ho ( merci grand maître )



Ce lieu me paraît un peu étrange. Nous sommes en plein milieu d’une grande forêt. Le bruit de divers oiseaux ne cessent de se faire entendre.  Je n’y avais jamais mis pieds. Je vois des choses que je ne peux même pas d’écrire. Pendant un court instant, j’en ai eu la chair de poule. Mais pour la bonne cause, je suis prête à tout supporter. J’ai bien ajuster ma chemise pour ne plus avoir froid.



Il a ordonné à son serviteur, qui n’a pas tardé à  lui apporter un sac de couleur blanche, enfin beige. Celui-ci a changé de couleur à cause de la terre. Il l’a saisi avec précaution. Il a ensuite, fait sortir tout ce qu’il contient. Il a versé de la poudre sur son tableau. Après avoir prononcé quelques mots, il a fait des signes de mains sur ce dernier. Il a commencé par adresser ses salutations aux ancêtres. Le reste a paru dans nos oreilles comme du chinois. Nous le regardons faire sans dire un mot. J’ai tourné mon regard vers elle. Elle est tellement concentrée sur cet homme.



-J’ai envie de sortir, dis-je sentant le besoin de me libérer la vessie.


-Pas maintenant chérie, nous sommes en pleine séance, c’est comment ? Chuchota-t-elle à mes oreilles



 Voyant que  je ne peux pas attendre, elle s’est approchée du maître pour s’excuser. Au retour, nous l’avons vu toujours occupé avec sa tâche. Avec sa petite cloche, il s’est mis à frapper légèrement sur son petit tapis, en prononçant des incantations, auxquelles je ne comprends rien…







Hantise