Chapitre 6

Write by Josephine54

Arthur J'avais passé l'après-midi à m'entretenir avec mes employés. Il était déjà 18 h et je sentais la migraine poindre. Je suis arrivé hier soir et je n'avais vraiment pas eu le temps de me reposer. J'avais rejoint cet appartement meublé que Rodolphe m'avait déniché après minuit. J'avais passé une nuit extrêmement agitée et je m'étais réveillé à 3 h, sans réussir à me rendormir. Après avoir rabroué Beverly, cette dernière m'avait adressé un mail pour me communiquer le programme des passages de ses collègues. Cela s'étendait sur deux jours, et Beverly passerait la dernière, comme demandé, demain à 16 h. Je jetai un bref coup d'œil à la liste et me rendis compte, avec soulagement, que le suivant était le dernier de la journée. Toc, toc, toc... - Entrez, criai-je. La porte s'ouvrit sur Éveline. Elle me fit un large sourire en entrant. Je pris une expression neutre et autoritaire au visage. J'étais habitué à ce genre de comportement de la part des filles. Je n'avais pas l'intention de me laisser distraire dans ma mission et surtout, une relation avait une employée était la dernière chose que je voulais. - Bonjour, mademoiselle... Éveline Enoh, dis-je en regardant son CV qui se trouvait actuellement devant moi, histoire de lui faire comprendre que j'avais eu besoin de ce document pour me rappeler son nom. Elle sembla accuser le coup. - Euh... Bonjour, monsieur Mvogo, répondit Éveline, visiblement déstabilisée. - J'ai certes ici toutes les informations professionnelles vous concernant, mais j'aimerais que vous me parliez de votre parcours, de vos études jusqu'à votre entrée dans le monde du travail. Éveline commença un long discours où elle m'énonça son parcours. Je l'avais fait dans le but de détecter ceux qui avaient gonflé leurs CV. Il n'était pas toujours évident de se rappeler avec précision ce que l'on invente dans un CV. D'ailleurs, durant les premiers entretiens, j'avais réussi à détecter certains candidats qui avaient menti, mais rien de bien méchant au final. - Bien, mademoiselle. Je vous remercie déjà pour votre travail et votre implication, et je compte sur vous pour continuer dans cette dynamique. - Merci, monsieur, répondit-elle en se levant. On échangea une poignée de mains et elle sortit de mon bureau. Je me laissai tomber sur ma chaise avec lassitude. Replonger dans mes souvenirs ne m'avait pas aidé. Je me saisis de l'interphone et appelai le bureau de Beverly. J'appelai ensuite le chauffeur de taxi qui m’avait amené ce matin. Il m'informa qu'il passerait me chercher dans vingt minutes. - Madame Kamdem, dis-je d'une voix appuyée. - Euh... oui, monsieur, répondit-elle d'une voix tremblante. - J'en ai terminé pour aujourd'hui. Je vais y aller. En cas de problème, vous pourrez me joindre au 06xxxxx. - Bien monsieur. Après un quart d'heure, je me saisis de ma mallette et me dirigeai vers la porte. Je l'ouvris au même moment que Beverly sortait de son bureau. Nos regards se croisèrent et se perdirent l'un dans l'autre un long moment. Pourquoi il avait fallu qu'elle soit encore plus belle quand dans mon souvenir ? Je me mis à fixer ses lèvres et des souvenirs pas très catholiques m'affluèrent à l'esprit. Je sentis de l'irritation me gagner. Roman écrit par Justine Laure (page Facebook Plume de Justine Laure) - Avez-vous fini ? demandai-je d'une voix intransigeante, jetant un bref coup d’œil à ma montre. - Euh... oui, monsieur, répondit-elle. Il est déjà 18 h. Je n'ajoutai rien et me dirigeai vers la sortie. J'entendis ses pas dans mon dos. Je montai dans le taxi et il se mit immédiatement en marche. Les ruelles de Yaoundé défilaient devant mes yeux tandis que je me laissais gagner une fois de plus par la nostalgie, cette fois mêlée à de la tristesse. Je me revoyais courir comme un fou, m'éloignant à toute vitesse de Beverly, ce fameux matin. Je n'aurais jamais cru cela possible. J'étais rentré dans ma chambre et m'étais jeté sur mon lit, le cœur en miettes. Mon téléphone s'était immédiatement mis à sonner. Je m'étais brusquement redressé, espérant que l'appel provenait d'elle, qu'elle s'excusait pour sa cruauté, qu'elle avait changé d'avis. J'avais alors vu le nom de Gérard apparaitre à l’écran. Cela faisait près d'une semaine qu'il m'appelait tous les jours, je lui racontais plein de conneries sur l'évolution de mon dossier, mais là, je n'étais pas en mesure de mentir. Il aurait très vite compris que quelque chose n'allait pas. Je m'étais recouché sur mon lit et c'est ainsi que j'avais passé la semaine. À broyer du noir, sans m'alimenter et m'hydrater convenablement. Ma mère aussi était rentrée dans la danse. Gérard lui avait certainement fait savoir que j'étais injoignable. N'obtenant pas de réponse de ma part, elle m'avait donc envoyé un message pour m'informer qu'elle prendrait la route de Yaoundé le lendemain matin. J'avais alors décidé de prendre les choses en main. Aller en France ? Ce n'était plus possible. J'avais utilisé une partie de l'argent prévu à cet effet pour organiser notre voyage au Gabon, et une autre partie avait servi à réserver notre appartement là-bas. Et sincèrement, je n'avais pas le courage de me tenir face à Gérard, après tous les sacrifices qu'il avait faits, la confiance aveugle qu'il m'avait témoignée malgré mon passé tumultueux, et lui dire que, pour une fille, j'avais décidé de les trahir et de ruiner mon avenir. Je me sentais plus idiot que jamais. J'avais actuellement deux millions sur moi. Je les avais retirés de la banque depuis une semaine, le matin du voyage manqué. J'y avais ajouté mes économies. J'avais exactement 2.700.000 francs. J'avais alors envoyé un message à maman pour lui éviter un voyage inutile. " Bonjour maa, je vais bien. Désolé de ne pas répondre à vos messages et appels, j'avais de petits soucis, mais c'est réglé maintenant." Maman m'avait immédiatement rappelé. - Mvogo, qu'y a-t-il encore ? Quel genre de petits soucis ? Tu as recommencé ? Mon passé, mon sombre passé, toujours lui, à intervenir partout. - Maman, ce n'est pas ce que tu crois. - Je ne viens entendre, attends-moi seulement demain matin ! J'avais tout fait pour l'en dissuader, mais rien à faire. Vous savez, ma têtutesse, je la tenais d'elle. J'avais alors appelé mon ami au Gabon. - Mec, je vais prendre le bus ce soir, je te fais signe dès que je suis arrivé. J'avais alors rangé mes derniers effets. Je m'étais saisi de ma valise et mon regard s'était posé sur celle de Beverly, qu'en faire ? J'avais donc décidé de la jeter près d'une poubelle. Je m'étais ensuite rendu dans une agence de voyage et avais payé mon ticket pour le Gabon. C'était mieux ainsi, je n'étais pas en mesure d'affronter maman, ni Gérard, pas maintenant en tout cas. J'avais voyagé toute la nuit et étais arrivé à Libreville en début d'après-midi. Mon ami Stéphane était venu me chercher à la gare routière. - Yo mec, c'est how ? (comment vas-tu en camfranglais, langue courant utilisé au Cameroun, dérivée du français et l'anglais). La petite n'est pas came ? ( ta petite-amie n'est pas venue ?) Je l'avais regardé d'un air las. - C'est une longue histoire frère, avais-je répondu d'une voix fatiguée. Mon pote m'avait fixé un long moment dans les yeux et avait secoué la tête. - Ah, les femmes. Nous nous étions rendus chez lui et je lui avais expliqué que Beverly ne viendrait plus, sans rentrer dans les détails. C'était encore trop douloureux pour moi. - Alors, cela ne te sert à rien de louer tout un appartement si tu dois y vivre seul, s'était exclamé mon ami. - C'est justement ce que je pensais. Une simple chambre ferait l'affaire. - En effet. Tu sais, la chambre que tu devais occuper ici avec ta copine est libre. Tu peux rester et nous partagerons le loyer et les charges ensemble. Roman écrit par Justine Laure (page Facebook Plume de Justine Laure) - Ça me va, mais que faisons-nous de l'argent que nous avons déjà avancé de l'autre côté ? avais-je demandé. - Nous allons essayer de le rencontrer. J'espère qu'il sera compréhensif. Nous nous étions donc rendus chez le propriétaire et lui avions exposé le problème. Il avait remboursé la moitié de l'argent que j'avais déjà avancé, donc la somme d'un million. C'était mieux que rien. - Mec, il faut que je trouve quelque chose à faire. N'importe quoi. J'ai travaillé dans le service de gardiennage pendant de longues années à Yaoundé. Ma priorité était de rembourser mon frère. Je me sentais tellement mal d'avoir trahi sa confiance, après l'avoir si durement gagnée. Un mois plus tard, j'avais trouvé du travail dans une imprimerie de la place. J'y travaillais de 7 h à 17 h et certaines nuits, je faisais du gardiennage dans de différents endroits : supermarchés, pharmacies, maison privées, boite de nuit, etc... Je gagnais près de 300.000 francs le mois et quand je faisais des heures supplémentaires, j'arrivais parfois à près de 400.000 francs. Mon loyer et mes charges mensuelles s'élevaient à 150.000 francs. Je dormais peu de nuits et vivais de privations. Après près de huit mois au Gabon, j'avais déjà réuni les sous de Gérard. J'avais les cinq millions qu'il m'avait envoyés pour lancer ma procédure. Lui remettre cet argent lui montrerait ma bonne foi, mais je ne savais pas si cela était en mesure de restaurer ce rapport qui avait été tellement de fois mis à dure épreuve. Après avoir parlé à ma maman ce fameux jour, la veille de mon départ, je n'avais plus donné de signe de vie à ma famille. Après six mois au Gabon, j'avais décidé de reprendre le contact. J'avais donc appelé maman avec mon nouveau contact. - Mvogo, hé, Mvogo, hé, qu'ai-je fait à Dieu pour qu'il me donne un fils comme toi ? s'était écriée maman en larmes. Donc tu es vivant ? Mvogo, tu as décidé de m'entraîner dans la tombe, n'est-ce pas ? Mvogo, ho, Mvogo... J'étais resté silencieux, mon téléphone à l'oreille, à écouter les lamentations sans fin de maman, ses pleurs et sa voix empreinte de tristesse et de désillusion. Une larme silencieuse avait coulé le long de ma joue. Je m'étais promis à cet instant de ne plus jamais la décevoir, qu'elle ne pleurera plus jamais à cause de moi. - C'est quel numéro ici, Mvogo, avait demandé maman après s'être calmée. - C'est mon nouveau numéro maman. Je suis au Gabon. - Au Gabon, Mvogo ? Au Gabon ? Comment... Et c'était reparti pour des lamentations sans fin. Après de longues minutes, maman s'était finalement tue. - Pardonne-moi maman, pardonne-moi, avais-je lancé, en sanglotant. Maman avait repris ses pleurs à cet instant. Nous avions finalement parlé et je l'ai rassurée que j'allais bien. Je m'étais installé au Gabon il y a six mois et tout se passait bien. - Mon fils, que puis-je dire d'autre ? Que le Seigneur te guide et t'accompagne, mais, s'il te plaît, ne me laisse plus jamais sans nouvelles de toi. - Promis, maman. - Il faut que tu parles aussi à ton frère, Arthur. - Je le sais maman. - Qu'as-tu fait de son argent ? Pourquoi chosir d'aller au Gabon. - Maman, j'ai son argent. Je compte le rembourser d'ici peu. - C'est bien. Avec mes économies, il me restait près de 300.000 francs pour avoir l'intégralité de l'argent de Gérard. Après avoir raccroché avec maman, j'avais pris mon courage à deux mains et l'avais appelé. - Allô, avais-je entendu à l'autre cout de la ligne. J'étais longtemps resté avec le téléphone en main, la gorge nouée. Je savais qu'avec lui, ce ne serait pas aussi facile qu'avec maman. Il avait filament raccroché après de secondes d'attente. Je l'avais immédiatement rappelé. - Allô, grand-frère, c'est moi. Bip, bip, bip... il venait de raccrocher. Je me laissai lourdement tomber sur mon lit, en me prenant la tête dans les mains. Deux mois plus, tard, j'avais finalement réuni tout son argent, c'est-à-dire, cinq millions de francs. Je m'étais rendu auprès d'une agence de transfert et avait effectué le virement. Ils m'avaient remis un reçu contenant le code pour le retrait. J'avais ensuite envoyé la photo à Gérard, accompagnée de ce message : "Grand-frère, je sais que je t'ai énormément déçu par le passé, mais tu n'as pas hésité une seule seconde à me donner à nouveau ta confiance. Je suis vraiment désolé. Je tenais à te rembourser cet argent. Je veux que tu saches que je n'ai jamais agi de mauvaise foi, j'ai simplement été stupide et aveugle." Il avait presque immédiatement lu le message et ne m'avais pas répondu. J'avais alors posé le téléphone à mon chevet de lit et m'étais couché. J'avais été réveillé en sursaut quelques heures plus tard par la sonnerie de mon téléphone. J'avais vu avec stupéfaction le nom de Gérard apparaître à l'écran. - Arthur, j'ai reçu les sous. Je dois avouer que je n'y croyais pas. Je reviens du bureau de retrait, avait lancé Gérard d'une voix choquée. Que s'est-il passé ? - Grand frère, j'ai été bête et idiot. Je me suis laissé guider par l’amour, au point de perdre complètement la raison. - Que s'est-il passé ? - Avec Beverly, j'avais prévu.... Je lui avais tout raconté dans les moindres détails. La peur de laisser Beverly au Cameroun et de perdre son amour. La décision de nous installer au Gabon ensemble. La trahison de Beverly et mon installation au Gabon. - Tu as été trop idiot, frérot, s'était exclamé Gérard. Mon frère, en amour, on maintient toujours un minimum de raison. C'est fou ce que tu me racontes ! Nous avions parlé pendant de longues heures. Je lui avais raconté ma vie au Gabon.


Manipulation sentime...