
23. Vérité
Write by Samensa
NANCY
-Nancy. Nancy. Réveille-toi.
-Umh
-Allez debout la marmotte.
Je bats des paupières pour
m’accommoder à la lumière de la pièce. Lorsque mes yeux s’y habituent et que je
me redresse, je suis en face d’Eric. Plus sexy et beau que jamais dans sa
chemise blanche et son pantalon noir.
-Ça fait plaisir de te voir de
bonne humeur ce matin. Lançai-je.
-Ah ah très drôle. Répond t-il
ironiquement.
-Mon Dieu ! Je m’écrie
lorsque je vois que l’horloge affiche plus de 8 heures. Je suis super en
retard.
- Oh calme-toi. C’est moi le
patron donc je t’accorde une permission exceptionnelle pour ce jour.
-Non, merci. Je ne suis pas
adepte de favoritisme. Il faut que je mérite mon salaire.
-Je sais. Mais je dis que je
t’accorde une permission exceptionnelle, j’ai besoin que tu m’accompagnes
quelque part.
-Ah bon ? Et où ?
-Voir ma femme… enfin, Ela.
-Euh… Tu ne trouves pas que c’est
un peu déplacé.
-J’ai juste besoin de ne pas être
seul. Et je me rends compte que toi, tu es ma bouffée de bonne humeur
actuellement. Il faut que je t’aie avec moi. Alors, tu me devras me suivre aujourd’hui.
Il le dit avec un air sérieux et
termine sa phrase avec un petit sourire en coin. Un court instant, nos regards
restent accrochés, assez pour que j’en sois fortement troublée. « Tu es
beau Eric » me dis-je intérieurement.
-Ai-je le choix ? Je souris
gênée avant de changer de sujet. Et tu me peux me dire comment je suis arrivée
dans ce lit ?
-Tu penses que tu pèses combien
de tonnes ? Me taquine-t-il. Allez apprête toi. Ajoute-t-il avant de
sortir.
Je m’enfouis dans les draps en
riant bêtement. J’ai des papillons dans le ventre. Ce sentiment de bien-être,
de plénitude que je n’avais pas ressenti depuis longtemps. Je donnerai tout
pour des réveils de ce genre avec un homme aimant et attentionné qui me
couvrira d’amour dès mon réveil.
« Tu crois vraiment qu’il en a quelque
chose à foutre de toi ? Il est juste en période difficile avec sa femme.
Quand tout sera réglé, il s’en ira. Ma pauvre fille. »
Ma conscience, cette sorcière.
Deux heures plus tard, nous arrivons
une clinique privée. Eric me demande de l’attendre dans la voiture pendant
qu’il va voir sa femme. Il ne tardera pas, m’assure-t-il. En l’attendant, je consulte
ma boite mail professionnelle. J’ai reçu assez de mails assez vindicatifs de
mon supérieur direct. Je ris en les lisant. Je n’ai jamais compris ces hommes
qui se mettaient en colère contre les conquêtes qu’ils n’avaient pu mettre dans
leur lit. Monsieur m’a fait du rentre dedans dès ma première semaine de travail
et depuis que je lui ai fait comprendre qu’il n’y avait pas d’espoir, il prend
un malin plaisir à me mettre les bâtons dans les roues. Suis-je obligée de
partager ses sentiments ?
Peu de temps après, je vois Eric revenir.
Il est accompagné d’un homme avec qui il met une certaine distance à mon grand
étonnement.
Les deux hommes se rapprochent.
Mon cœur rate un battement puis se met
battre de manière désordonnée quand je me rends compte que l’homme à sa
suite est David.
Toute la colère, les
ressentiments, la peine, la souffrance que j’avais emmagasinés jusque-là ressortent
d’un seul coup. Sortant de la voiture en claquant violemment la portière, je
franchis la distance qui nous sépare en courant aussi vite que mes pieds me le
permettent et me jette sur lui en plantant mes ongles dans son visage.
DAVID
Il est prévu que nous sortions ce
soir de l’hôpital. Mais avant Eric doit
passer la voir. Hier, Api était présente. Elle a pu rassurer sa sœur sur l’état
de santé de leur mère. Même si la visite a été de courte durée et pas vraiment
de courtoisie, cela a été une bonne chose pour Ela, elle s’est sentie soulagée
d’avoir des nouvelles de sa mère et surtout de voir un membre de sa famille.
-Bonjour.
-Bonjour. Je réponds à Eric qui
vient juste d’arriver.
-Bonjour Eric. Répond Ela.
-Je vois que tu vas mieux. Je
voulais juste savoir si tu avais besoin de quoi que ce soit. Déclare Eric.
-Elle n’a besoin de rien. Je
réponds.
-Toi de grâce, je ne t’ai rien
demandé. Merci. Lance-t-il à mon égard avant de se tourner vers Ela. Ela, tu as
besoin de quelque chose ? Je peux te laisser la maison si tu veux.
-Et où est ce que toi tu vas
rester ?
-Ça t’importe maintenant ce qui
peut m’arriver ?
-Eric, arrête.
-Répond moi juste, s’il te plait.
-Je n’ai besoin de rien.
-Très bien… Je voulais aussi
t’informer que je t’enverrai les papiers du divorce bientôt. Plus rien ne nous
lie à présent maintenant que... Il marque une pause avant de continuer. Plus
tôt, on divorcera, plus tôt je vivrai mieux. Alors on est bon ?
-Eric, je suis tellement désolée.
-Tu ne cesses de me le répéter et
moi je ne cesse de répondre que je n’en ai que faire de ta désolation. Rentre
toi bien ça dans la tête. Je n’ai plus envie de t’entendre… sur ce, au revoir.
Ela baisse honteusement la tête
en réponse à l’attitude froide d’Eric.
Je suis mon frère dehors pour lui
parler. Depuis le début de cette situation, nous n’avons pas eu l’occasion d’en
discuter. Je sais que je suis en faute dans cette histoire et que rien de ce
que je dirai ne pourra m’excuser mais il importe qu’on puisse se dire ce qu’on
a sur le cœur.
Emboitant le pas à mon frère, je
cherche la bonne formulation pour entamer la conversation.
Quand il sent que je le suis, il
accélère le pas de sorte à ne pas me laisser la latitude de lui dire quoi que
ce soit.
Soudain, des bruits de course se
font entendre alors que nous sortons juste de la clinique. Je lève la tête vers
la source de bruit lorsque je reçois comme un flash au visage. Une vive brulure
au nez. Je repousse la source de l’attaque.
Surprise : Nancy.
-Nancy ! crie mon frère.
Qu’est-ce que tu fous bon sang ?
-Espèce de salaud ! Tu n’es
qu’un chien ! salauud !
-Nancy ? Qu’est-ce que tu
fous ici ? Je demande.
-Vous vous connaissez ?
Interroge Eric apparemment très surpris.
-Qu’est-ce que je fous ici ?
Demande-t-elle, ignorant la question de mon frère. Tu ne t’attends pas à me
voir hein. Fils de pute.
-Eh ! Eh ! Tu vas te
calmer Nancy, c’est de ma mère que tu parles là. Crie mon frère. Et l’un
d’entre vous va m’expliquer ce qui se passe.
-Demande à ton frère !
Dis-lui ce qui se passe David.
-Il n’y a rien à dire.
Devant mon air impassible, elle
pète les plombs et se met à crier des injures comme une folle. Eric est obligé
de la tenir pour la calmer.
-David ? Comment peux-tu
encore te regarder dans un miroir ? Comment tu peux avoir la conscience
tranquille et vivre comme si de rien était ?
-Bon sang, vous allez me dire ce
qui se passe à la fin ? Demande mon frère encore plus embrouillé.
-Eric, je te présente le père
d’Elie. Déclare Nancy en me fixant avec défi.
Eric me regarde la bouche ouverte
d’étonnement.
-Quoi ? Arrive-t-il à dire.
Je me mets à rire.
-Tu ne te lasseras donc jamais
avec cette histoire ? Depuis le temps, tu es toujours en train de vouloir
me mettre ton bâtard sur le dos ?
-Je ne te permets pas de traiter
mon fils de bâtard, David.
-Si c’est ce qu’il est. Je ne
suis pas le père de cet enfant, rentre toi bien ça dans la tête. Va chercher le
père de ton enfant parmi les hommes avec qui tu te prostituais.
Une claque retentit sur ma joue.
Le regard de Nancy sur moi est plein de haine.
-Tout le monde sait quel genre de
fille tu es ! Tu t’es faite sautée par tous les hommes du campus et c’est
à moi que tu vas remettre les pots cassés ? Qui ne sait pas que tu étais
la pute à appeler les vendredis soir quand on s’ennuyait ? Hein ?
Au fur et à mesure que je parle,
ses yeux laissent couler des larmes signe que mes paroles la blessent. Mais, ce
n’est pas mon problème car elle sait que je dis la vérité. Je me rapproche
d’elle afin qu’elle puisse entendre mes derniers mots.
-Oui, je reconnais avoir couché
avec toi. Je mentirai si je disais que je n’y ai pas pris du plaisir.
Toutefois, je mets ma main au feu que cet enfant n’est pas le mien.
Soudain, elle se laisse tomber au
sol en se cachant le visage des mains.
-Va t-en ! Me souffle Eric
avant de l’aider doucement à se tenir debout pour la conduire à la voiture.
C’est tout énervé que je retourne
à l’intérieur. Cette fille est quand même tenace, je le reconnais. Elle se met
le doigt dans l’œil si elle pense m’avoir.
ERIC
Je ramène Nancy jusqu'à chez elle. Une fois arrivés, je l’entraine directement dans sa chambre.
-Tu peux m’expliquer
maintenant ?
-Eric, je suis désolée que tu ais
dû assister à ça. C’est juste que quand je l’ai vu, je n’ai pas pu résister.
-Tu dis qu’il est le père d’Elie,
lui dit que non… Je veux comprendre.
-Il est le père d’Elie.
-Mais encore ?
-Tu sais, après mon BAC, mes
parents m’ont envoyé étudier la finance à New York. Je devais finir mes études
et y rester pour toujours. Quand je suis arrivée, j’ai eu la malchance de
tomber dans un groupe de filles peu recommandables. Elles dealaient de la
cocaïne et vendaient leur corps pour se faire de l’argent. Je voulais paraitre
cool alors je les suivais. Pas que je dealais ou que je me prostituais. Le fait
est que je leur servais « de femme à tout faire », je faisais la
plupart de leur course, les accompagnais à leur soirée, leur rendez-vous et
autres… très vite, leur réputation a déteint sur moi et les gens me traitaient
comme elles. J’ai quitté le groupe toutefois il était difficile de me détacher
de cette image de fille aux mœurs légères. Peu de temps après j’ai rencontré
ton frère. Il m’a fait rêver, en un seul jour.
Son regard s’assombrit.
-Il travaillait sur le campus
avec certains professeurs sur des projets. On s’y rencontrait souvent sans
plus. Mais un jour, il m’a abordé en disant vouloir faire connaissance. Il a le
don de convaincre n’importe qui de faire n’importe quoi.
Elle marque une pause, souriant
amèrement.
-J’ai accepté de passer une
journée avec lui. Et le même soir, nous avons couché ensemble. Ce fut l’erreur
de ma vie. Je m’en suis rendue compte à mon réveil lorsque j’ai trouvé des
billets de banque à mon chevet. Il m’avait prise pour une prostituée. J’ai
essayé de le retrouver pour lui faire comprendre qu’il avait tout faux. C’est
comme si j’avais la poisse car il a carrément disparu. J’ai tout fait pour le retrouver
sans succès. Entre temps, je suis tombée enceinte. J’ai tout caché à ma famille
jusqu’à mon accouchement. Et lorsqu’ils l’ont su, les vivres m’ont été coupés
et j’ai dû revenir m’installer ici. J’ai failli me suicider quand j’ai lu la
déception dans le regard de mes proches.
Elle refoule ses larmes en levant
les yeux au ciel. Je lui tiens la main.
-J’ai pu avoir ses contacts quand
je suis revenue par le biais de connaissances sur le campus. Il refusait de
prendre mes appels, de répondre à mes messages. C’était comme si je n’existais
pas. Comment a-t-il pu penser que j’étais une prostituée ? Il m’a abordé
comme si j’étais une femme comme les autres. Il venait de me gâcher la vie. Je
regrette de l’avoir croisé sur mon chemin. Ma seule réussite à présent même si
les autres ne sont pas d’accord, c’est mon fils. Et non, il n’est pas un bâtard
et je le prouverai.
La voir ainsi déterminer me
fascine. Néanmoins, je la plains pour tout ce qu’elle a pu vivre jusqu’à
présent. La faute à qui ? David. Décidément, il ne fait que détruire tout
ce qu’il touche hormis Ela dont il semble être le « sauveur ».
-Nini…
-Pardon ?
-Il m’appelait Nini. En une seule
journée, il a su me mettre en confiance, il m’a fait croire que j’étais le
centre du monde. Dis-moi, qui donne autant d’attention à une prostituée ?
Pourquoi il a fait ça s’il me prenait pour une prostituée ? Il est fort,
très fort. J’ai couché avec lui le premier soir. Parfois, je me demande où j’avais
la tête.
Je m’assois près de Nancy pour la
prendre dans mes bras. Je ressens toute sa tension. Je sens qu’elle se retient
de pleurer et de piquer une crise. Elle a déjà été assez humiliée aujourd’hui
alors elle évite de se laisser aller devant moi.
-Tu peux pleurer si tu en as
envie.
-Non.
-Nancy…
-Non, je ne pleurerai pas pour
lui. Je vais me battre pour mon enfant.
-C’est ton choix et je le
respecte.
-Je suis désolée de venir en rajouter
à tes problèmes.
-Tu as été là pour moi et je le
serai aussi pour toi.
Elle se détache de moi pour me
fixer de ses grands yeux humides.
-Tu l’aimes toujours ? Ta
femme ?
Ça c’est ce qu’on appelle du coq
à l’âne ! Sa question me déroute car je ne vois pas en quoi elle importe à
cet instant précis.
-Quoi ? Pourquoi tu me
demandes ça ?
Le regard de Nancy descend
jusqu’à mes lèvres. Elle passe son bras autour de mon cou et pose ses lèvres
sur les miennes avant de m’embrasser légèrement.
-Parce que je voulais faire ça,
Eric.
Euh, pourquoi j’ai l’impression
que je ne comprends plus rien ? Qu’est ce qui est en train de se
passer ? Le temps de sortir de mes réflexions, elle me surprend par un
autre baiser moins chaste que le premier.
Nancy, qu’est-ce que tu fais ?