
Chapitre 8
Write by Josephine54
Beverly
Je refermai la porte du bureau d'Arthur... Arthur ? Cet homme froid et calculateur n'avait absolument rien de l'Arthur que j'avais connu dans le passé. J'avais l'impression que chaque geste, chaque action était calculée et chaque mot, pesé.
J'avais passé une nuit agitée en pensant à notre entretien de cet après-midi. Tous les scénarios possibles et imaginables avaient germé dans mon esprit.
Je me demandais bien jusqu'à quand avait-il l'intention de me méconnaitre, même si, pour moi, c'était mieux ainsi.
J'étais rentrée à la maison l'esprit en émoi. Étais-je en mesure de travailler à ses côtés ? Les sentiments forts que j'avais éprouvés pour lui par le passé ne referaient-ils pas surface ?
Je me rendis ce matin au bureau, l'esprit particulièrement tourmenté. Cela faisait exactement un mois que je travaillais comme secrétaire d'Arthur, mais j'avais l'impression que je travaillais avec lui depuis un an. Je ne comprenais pas ses réelles intentions, mais il était évident qu'il avait quelque chose derrière la tête.
J'entrai dans mon bureau et pris ma tablette avant de me rendre d'un pas lent vers celui d'Arthur. Je sentais les battements de mon cœur tonner dans ma poitrine, j'avais l'impression qu'il résonnait dans tout le couloir.
Je pris mon souffle un long moment et me décidai à ouvrir la porte de son bureau après avoir toqué.
- Bonjour monsieur Mvogo, dis-je en entrant dans son bureau.
- Bonjour madame Kamdem, répondit-il d'une voix lente, tout en parcourant ma silhouette des yeux.
Il releva enfin la tête et planta ses yeux dans les miens. Je sentis les battements de mon corps s'accélérer pendant qu'une chaleur d'une toute autre nature envahissait mon être. Je me fis violence et détachai mes yeux des siens et fis semblant d'être concentrée à allumer ma tablette.
- Vous avez rendez-vous à 9 h avec Mr Nyake. À 10 h, vous recevrez monsieur Wankam, ensuite...
Je me mis à lui énoncer son programme de la journée. Dans l'après-midi, nous étions censés rencontrer le directeur d'une banque.
- Euh... monsieur Mvogo, pour cet après-midi, je ne sais pas si vous...
- Votre présence est nécessaire madame Kamdem, me coupa-t-il d'une voix tranchante.
J'avais parfois l'impression que prononcer mon nom le répugnait.
- Bien monsieur, dis-je en me retirant.
La matinée se déroula sans encombre. À midi, je sortis déjeuner avec Éveline. Nous étions actuellement attablées, attendant notre repas.
- Ha ma copine, t'es une veinarde toi, lança Éveline en riant.
- Pourquoi donc ? demandai-je d'un ton surpris.
- Côtoyer étroitement un pain croustillant comme monsieur Mvogo, si ce n'est pas de la chance, comment l'appelleras-tu ? demanda Éveline.
Sa phrase me rappela mes débuts avec Arthur et Amanda. Cette dernière qui manifestait ouvertement son internet pour Arthur, et moi, de mon côté, concentrée à nier les sentiments que j'éprouvais pour lui. Heureusement, j'étais mariée aujourd'hui et la question ne se posait plus.
- Dis-moi, ma belle, murmura Éveline en se rapprochant de moi, sais-tu s'il est marié ?
Je ne saurais expliquer le motif, mais son ton de confidence et son regard coquin m'irritèrent au plus haut point.
- Je n'en sais rien, répondis-je un peu sèchement.
- J'ai essayé de me renseigner, mais je n'ai pas réussi à obtenir l'information.
Arthur était très réservé et s'assurait simplement de la bonne marche de l'entreprise sans chercher à nouer de rapports étroits avec qui que ce soit. Je m'étais posée, moi aussi, la question de savoir s'il était marié. Il n'avait pas d'alliance et tout le temps que nous avions passé ensemble pour le boulot, il n'avait jamais reçu d'appels dans ce sens. Il nous arrivait parfois de passer des après-midis ou des journées entières à travailler sur le terrain. Il se chargeait parfois de faire lui-même le consultant dans de grosses boites.
Je terminai le repas avec Éveline et on rentra à l'entreprise. J'étais censé retrouver le boss à 14 h pour nous rendre au siège de la banque qui avait sollicité nos services.
- Monsieur, il est déjà 14 h, dis-je en entrant dans son bureau.
- Nous pouvons y aller, répondit Arthur en se levant.
Je ne pus empêcher mon regard de s'attarder sur sa carrure. Il était beaucoup plus en forme que dans mon souvenir. On aurait dit qu'il pratiquait de la musculation. Ses cuisses musclées se dessinaient parfaitement dans son pantalon. Ses épaules étaient plus larges. Son corps me semblait sculpté dans du béton. Je me rendis compte que j'avais entièrement parcouru son corps du regard et me sentis tout à coup embarrassée. Je relevai lentement la tête vers lui et mes yeux se perdirent dans les siens. Il n'avait rien perdu de mon inspection. Il avait une expression énigmatique au visage. Je sentis les battements de mon cœur courir dans ma poitrine.
- C'est bon ? demanda-t-il avec un petit sourire en coin.
- Pardon ? hoquetai-je.
- C'est bon, nous pouvons y aller ? lança-t-il d'un ton faussement innocent.
- Oui, tout est prêt, répondis-je d'un ton neutre, pendant que dans ma poitrine, c'était le tourbillon.
Roman écrit par Justine Laure (page Facebook Plume de Justine Laure)
On sortit et Arthur s'installa au volant, me faisant signe de prendre place sur le siège passager. On roulait depuis un bon moment, notre silence était bercé par une douce mélodie qui jouait dans la voiture.
J'osai jeter un bref coup d'œil vers Arthur. Il semblait serein. Il se permettait même de chantonner et secouait la tête au rythme de la musique. J'avais simplement envie de lui donner un violent coup sur la tête. Quand allait-il se décider à percer l'abcès ? Quand allait-il manifester le fait que nous n'étions pas de simples inconnus ? Quand allait-il se décider à parler de notre séparation ? Quand allait-il arrêter de prendre cet air à la fois énigmatique et impassible avec moi ? J'avais été tentée à plusieurs reprises de lancer moi-même le sujet, mais son comportement à la fois impénétrable et parfois énigmatique m'en faisait passer l'envie. J'avais simplement envie de pleurer de frustration. Rester sur les charbons ardents ainsi pendant tout ce long mois m'épuisait psychologiquement et j'avais parfois l'impression que c'était exactement ce qu'il recherchait.
On arriva rapidement à la banque en question. Je descendis de voiture pendant qu'Arthur en faisait de même. On se rendit au niveau de la réception.
- Bonsoir, je suis monsieur Mvogo des établissements Mvogo. Nous avons rendez-vous avec monsieur Kengne à 15 h.
- Un moment, monsieur, répondit la réceptionniste en décrochant son téléphone, un large sourire aux lèvres et bien-sûr, sans lâcher Arthur du regard. Cela sembla l'amuser, car il s'adossa carrément en attendant que cette dernière nous revienne.
- Monsieur Kengne va vous recevoir d'un moment à l'autre, dit la réceptionniste en regarda Arthur d'un air aguicheur. Prenez cet ascenseur, les locaux de monsieur Kengne se trouvent au deuxième étage.
Je levai les yeux au ciel, partiellement irritée.
- À tout à l'heure, alors, lança Arthur d'un ton aimable.
On suivit les indications de la réceptionniste et bien vite, nous accédions au bureau de monsieur Kengne, introduits par sa secrétaire.
- Bonjour monsieur Mvogo, madame, nous salua monsieur Kengne, un large sourire au visage.
- Bonjour monsieur Kengne, je vous présente madame Kamdem, ma secrétaire.
- Enchanté, répondit monsieur Kengne. Nous avons eu à travailler avec monsieur Domou par le passé et n'avions jamais été déçus. J'espère que notre collaboration sera tout autant fructueuse. Monsieur Domou m'a assuré que la transition sera sans entache.
- Je peux vous assurer que vous pouvez compter sur nous. Nous travaillons avec les mêmes équipes avec lesquelles vous avez collaboré dans le passé, mais en maintenant les meilleurs à chaque poste.
- J'en suis ravi. En fait, nous avions actuellement besoin pour la filiale de Douala.
- C'est très bien, nous avons une équipe toute aussi compétente sur pied à Douala.
- Je le sais. Nous avons déjà eu recours à eux par le passé, mais vous savez, monsieur Domou s'assurait toujours de la bonne marche des opérations en se rendant aussi sur place.
Je sentis mon cœur palpiter à cet instant. Ce que j'avais craint était en train de se réaliser.
- Je comptais effectivement le faire.
- Très bien. Quand comptez-vous commencer ?
- Le plus tôt possible. Nous pourrions nous rendre à Douala dès lundi.
Nous ? me demandai-je le cœur en tumulte. Nous, lui et qui ?
- Parfait. Je vous ferai parvenir un courriel avec tout ce dont vous avez besoin pour accomplir au mieux votre tâche.
- Très bien.
Monsieur Kengne nous donna grosso modo des informations générales et je m'appliquai à prendre des notes.
- Je pense que nous avons discuté de l'essentiel. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas à me contacter.
- Merci de nous faire confiance, dit Arthur d'une voix confiante en se levant, tout en échange une franche poignée de mains avec monsieur Kengne.
Roman écrit par Justine Laure (page Facebook Plume de Justine Laure)
Je ne pus m'empêcher de le détailler. L'assurance qu'il dégageait... Nous étions bien loin d'Arthur, le petit étudiant, pauvre et timide.
Je le saluai à mon tour et nous prîmes à nouveau l’ascenseur. L'atmosphère était à couper au couteau. Je ne savais comment aborder le sujet. Arthur me regardait fixement, attendant apparemment un signe de moi. Je me sentais en même temps agitée et embarrassée sous ces yeux scrutateurs.
On sortit de l'ascenseur et Arthur se rendit pour une salutation à la réceptionniste. Je restai simplement près de la porte de sortie à l'attendre.
Nous sortîmes de la banque et je pris immédiatement place sur le siège passager.
- Libérez-vous lundi et mardi de la semaine prochaine. Nous allons à Douala, annonça Arthur d'une voix sans appel.
- Mais, Arthur, m'exclamai-je, je ne...
- Pardon, se tourna brusquement Arthur, me regardant d'un air féroce. Comment m'avez-vous appelé ?
- Euh... désolée... monsieur Mvogo, j'ai une famille, je ne peux pas me déplacer ainsi.
- Madame Kamdem, lança Arthur d'un ton coupant, je vous rappelle que vous avez signé un contrat. Devrai-je vous rappeler les clauses ?
Il était en effet mentionné dans le contrat que je devais garantir ma présence pour des missions hors de la ville en cas de besoin.
- N'avez-vous jamais effectué de voyage avec monsieur Domou ? reprit-il d'une voix ferme.
- Euh... oui, bien-sûr, mais il m'avertissait au moins deux semaines avant.
Ce qui n'était pas faux. Je voyais justement ces brèves missions comme un moyen de gagner de l'argent, car je percevais les frais de mission. Les déplacements ne m'avaient jamais posé de problème au passé, déjà qu'ils étaient généralement brefs, mais là, je ne pouvais m'empêcher de frémir. Nous passions pratiquement tout le temps ensemble avec monsieur Domou en cas de déplacement. Nous quittions généralement la ville de Yaoundé vers 6 h du matin et nous revenions le lendemain vers 20 h. Nous voyagions ensemble, déjeunions ensemble, dînions ensemble, parfois accompagnés de clients. Mais comment pourrais-je supporter de passer tout ce temps avec Arthur ? Je ne savais jamais à quoi m'attendre de sa part !
- Je n'ai pas de temps pour les caprices, lâcha-t-il d'une voix ferme.
Le reste du trajet se fit en silence. Le discours pour lui était clos, pourtant, j'avais encore tellement à dire. On arriva à la société et chacun se rendit dans ses bureaux. Il m'appela deux fois pour obtenir des informations, mais pratiquement, des choses inutiles. Il me regardait toujours d'un air mystérieux. J'avais simplement envie de lui donner une gifle bien appliquée et de m'en aller pour ne plus jamais réapparaître. Le comble, c'est que j'avais l'impression qu'il lisait dans mes pensées et qu'à la limite, cela l'amusait.
Je rentrai à la maison, conduisant comme une automate. C’était déjà un miracle que j'arrive à la maison saine et sauve.
- Maman, hurla Ophélie dès que j'ouvris la porte.
- Maman Beverly, s'écria Gabin en venant dans mes bras.
Je leur fis une série de câlins avant de me rendre dans ma chambre. Je m'assis lourdement sur le lit et mon esprit se mit à voyager. Je n'étais décidément pas tranquille. Personne n'était au courant que j'avais revu Arthur, encore moins Benjamin. Il aurait simplement pété un plomb. Quand je repensais aux scènes de jalousie qu'il me faisait au début de notre mariage, je pensais qu'il était mieux que je tienne l'information pour moi. Mais s'il le découvrait ? Devais-je en parler avec lui ? Il était au courant que ma société avait été vendue et que j'avais désormais un nouveau patron. Il m'avait interrogée à cet effet, et j'avais été vague, étrangement, il n'avait pas insisté. Le Benjamin d'avant m'aurait carrément harcelé pour que tout savoir de mon nouveau boss.
Arthur
Il était exactement 6 h 50 et j'étais garé devant le siège de ma société. J'attendais Beverly. Elle devrait arriver d'un moment à l'autre. Tout se déroulait comme sur des roulettes. Je la voyais troublée, déstabilisée, se demandant ce que j'avais en tête, mais n'osant l’exprimer à haute voix. Elle avait été plusieurs fois sur le point d'ouvrir le sujet avec moi, mais mon regard froid avait réussi à la décourager.
Ma pauvre Beverly, quand j'en aurai terminé avec toi, il ne restera qu'une coque vide de toi. Sans âme, rien...
Je la vis garer la voiture dans le parking de la société. Elle en descendit et je ne pus m'empêcher d'admirer ses courbes. Beverly était une belle femme, mais elle n'avait aucune conscience de son charme. Elle avait enfilé un pantalon en pagne qui épousait parfaitement son postérieur. Des idées salaces me passèrent à l'esprit, des scènes que j'avais déjà vécues dans le passé. Elle sur moi, elle sous moi, moi en elle, lui donnant du plaisir, admirant son visage déformé par l'excitation...
Je secouai la tête pour chasser ces pensées de mon esprit.
Elle ôta sa valise de sa malle-arrière, verrouilla sa voiture, et vint vers moi. Son visage exprimait une profonde angoisse, mêlé à de la peur. Que le jeu commence ma belle, pensai-je avec délectation.