
CHAPITRE 3: LE CHOC
Write by L'UNIVERS DE JOLA
CHAPITRE 3 : LE CHOC.
**LUCRÈCE MEFOUMANE**
Je me suis levée tôt ce matin et je suis allée faire des
courses pour faire à tata Luce le lait caillé, la bouteille que Jérôme nous a
donné la veille est presque à la fin et je veux anticiper pour que cela ait le
temps de fermenter. Quand je finis avec ça, je prépare également le petit
déjeuner même si je ne sais pas si tata Luce aura envie de manger ça ce matin,
j’ai quand même fait quelques atangas et un peu de tubercules. Quand tout était
ok, j’ai pris mon téléphone pour essayer d’appeler Viclaire. Ça a sonné
longtemps avant qu’il ne décroche.
« Viclaire : (Voix grave) Allô ? »
« Moi : Bonjour tonton Vic. »
« Viclaire : (Après un bref silence) Bonjour
Lucrèce. »
« Moi : À entendre ta voix, je n’ose pas te
demander comment tu vas. Je veux juste te demander si tu peux m’accorder une
petite audience. »
« Viclaire : Ce sera une perte de temps car il n’y a
rien à dire sur cette histoire et franchement je n’ai pas envie d’en
parler. »
« Moi : Je te comprends mais est ce que tu
peux au moins m’accorder cette faveur ? »
« Viclaire : (Silence) »
« Moi : Je t’en prie. Même 10 minutes
seulement pardon. »
Il soupire.
« Viclaire : Je prends mon service à 11h aujourd’hui,
je partirai de la maison autour de 10h, on pourra se rencontrer entre ces deux
heures. »
« Moi : D’accord. Et ce sera
où ? »
« Viclaire : Dans un des restaurants proches de
l’hôpital, je te ferai un message pour te situer. »
« Moi : Ok. J’attends ton message et merci
d’avoir accepté de m’écouter. »
« Viclaire : Ok. »
« Moi : Bon je ne vais pas te prendre plus de temps. On
se voit plus tard. »
« Viclaire : Ok. »
Clic ! J’ai raccroché avant de soupirer. Au même moment
un message WhatsApp est rentré et c’était Loyd.
-Loyd Mbazogho : Bonjour. Je suis monté hier autour de
minuit et il se faisait suffisamment tard pour que je te fasse signe. Donne-moi
tes disponibilités pour que je passe récupérer les enfants.
-Moi : Bonjour. Les enfants ont dormi hier chez maman.
-Loyd Mbazogho : Et donc ? On avait un programme.
-Moi : Je le sais très bien. Je vais passer les
récupérer ce matin et je te ferai signe pour que l’on se croise et tu les
prennes.
-Loyd Mbazogho : Ok. J’attends ton signal mais que ce
soit avant midi. Merci.
Je n’ai pas répondu et j’ai piaffé en déposant mon téléphone
sur la table. Depuis mon retour de Lambaréné il y a un mois, nos échanges sont
très froids. D’ailleurs j’ai fait quasiment une semaine sans lui parler de
quelque façon que ce soit. Lorsqu’il m’appelait, je ne prenais pas et je
demandais à tata Luce de le rappeler ou alors de lui faire un message. C’est
parce qu’il m’avait fait un long message pour me dire que si c’est ainsi que je
voulais prendre les choses, on allait régler ça au tribunal car jusqu’à preuve
de contraire, il n’a jamais couché avec Lucia pour qu’elle devienne
l’intermédiaire entre nous par rapport aux enfants que j’ai pris sur moi de
reprendre à parler avec lui car franchement je ne voulais pas me prendre la
tête et surtout pas pour les enfants alors que nous nous étions déjà bien mis
d’accord à leurs sujets quand j’étais à lréné. Bien vrai qu’il me sort par tous
les pores mais je n’y peux rien, il est le père de mes enfants et nous avons
quasiment tout en commun. J’étais obligée de recomposer avec lui même si nos
échanges sont très froids. Depuis la dernière fois, on ne s’est pas vus car il
a fait un voyage de près d’un mois sur Makokou pour les activités et il est
remonté hier. Lorsqu’on a parlé en matinée quand il partait de là-bas, il m’a
confirmé qu’il serait sur Libreville hier soir et qu’il aimerait avoir les enfants
pour le week-end, on s’est mis d’accord sur ce fait. J’ai dit à maman hier
qu’ils allaient être avec lui quand elle m’a demandé si les enfants allaient
rester pour terminer la semaine et rentrer le dimanche soir. J’irai les
chercher tout à l’heure.
J’ai mis mon téléphone en charge et je suis allée réveiller
tata Luce qui est déjà en congé pour son mariage.
Moi : (Caressant son visage) Tata Luce ?
Lucia :
(Endormie) Hum ?
Moi : Il est déjà presque 9h, tu ne te lèves pas ?
Lucia :
(S’étirant) Déjà ? Je.
Elle s’est interrompue en mettant sa main devant sa bouche
puis elle a bondi pour se rendre à la douche afin de vomir. Je suis venue me
mettre derrière elle et j’ai attendu qu’elle finisse.
Moi : (L’aidant à se redresser) Viens t’asseoir sur le
toilette, je vais te donner ta brosse à dents.
Lucia : D’accord.
Nous nous sommes exécutées et elle s’est brossée les dents.
Moi : Tu profites aussi à prendre ta douche ou tu le
feras après ?
Lucia : Je vais
le faire maintenant.
Moi : Ok.
Elle se lève et retire sa robe de nuit ainsi que son slip. Elle
s’en va dans la cabine de douche et dès qu’elle allume le robinet sur elle,
elle crie et saute avant de sortir en courant.
Moi : (Paniquant) Qu’est-ce qui se passe ?
Lucia :
(Pleurant) Ça m’a brulée Lucrèce, l’eau là m’a brulée.
Je suis rentrée dans la cabine et j’ai touché pour voir que
l’eau en question n’était même pas vraiment tiède, ça ne peut pas brûler même
un nouveau né. J’ai réglé sur l’eau froide.
Moi : C’est bon tata Luce, j’ai arrangé.
Lucia : (Pleurant) C’est vrai ?
Moi : Oui, c’est bon. Arrête de pleurer.
Elle passe et met son bras pour tester, elle sursaute à
nouveau en se plaignant cette fois-ci de la fraîcheur de l’eau. Je la regarde et
j’ai l’impression d’avoir fait un bon en arrière de 8 ans lorsqu’elle était
tombée enceinte la première fois, elle avait presque les mêmes symptômes surtout
en matière de bain. Ça ne fait vraiment aucun doute que l’enfant à l’intérieur
de son ventre est bien celui de Bhernie.
Moi : Arrête de pleurer tata Luce, tu n’es pas obligée
de te laver ce matin.
Lucia : (Pleurant davantage) Donc je dois maintenant
sentir mauvais Lucrèce ? Wooyyooo, je veux me laver.
Moi : (Me passant la main sur le visage, dans ma tête)
On est fichue.
Je me suis tournée pour la regarder.
Moi : (Essayant d’être douce) Viens tata Luce, je vais
t’essuyer d’abord après quand l’eau sera moins froide, tu vas te laver.
Lucia : (Pleurant) Je veux me laver Lucre.
Moi : Oui, je sais et tu vas le faire.
Lucia : (Reniflant) Tu me promets ?
Moi : Oui. Viens.
Elle essuie son visage et se rapproche. Je prends un gant de
toilette dans un des tiroirs et je vais avec elle dans la cabine, je le mouille
et le presse puis je commence à l’essuyer jusqu’à ce qu’elle soit suffisamment
à l’aise pour se laver correctement et se faisant elle me mouille copieusement
m’obligeant à prendre une douche avec elle. On finit et on va se sécher puis
s’habiller avant de nous rendre au salon où je réchauffe tout étant donné que
cela avait refroidi. Par chance, elle a de l’appétit et mange sans rien laisser
tout ce qu’il y a sur la table avec grand sourire.
Moi : (Amusée) Qui aurait cru un jour que tu mangerais
autant ?
Lucia :
(Souriant) Je te dis, je suis la première surprise.
Moi : En tout cas, je sens que tu seras bien grosse à
la fin de tout ceci.
Lucia : Comme toi avec les jumeaux. Une vraie petite
baleine avec le gros nez.
Nous éclatons de rire toutes les deux puis je débarrasse et
mets les choses en machine.
Moi : (Allant la trouver sur le canapé) Ce matin je
dois passer chez maman récupérer les enfants pour les remettre à Loyd.
Lucia : Il est venu ?
Moi : Oui et nous avons parlé ensemble un peu plus tôt
par messagerie.
Lucia : Je vois.
Moi : Après ça, je vais voir tonton Vic pour essayer de
parler avec lui.
Lucia : (Triste) Je viens de tenter de le joindre mais
ça ne passe pas.
Moi : Comment ça ?
Elle prend son téléphone et lance l’appel sur le numéro de
tonton Vic et ça ne sonne même pas et coupe aussitôt. J’essaie chez moi et ça
passe.
Lucia : (Coulant des larmes) Il m’a bloquée Lucrèce.
Moi : (La prenant dans mes bras) Ne pleure pas. Je vais
lui parler tout à l’heure et je vais essayer de lui faire revenir sur sa
décision.
Lucia : (Reniflant) D’accord. (Essuyant ses larmes) Je
ne veux pas le perdre Lucrèce, je sais que j’ai merdé mais je ne veux pas
perdre Viclaire.
Moi : (Resserrant mes bras sur elle) Je sais tata, tout
va s’arranger, ne pleure pas d’accord ?
Lucia : D’accord.
On garde la position puis on se sépare et je vais prendre
mon petit sac dans lequel je mets mon téléphone, porte monnaie, carte et clés.
J’ai également fait le sac des enfants que je vais remettre à leur père pour le
week-end. Je reviens lui faire la bise en lui disant que je revenais dans 1h ou
1h et demi avant de m’en aller. J’ai mis le cap pour le fromager où toute ma
bande était présente sauf les parents qui étaient déjà au travail. Les enfants
sont déjà propres. Je papote quelques minutes avec mes gens puis je repars en
appelant Loyd au téléphone, il me dit être chez lui alors je m’y rends et lui
dis être à son portail. Non, je n’ai pas l’intention de rentrer dans sa maison.
Il est venu les récupérer là.
Loyd : (Neutre) Bonjour.
Moi : (Sans le regarder) Bonjour.
J’ai déverrouillé la portière arrière pour qu’il puisse
l’ouvrir. Ce qu’il a fait et a pris les enfants en leur parlant sur un ton
joyeux, ils étaient contents de le voir.
Moi : Leur sac est sur le siège avant.
Il a ouvert et l’a récupéré. C’est là que j’ai pu le voir.
Il avait une petite barbe avec des cheveux un peu négligés et avait l’air un
peu fatigué mais toujours aussi beau que la dernière fois que je l’ai vu et
que… je bloque là mes pensées et chasse ça de ma tête.
Loyd : Je pense qu’il serait bien qu’ils aient
également des affaires ici pour éviter à chaque fois de leur préparer un sac.
Moi : En effet. Tu pourras conserver ceux-ci et si
l’envie te vient, fais des courses avec eux.
Loyd : Ok. En tout cas, si jamais il y a un besoin, je
vais t’appeler.
Moi : Ok.
J’ai fait un coucou aux enfants et je suis partie pour
l’hôpital général où le message de Viclaire m’a trouvée en chemin pour
l’endroit où on devrait se voir. Je suis arrivée et l’ai rapidement repéré. Je
suis allée le rejoindre et après lui avoir fait la bise, je me suis assise en
face de lui. Ça se voyait tout de suite qu’il n’avait pas dormi de la nuit.
J’ai commandé un jus et on s’est regardé.
Moi : Merci déjà d’avoir bien voulu m’écouter et
d’avoir accepté de me voir.
Viclaire : (Silence)
Moi : Je tiens aussi à te présenter des excuses de la
part de Lucia pour ce qui s’est passé. Elle n’a jamais voulu te mentir et
encore moins te tromper. Cela n’a eu lieu qu’une seule fois et si elle ne te
l’a pas dit c’est parce qu’elle avait peur que tu remettes ses sentiments à ton
égard en doute ou que tu mettes fin à la relation. Je peux te jurer qu’elle
t’aime et s’en veut d’avoir été faible cette fois là.
Viclaire : (Me regardant dans les yeux) Tu connais
Ciel ?
Moi : (Déstabilisée) Hein ?
Viclaire :
‘’Ciel’’, tu connais ce prénom ou surnom ?
Moi : (Silence)
Viclaire : Je te le demande Lucrèce, est-ce que tu
connais Ciel ?
Moi : Oui.
Viclaire : Et c’est qui ?
Moi : C’est Bhernie.
Viclaire : Tu sais pourquoi je te demande ça ?
Moi : Non.
Viclaire : Ce petit nom est celui par lequel Lucia
s’est mis à m’appeler inconsciemment depuis un mois.
Moi : (Silence)
Viclaire : Depuis un peu plus d’1 mois, Lucia a changé.
Elle est absente, elle m’esquive, elle sursaute quand je lui parle ou que je la
touche, elle se fige parfois et plein d’autres choses. Je pensais que c’était
le stress lié au mariage comme elle me l’avait dit jusqu’à ce que la nouvelle
tombe hier. Si au début j’avais quelques doutes, aujourd’hui je sais que c’est
la femme de quelqu’un d’autre et malgré tout l’amour que je ressens pour elle
et qu’elle a pour moi, je ne suis pas assez fou pour me heurter contre
l’évidence. Il a fallu à ce type 1 week-end pour balancer 2 années par la
fenêtre alors que rien ne les liait. Que penses-tu qu’il se passera maintenant
qu’elle porte son enfant dans son ventre ?
Moi : (Silence)
Viclaire : Lucia est ta tante et je sais que tu l’aimes
beaucoup, sinon tu ne serais pas là pour essayer de plaider sa cause. Mais
avant tout nous sommes d’abord amis tous les deux et au-delà, nous sommes
frères dans la foi c’est pourquoi je veux te poser cette question et je veux
que tu me répondes honnêtement. Sachant ces choses, tu me conseillerais de
l’épouser ?
Moi : (Silence)
Viclaire : Lucrèce ?
Moi : (Fermant les yeux) Non.
Viclaire : Je te remercie pour ton honnêteté. J’aime
Lucia Lucrèce, et tu n’as pas idée de la douleur que je ressens présentement à
l’intérieur de moi. Je sais également que Lucia a des sentiments pour moi mais
clairement son histoire avec Ciel ou Bhernie n’est pas terminée et m’engager
dans une telle histoire serait comme me suicider car le mal que je ressens
présentement ne cessera de s’amplifier. Les gens vont parler, les dépenses ont
été engagées, nos familles et nos amis se sont mobilisés et c’est vraiment
énorme mais tout cela ne vaudra plus rien lorsque nous serons bloqués dans un
mariage qui deviendra pour nous un enfer. J’ai donné ma vie au Seigneur Lucrèce
et je lui ai demandé de retirer de ma vie tout ce qui peut me faire perdre mon
salut, si ce mariage m’est retiré, quand bien même cela me fait mal, je
l’accepte. C’est pourquoi la décision est prise. Demain soir je réunirai toute
ma famille pour leur dire que ce mariage est annulé. Je te contacterai pour te
remettre ses affaires qui ont déjà été aménagées à la maison et tu lui diras
que si jamais elle retrouve la bague de fiançailles que je lui avais donnée,
qu’elle me la renvoie.
Moi : Cette bague est sur son doigt.
Il esquisse un faible sourire.
Viclaire : Transmets-lui simplement ce message, elle
comprendra.
Moi : (Silence)
Viclaire : Pour le reste, dis-lui que je ne lui en veux
pas mais que je préfère qu’elle reste loin de mon environnement pour le moment.
Moi : J’ai compris.
Viclaire : (Regardant sa montre) Je vais y aller.
Moi : D’accord et je suis vraiment désolée.
Viclaire : Je sais, moi aussi je le suis. (Se levant) Je
règle la note.
Moi : D’accord.
Je me suis levée pour lui faire un câlin, il est allé réglé
la note et est parti. Je me suis rassise et j’ai repensé à cette conversation.
Ma boisson est arrivée, je l’ai vidée d’une traite et je suis rentrée à la
maison où j’ai trouvé tata Luce en train de regarder la télévision. Dès que je
suis arrivée à son niveau, elle s’est redressée pour me regarder et je me suis
assise à ses côtés.
Lucia : (Anxieuse) Qu’est-ce qu’il a dit ?
Moi : Qu’il ne t’en veut pas et te souhaite tout le
meilleur pour la suite.
Elle a mis ses deux mains sur le visage et s’est mise à
pleurer. C’est là que j’ai regardé son doigt et j’ai vu avec grande surprise
qu’elle porte la bague de Bhernie et non celle de Viclaire. J’ai écarquillé les
yeux.
Moi : (Prenant sa main) C’est depuis quand ça ?
Lucia : (Me regardant confuse, les larmes perlant sur
ses joues) Hein ?
Moi : (Présentant son doigt devant son visage) C’est
depuis quand que tu as remis cette chose sur ton doigt ?
Elle la regarde et me regarde sans me répondre.
Moi : Nous sommes en plein délire là ce n’est pas
possible…