Chapitre 2 : Que se passe t-il ?

Ecrit par Fleurie

Quelque part dans Cotonou 



°°° Ariana °°°



Il fait un soleil très accablant cet après midi. Au lieu d’être dans mon bureau à profiter de la climatisation, me voici sous ce soleil ardent à superviser, tchip.



Moi ( descendant de ma voiture ) : Par ici, faites attention il y a des objets fragiles. Ça coûte une fortune.


Lui : C’est compris madame.



Sa tête comme c’est compris madame. Je suis tellement en boule depuis ce matin,  surtout que je me suis levée du mauvais pied, pffffff. 



Moi ( au second monsieur ) : Vous ( le désignant de l’index ) suivez moi.



Il m’a suivi sans broncher, avec un grand carton qu’il tient. Il vaut mieux faire ses choses soi-même, plutôt que de les confier à autrui.



Nous sommes en plein emménagement. Mon mari et moi sommes obligés de trouver une villa à Cotonou et venir nous y installer. Nous avons quitté Porto-Novo, vu que nous aurons à  faire le trajet Porto-Novo Cotonou chaque jour, franchement ça épuise. Il a un hôtel en construction à Cotonou, dont les travaux seront bientôt finalisés. En attendant sa fin, nous serons entrain de nous familiariser avec les lieux.



J’ai délicatement posé  le carton que je tenais sur le tapis de couleur marron. Dès mon entrée, j’étais  émerveillée par la beauté des lieux. La villa est splendide. Un grand jardin bien entretenu avec la pelouse soigneusement taillée lui donne un aspect très beau. Des chaises à bascule se trouvent sur la terrasse. Juste ce qu’il nous faut. Les dimensions de cette villa sont juste comme je l’avais souhaité. J’adore la hauteur des murs, et surtout la grandeur des portails. Il y a de belles fleures un peu partout, de différentes espèces et de couleur, ce qui montre déjà que l’atmosphère sera très joviale et plaisante. Je connais une personne qui jubilerait de joie rien qu’en voyant cette piscine. Waouh, il va falloir penser au gardien et au personnel. Je verrai tous ces détails plus tard. Pour l’instant je dois finir de ranger les affaires. 



[ … ] 



Je me suis laissée affaler sur le siège de la voiture. Je suis épuisée et je ressens une petite migraine. Lentement je me suis mise à masser mon front pour soulager la douleur. Mais ça été en vain. J’ai ouvert mon sac à mains, pour en faire sortir un cachet d’aspirine. Je prend la bouteille d’eau qui est sur le siège côté chauffeur, et j’ai bu le contenu d’un trait.



[ Sonnerie téléphone ]




Un large sourire s’est affiché sur mon visage lorsque j’ai jeté un coup d’œil sur l’écran.



Moi ( massant mon front en m’adossant ) : Allô chéri 


Lui : Bonsoir Ari, comment évolue l’emménagement ?


Moi : Tu n’imagines même pas combien c’est fatiguant. Je dis c’est comment tu ne demandes pas de mes nouvelles, juste l’emménagement ?


Lui ( pouffant de rire à l’autre bout ) : Qui t’a encore énervé chérie pour que tu me fasses le bruit comme ça. Je t’aime aussi.


Moi : Mouais c’est ça  ( regardant à l’intérieur ) : Ça avance, nous allons bientôt finir. Je reconnais  que les travailleurs sont très dynamiques et efficaces. Tu as fait un bon choix les concernant.


Voix ( à l’autre bout du fil ) : Excusez moi monsieur, mais vous avez de la visite.


Lui : Merci Kate. ( À moi ), chérie le boulot m’appelle. A ce soir, ciao. Take care, kissss.


Moi ( soupirant ) : You too sweetie, Okay.



Clic.



J’ai attendu une quinzaine de minutes, avant de descendre de la voiture.



Moi c’est Ariana HOUNNOU, je suis béninoise cent pour cent. Je suis originaire de Porto-Novo. J’ai une garderie que je gère à Cotonou. Je vous épargne mon âge,  ( lol ), je suis déjà mariée et mère d’un beau garçon de 7 ans. C’est une nouvelle vie qui commence pour ma petite famille et moi dans cette belle ville de Cotonou. Vous aimez trop les détails, je vais m’occuper de mon emménagement. ( Clin d’œil ).



°°° Enora °°°



Je me suis appuyée sur son épaule et il m’a aidé à me lever.  Il nous a conduit à l’intérieur.  Je suis restée assise sur le grand lit, le regard dans le vide pendant je ne sais combien de minutes. Sa voix m’a tirée de mes pensées.



Lui : J’ai appelé ton père, et il m’a rassuré que ta mère est à présent hors de danger. Elle a eu un accident.


Moi ( inquiète ) : Elle va bien ?


Lui : Elle s’est fait mal au cou et a la jambe droite plâtrée.


Moi ( d’une voix basse ) : Je veux rentrer babe. Je dois la voir.



Il a pris son ordinateur portatif, en s’installant dans le canapé près de la fenêtre. Je pouvais également lire une angoisse sur son visage, malgré qu’il essaie de le cacher. Un silence pesait dans la pièce.  Je n’ai su quoi dire, jusqu’au moment où il s’est enfin décidé à le briser.



Lui ( me touchant l’épaule ) : Enora, j’ai réussi à nous acheter les billets. Nous partons dans une demie heure, pour le prochain vol pour le Bénin.


Moi ( regardant devant moi ) : …


Lui : Ne te mets pas dans cet état,  tout ira bien. Hum.


Moi : Je suis désolée qu’on rentre sitôt.


Lui ( me prenant le menton ) : Ce n’est pas grave. Il y a plus urgent, et c’est la santé de ta mère. Nous avons toujours le temps de revenir ou d’aller n’importe où. Pour l’instant son état importe plus. ( M’aidant à me lever ), vas te changer, je vais régler les comptes à la réception. Je reviens.



Il a posé un baiser sur ma tempe avant de de se lever et de sortir de la pièce.  Je l’ai suivi du regard jusqu’à ce qu’il disparaisse de mon champ de vision. Ensuite je me suis changée. 



[ … ] 



Notre avion vient d’atterrir sur le sol béninois. Nous avons dépassé le contrôle. Je suis debout en attendant que Ronan aille récupérer nos bagages. Je l’attendais avec impatience lorsque j’ai ressenti une envie pressante d’aller me soulager aux toilettes. En voulant me retourner, j’ai buté contre un torse, et j’ai été parcouru de frissons d’un coup. Mais que m’arrive t-il ? Sûrement que c’est l’effet du stress, me suis-je répété intérieurement, avant de lui faire face.



Lui ( ramassant ses papiers éparpillés sur le carreau ) : Je suis vraiment désolé madame, excusez moi. Je suis tellement pressé que je n’ai pas fait attention. 


Moi  ( l’aidant ) : Ce n’est pas votre faute. Je m’excuse également j’étais perdue dans mes pensées.



[ Les passagers à destination du Nigeria sont priés de se rendre dans la salle d’embarquement ]



Lui ( ajustant ses lunettes ) : Je dois y aller. Bonne journée . 


Moi : Pareillement.


Ronan ( derrière moi ) : On peut y aller.



Mon envie peut attendre. Il a pris ma main dans la sienne, et il a poussé le chariot à l’aide de la seconde. Ce geste a eu le don de me détendre. 



Dehors il y avait sa voiture qui était déjà garée sur le parking.  Il a mis nos bagages à l’arrière de la voiture. Nous nous sommes installés et le chauffeur a démarré. 



Je ne l’ai pas attendu.  Je me suis immédiatement ruée à l’intérieur lorsque le chauffeur a coupé le contact. En passant par le salon j’ai été interrompue par Laure, l’une de nos domestiques.



Laure : Bonne arrivée ma fille.


Moi : Merci Laure, où  est ma mère ? 


Laure : Toujours à l’hôpital ma fille.


Moi : Je me change rapidement et j’y vais.


Laure : Tu aurais pu rester et profiter de votre lune de miel. Ta présence n’était pas si nécessaire. ( L’air pensive ) je me demande bien qui a bien pu te mettre au courant.


Voix ( derrière nous ) : Moi, qu’il y a-t-il de mal à ça ?  ( À Laure ) retourne aux fourneaux et occupe toi de tes affaires, tchip.



C’est la voix d’Ayanda ma petite sœur, elle ne contrôle jamais sa  longue tronche qui lui sert de bouche. Il faut qu’elle se mêle de tout. Elle doit toujours marquer sa présence. 



Moi : Tu n’es pas obligée d’être si aggressive avec elle. Elle est très âgée et peut être ta mère, où est passé le respect chez toi ? Tu l’as vendu aux chiens ?


Ayanda  ( m’ignorant royalement ) : …


Moi ( ton dur ) : Présente à Laure tes excuses.


Ayanda ( croisant les bras ) : Les domestiques ne peuvent être mélangés à la famille. En plus elle est payée comme une employée, sur ce je la traiterai comme telle, tchip.


Moi ( À Laure ) : Excuse son comportement, elle est immature. 


Ayanda : Tu lui permets de te prendre comme sa fille. Qu’elle aille faire ses enfants, après avoir mangé ceux des gens, elle est incapable de concevoir. Vieille peau.


Moi  ( dépassée ) : Non mais où te crois tu à la fin ? Je ne tolérerai plus une seule injure à son égard. Vas dans ta chambre. 


Ayanda : Si ça ne tenait qu’à moi, il y a longtemps que tu aurais quitté cette maison. Pffffff.


Moi ( gênée ) : Si tu veux recevoir ma main sur ta joue, ouvre encore ta sale gueule. 



Elle nous a toutes deux regardé à la dérobée. La jeunesse de nos jours, elle n’a plus le respect. Tout est la faute de mom. C’est elle qui tolère toutes ses caprices.


Moi : Je suis navrée pour son comportement puéril Laure.



Laure ( souriante ) : J’y suis habituée ma fille, ne prête pas attention.  Si tu veux bien m’excuser. Mes marmites me réclament.



Je lui ai souri, et elle a tourné les talons. Je la respecte beaucoup. C’est elle qui s’est occupée de nous lorsque nous étions toutes petites. Laure est une jeune et belle dame de la cinquantaine qui ne fait même pas son âge physiquement. Cela fait des années qu’elle est au service de ma famille. Elle est la meilleure, et fait bien son boulot et nous cuisine de délicieux plats.  Elle m’a toujours traité comme sa propre fille, contrairement à ma sœur qui est toujours désagréable envers sa personne. Je me suis retournée et Ayanda avait déjà disparue. Tant mieux pour elle, je réglerai son compte plus tard. J’ai rapidement dévalé les escaliers pour me diriger dans la chambre des parents.



Je me suis rapidement changée, et je suis descendue. J’ai trouvé Ronan adossé contre la voiture.



Moi : S’il te plaît conduis moi à l’hôpital, ma mère est là bas.


Lui : Je vais te déposer et revenir. J’ai une urgence familiale , c’est ma tante. Je promets revenir chérie. 


Moi : Okay.



Il a garé une quinzaine de minutes plus tard, devant le CNHU de Cotonou. 



J’ai ouvert la porte et je suis restée debout pendant un moment.  Lentement je me suis approchée du lit. Ma mère est allongée et endormie. Elle a un collier au cou, et la jambe plâtrée. Elle est toujours  belle, même dans cet état. J’ai tiré la chaise pour m’asseoir à ses côtés. J’ai pris sa main,  et je l’ai tendrement caressée. Elle n’a pas bougée, ce qui prouve qu’elle dort à poings fermés. Je l’ai contemplée un instant avant de poser ma tête sur le bord du lit. Je n’ai pas su à quel moment le sommeil m’a emporté.



°°° Jean-Etienne °°°



Plus de trente minutes déjà que je fais des vas et viens dans mon bureau, sans prendre la peine de m’arrêter. Je ne cesse de réfléchir à comment faire pour expliquer mon acte à mon épouse. Elle est si fragile en ce moment. Elle n’aurait jamais du écouter cette conversation. Qu’est ce qui m’a poussé à prendre cet appel chez moi ?



Sur le coup de la colère,  j’ai nerveusement cogné mon front contre le mur.  Que je suis stupide. Que faire ? 



Après quelques minutes à tourner en rond sans but, je me suis enfin décidé à sortir de la pièce. J’ai envie de prendre l’air pour me calmer. J’ai pris les clés de ma voiture et mon porte feuille, avant de sortir de la maison. Sur le chemin, je me suis décidé à lui rendre plutôt visite. Donc je me suis rendu à l’hôpital. 



[ … ]



Enora et sa mère dorment profondément. Je vois qu’elle est rentrée de son voyage sans même finir son séjour.  Et pourtant j’avais interdit à tout le monde de la notifier. On ne peut avoir confiance en personne de nos jours, pffffff. Il n’y a qu’Ayanda pour faire un truc pareil. Elle va m’entendre celle là.


Je me suis retourné en marchant à pas de loups pour les laisser se reposer.



Enora ( s’étirant ) : Papounet que fais tu là ?

 

Moi ( sourire jaune ) : Euh je suis venu voir comment elle va. Mais elle dort toujours. Tu n’aurais pas dû venir princesse. J’ai été clair avec ton mari au téléphone.


Enora : Tu sais très bien que je tiens énormément à vous deux. Je ne pourrais pas rester loin et me faire du mauvais sang. Je devais rentrer. C’était primordial.


Moi : Je comprends.



Elle m’a longuement fixé sans rien dire. J’ai peur qu’elle me pose des questions sur l’accident de sa mère. J’ai ouvert la porte pour sortir, mais elle m’a arrêté dans mon élan. 



Enora : Papounet dis que s’est il réellement passé ? 



Que vous ai-je dit, je la connais comme la paume de mes mains. Elle est juste comme sa mère. J’ai soupiré avant de tourner et lui faire face.



Moi ( gardant mon calme ) : Elle a trébuché lorsqu’elle descendait les escaliers dans la précipitation. C’est la raison pour laquelle elle est dans cet état. Le docteur a dit que ce n’est rien de grave. Elle a eu une fracture simple sans déplacement de l'extrémité supérieure de la jambe droite. Ce qui a nécessité la pose d'un plâtre. Et dans sa chute elle s’est fait mal au cou. C’est pourquoi on lui a mis un collier au cou pour prévenir d’éventuelles lésions cervicales.


Enora : Mais maman a toujours été prudente. Je me demande bien ce qui s’est passé pour qu’elle se retrouve à courir dans les escaliers. Elle a du être choquée par quelque chose ou elle fuyait quelqu’un. Elle…


Moi  ( la coupant ) : Ne cherche pas à connaître les détails.  De toute façon elle ira mieux.


Enora : …



Je sais qu’elle est surprise par ma phrase. C’est la première fois que je lui adresse la parole de cette manière. Enora est une fille très intelligente. Elle ne se reposera pas tant qu’elle ne saura pas la vérité. Pourvu que Léontine ne lui dise rien, sinon je serai foutu. 



Moi : Oublies chérie, tu t’inquiètes inutilement.



Léontine s’est mise à tousser, ce qui a attiré notre attention à tous les deux. Elle nous regarde à tour de rôle sans piper mots. Je peux lire la peur et la déception sur son visage. 



Léontine ( voix faible ) : J’ai soif.


Enora s’est précipitée de remplir le verre d’eau à côté, avant de l’aider à boire. Elle a vidé d’un coup le verre. 



Enora : Maman tu vas mieux ? 



Elle n’a pas pris la peine de lui répondre. Elle a essayé de se lever mais en vain. Elle est encore sans doute faible. Je me suis rapproché d’elle pour l’aider, mais elle m’a arrêté en me faisant un geste de sa main. Elle a tellement crié que j’ai eu mal aux tympans.



Léontine : Stop, ne t’approche surtout pas de moi Étienne.



Sa fille l’a aidé à  s’adosser.  Elle continue de me regarder de travers. Son geste n’a pas échappé à Enora qui me lance un regard interrogateur.



Enora : Papounet on dirait que maman te reproche quelque chose. Que lui as-tu fait ? 



La question que je redoutais le plus vient de m’être posé. Je n’ai plus d’échappatoire. J’ai baissé la tête en fixant le mur. Je n’ai qu’une seule envie en ce moment. Celle de disparaître de la surface de la terre.



Mariée au diable