
115 : C comme convocation, confrontation, Cédric
Ecrit par Gioia
***Essohana Bemba***
Il faut croire que
j’ai sous-estimé cette fillette. Je m’attendais à ce que sa famille débarque
ici pour nous faire tout un esclandre, mais certainement pas qu’on me servirait
une convocation. J’ai reçu ce courrier la veille de notre rencontre avec ma
petite fille, et depuis je médite dessus, ou je dirai plutôt sur les
motivations de Jennifer. D’un côté, nous avons sa famille qui tente depuis un
moment de nous rencontrer. Ils ont commencé par la force, mais le gardien de
Romelio, un brave homme, fait on ne peut mieux son travail. Ils se sont
présentés à l’hôpital, de ce que des anciens collègues m’ont rapporté. Je
précise que je n’ai pas assigné d’espions sur cette famille. Certaines
infirmières et sages-femmes qui sont encore en service m’appellent de temps en
temps pour prendre de mes nouvelles. Parmi elles, des curieuses m’ont laissé
entendre qu’elles ont croisé plusieurs fois ma belle-famille et cherchaient à
savoir s’il y avait une raison particulière derrière leurs visites répétées. Je
n’ai rien ébruité concernant la séparation du couple. Je connais assez mon fils
pour savoir que son ego est actuellement à terre. Il se réfugie dans son
travail et Dieu merci, il a trouvé en Hadassah une raison plus qu’importante de
rattraper rapidement le cours de sa vie, mais je ne suis pas dupe. Même si
l’unique pensée me désole, je ne peux pas affirmer que Romelio en a fini avec cette
relation. Une femme intelligente qui veut réellement récupérer son foyer
s’empresserait de mettre à profit ce moment pour mettre balle à terre, mais je
ne sais quoi penser de Jennifer. Je la croyais manipulatrice derrière ses airs
d’innocente, mais ses dernières actions me disent que cette enfant est
finalement plus bête que ses pieds. Ou alors, c’est sa famille qui insiste pour
sauver son foyer, tandis que madame essaie de croiser le fer avec moi pour je
ne sais quelle raison. Bref, la convocation est due pour demain et c’est avec
sérénité que je vais m’y présenter. On pourra m’expliquer ce qu’elle espère
accomplir.
Avant que je m’y
présente par contre, j’ai plus intéressant à faire. Arthur cuisine et il a une
femme de ménage, mais je préfère que ma petite fille mange mes repas. Personne
ne comprend ce que mon cœur a ressenti quand Romelio nous a parlé de Hadassah.
Personne je dis bien, même pas Auxanges. Je ne m’attendais pas à une
bénédiction si inattendue, alors je me suis engagée qu’avant que mon Seigneur
me rappelle à lui, je serai présente pour ma petite fille. Je me rends donc au
cabinet d’architecture qu’au passage, Arthur et l’équipe gèrent avec brio en
l’absence de Magnim. Puisque c’est Arthur qui s’occupe principalement de la
cuisine chez lui, je vais chercher les infos sur Hadassah. Qu’est-ce qu’elle
aime, qu’est-ce qu’elle tolère par politesse, bref les questions auxquelles Romelio
n’aurait pas répondu en me donnant comme raison qu’on doit y aller doucement
pour ne pas envahir la petite. Il ne nous a pas encore expliqué les
circonstances qui l’ont poussé à manquer les treize premières années de la vie
de l’enfant, mais vu comment il fait attention, j’ai l’impression qu’il craint
de poser une mauvaise action et perdre la petite, pourtant le sang ne se perd
pas, à moins qu’il y ait eu abus, c’est ma croyance. Bref, son père et moi
avons décidé de ne pas l’acculer vu tout ce qu’il traverse actuellement, donc
je me tourne vers Arthur lorsque je veux faire ma curieuse sur ma petite-fille.
Mon taxi que j’ai loué me laisse devant le cabinet Matao et je patiente dans la
salle d’attente comme me le demande la réceptionniste.
Une vingtaine de
minutes plus tard, ce sont les têtes de Jennifer et sa tante qui apparaissent,
suivies de mon Arthur. Je me lève. Les deux me dépassent sans un mot. La
vieille me lorgne, la jeune ajuste ses lunettes et marche la tête bien haute,
le sac de marques accroché à son avant-bras et les hauts talons résonnent sur
le sol carrelé. Arthur que je regarde paraît plus dépassé que moi et me fait
rire.
— J’espère que tu
ne regardes pas simplement cette situation comme un spectateur, mais que tu
tires des leçons pour ta propre vie. Quand tu crées la mauvaise personne, voici
ce que tu récoltes.
— Tu exagères
maman, Romelio n’a pas créé Jennifer, il me répond tout en m’ouvrant une
bouteille d’eau.
— Ah non ? Créer c’est quoi chez vous ? Elle en serait à ce niveau si Romelio ne
l’avait pas déposé sur ce chemin ? Tu
sais ce qu’on a fait dans les coulisses pour qu’on propose à Madame cette
émission qu’elle animait à la télé ? Rien
que le carnet d’adresses de Romelio lui a ouvert des portes que n’ont pas eues
les autres femmes qui avaient des idées similaires aux siennes. C’est une
bénédiction d’ouvrir les portes à sa femme, je ne dirai jamais le contraire, mais
on ne choisit pas n’importe qui comme femme, c’est là où je veux en venir. Sinon
voilà où tu te retrouves. Le planton, la réceptionniste, ils m’ont tous salué
quand je suis entrée dans ce cabinet. C’est moi aujourd’hui qui ne mérite pas
les salutations de Jennifer ? C’est
ce que tu me diras ?
— Je pense
qu’elle est perdue. Je commence à croire que peut-être, on lui a fait quelque
chose ?
— Il ne faut pas
enfouir ta tête dans le sable Arthur. On ne lui a rien fait. Les circonstances
vous ont permis de découvrir l’ampleur de toute sa personnalité. C’est tout, et
je suppose qu’elles sont venues plaider chez toi ?
— Comment tu l’as
su ? Elles sont passées à la
maison aussi ?
— Tu crois
sincèrement que les deux qui sont sorties d’ici auraient emmené leurs pieds
devant ma maison ?
— Bon, il
commence en tordant la bouche, elles voulaient que j’organise une rencontre
avec Romelio pour s’expliquer. Tu vas m’insulter, mais je n’ai pas pu refuser
après avoir écouté leurs raisons.
— C’est toi qui
vis avec Romelio. Si tu as le cœur pour supporter sa colère, je vais me
fatiguer à t’insulter pourquoi ?
Assurez-vous simplement de venir me déposer ma petite-fille le jour où vous
commencerez vos explications.
— Justement,
c’est un malentendu__
— Ah pardon, je
dis en levant la main pour le stopper. Elle m’a montré ce que j’avais besoin de
savoir. Ses raisons ne m’intéresseront jamais. Va confronter Romelio avec si ça
te chante.
— Je l’ai quand
même bien grondé concernant ce qu’elle a fait à la maison hein, il m’annonce
comme s’il croyait avoir fait quelque chose de grandiose.
— Qu’est-ce que
Hadassah aime manger ? je lui
retourne. C’est la raison de ma visite et Jennifer a eu assez d’attention de ma
part.
— Euh, elle
n’aime pas le gombo ça c’est sûr, pourquoi ?
— Je vais remplir
mon rôle de mamie. Comment tu as préparé son gombo pour qu’elle le déteste ?
— Genre c’est ma
faute quoi, il dit avec humour.
— Ça ne peut être
que ça. Une Togolaise qui n’aime pas le gombo, on entend ça où ?
— Ta petite fille
n’a de togolais que ton sang. 25 % en plus, il continue avec humour. Sinon
c’est une petite blanche dans l’âme. Elle a froissé son visage quand je lui ai
présenté la sauce gluante. La pâte de maïs fermenté lui a donné mal au ventre.
Un petit mal de ventre maman, Romelio transpirait comme si la petite allait
mourir. Il n’a pas fermé l’œil, il se moque.
— On verra quand
tu auras ton enfant.
— Lol, je ne vais
certainement pas faire les va-et-vient dans le couloir à 2 h du matin pour
une ado qui fait la diarrhée. Bon pour te répondre, elle aime la sauce crémeuse
à l’oignon et au foie de veau avec en accompagnement l’igname bouillie. Sinon, elle
ne sera pas contre un riz blanc garni de bloomvi (une sorte de saucisse au porc)
et piment vert. Un petit yaourt grotto dosé à la noix de muscade comme dessert
ne serait pas de refus.
Je pousse un juron à
chacune de ses suggestions. Il n’a cité que ses favoris que je faisais
régulièrement quand il passait ses vacances avec nous. Je prends quand même en
note et décline son offre de me déposer en lui donnant comme raison qu’en moins
de dix minutes à marche, je serais au grand marché. En réalité, je me suis
rendue sereinement au commissariat pour honorer ma convocation.
***Jennifer Bemba***
Mes matinées sont ultra
chargées depuis la rentrée scolaire. Tout le monde est mobilisé ici, y compris
Yasmine, mais c’est comme si madame ne le capte pas. Elle ne cesse de soupirer depuis
qu’on est à l’ouvrage et son bruit m’exaspère autant qu’il fait gonfler ma
tante qui ne cesse de nous regarder de travers.
— C’est moi ou il
fait chaud ici ? se
plaint Yasmine.
— Dans ta cuisine
il fait froid ? je lui
retourne avant d’interpeller une employée pour qu’on m’apporte les Tupperwares
réservés aux élèves qui font des allergies.
— iiehh
doucement, c’était juste une remarque.
— Pardon, donne-moi,
ma tante dit et lui retire les ustensiles. Va un peu prendre de l’air.
— Vraiment merci
maman, il fait trop chaud ici. C’est quel enfer ça ? Tout mon tissage me gratte, elle continue en
sortant.
— Ce n’est pas le
moment ma tante, je commence avant qu’elle me tombe dessus avec ses remarques.
Elle me lorgne
simplement avant de se mettre à l’ouvrage. Dieu merci, mon équipe est toujours
au taquet. 11 h 20, mon mini bus est chargé et démarre. En trente
minutes, les serveurs finissent de dresser les tables se trouvant sur la grande
terrasse à l’étage qui sert de cantine aux élèves. Ma tante et moi sommes en
retrait et faisons le récapitulatif de notre rencontre matinale avec Arthur.
— Tu ne dois pas
dormir sur tes lauriers. S’il ne t’a pas fait signe d’ici demain soir, tu écris
à Arthur. Je ne dis pas de le supplier tous les jours, mais seulement le
saluer. Il doit se rappeler que tu existes et indirectement tu lui mets un peu
le feu aux fesses.
— Je vais même
lui écrire ce soir si je ne reçois rien, je dis déterminée.
Cette séparation a
trop duré et le pire c’est lorsque je reçois un appel d’Oyena. Je ne lui ai
toujours rien dit. Ce qui se passe dans mon couple ne concerne que moi, mais
entretenir le mensonge devient compliqué parce qu’elle travaille avec lui. C’est
vrai qu’ils ne se fréquentent pas vraiment et elle ne me questionne pas sur mon
couple, mais parfois elle fait des commentaires qui me font réfléchir, ou c’est
moi qui dois réfléchir à tout ce que je lui dis pour ne pas me trahir. C’est lourd,
je promets, ça m’épuise tellement qu’une fois j’ai pensé à foncer avec ma voiture
dans notre ancienne maison, pour voir comment ce foutu gardien réagirait. Je
vais le renvoyer, je l’ai déjà dit. Un idiot. Bref, les enfants arrivent en
groupe et facilement on distingue Jérémie dans le groupe qui s’approche de nous.
— Eh la vieille est
de sortie, c’est pas possible.
— C’est ta maman
la vieille.
— Effectivement,
il répond avec un sourire après avoir évité le petit coup de main que sa tante
lui a envoyé.
— Ça va toi ? Les cours ?
— On nous a
balancé une interro en technologie tout à l’heure là, hum, la classe tremblait
en sortant.
— Hum, avec ce
que Jennifer paie comme scolarité ici pour toi, tu n’as même pas intérêt à
faire partie des tremblants.
— Ma tante, je dis
doucement bien que je la rappelle à l’ordre.
— Ah non non, ce
n’est pas tout de vanter la beauté de l’école quand il rentre. Il est ici pour
travailler.
— Tu as raison la
vieille, c’est ton devoir de tout me rappeler, en plus ça t’aide à travailler ta
mémoire. C’est important à cet âge, il ironise et reçoit cette fois le coup de
sa mère sur la tante.
— Bon c’est pas
que je ne vous aime pas les chéries, mais les jeunettes m’appellent. Tata, s’il
te plaît, tu peux dire à tes serveuses de me donner la part de Tornade au lieu
de me faire bavarder ?
— Hein ?
— J’ai une
potesse Tornade qui ne mange pas les abats, mais lorsque je demande aux serveuses
de me filer sa part, elles me parlent le gros français. C’est comment ?
— Tu connais la
quantité de personnes qui viennent avec ses raisons ? En plus, si ton amie est allergique aux
abats, on ne l’a déjà pas compté quand on préparait les assiettes.
— Elle n’est pas
allergique. La vue la dégoûte simplement.
— Hum, je peux te
croire ?
— C’est sûr qu’il
ment, petit gourmand.
— C’est quelle diffamation
sur ma personne ça ? Attendez
que j’aille la chercher.
Celui qui est parti à
la course, c’est le même qui s’est arrêté au niveau d’un groupe d’élèves dans
lequel se trouvait Amaya, et il a carrément déposé son bras autour de son
épaule, papotant tout en rigolant comme s’il n’avait rien à faire.
— La fille avec
Jérémie, c’est quelqu’un qu’on connaît ? Son
visage m’est familier.
— C’est Amaya, la
fille de George, je lui rappelle.
— Anh, c’est donc
pour ça que sa mère s’est à nouveau frayé un chemin dans ta vie. Je vois. La
vraie question, c’est pourquoi tu laisses cette tortue te suivre malgré tout.
— Tu es dure.
Yasmine n’est pas une tortue.
— Ah bon ? Une femme qui se plaint de chaleur devant les
fourneaux n’est pas aussi inutile qu’une tortue ? Elle doit te faire quoi pour que tu comprennes
qu’elle ne t’apporte rien dans la vie ?
— Hum, on n’est
plus ami comme avant. Elle me donne un coup de main temporaire et après ça,
chacun prendra son chemin.
— Je l’espère
bien hein. Je l’espère, elle me lance pourtant sur un ton limite menaçant.
Comme je l’ai dit à ma
tante, j’ai appelé à différentes reprises Arthur avant de me coucher, mais je
ne l’ai pas eu. Fatiguée, je finis par m’endormir. Le lendemain, il n’a
retourné aucun appel.
— Je n’ai même pas
reçu de SMS, j’informe ma tante.
— Je t’ai dit quoi
hier ? Je t’ai dit que la
petite réceptionniste ne nous a pas bien reçus, mais tu ne voulais rien
écouter. « Nian c’est parce qu’on n’a
pas pris de rendez-vous », « Nian, arrête de voir le mal partout ma tante », elle m’imite. Tu vois ? Je suis certaine que la vieille mégère les a
tous payés ! Que ce soit ton gardien,
la réceptionniste, et même les pasteurs de l’église de son mari. Elle les a
tous payés pour qu’on la prévienne de nos faits et gestes, sinon pourquoi le
gardien qui t’a toujours respecté te refuse désormais l’accès à ta propre
maison ? Depuis quand un pasteur
prend des vacances ? Nous
sommes allés trois fois à l’église où sert le pasteur Auxanges. Trois fois et on
nous dit toujours qu’il est en vacances. Même à l’hôpital, on nous a dit que
ton mari n’était pas disponible. Je suis certaine qu’elle a empoisonné les
oreilles du gentil petit Arthur après notre départ. Elle est tellement nuisible
que ça me dépasse même si j’avais des soupçons.
— En fait, c’est
maintenant que je comprends les conseils que tu me donnais. Elle n’attendait qu’une
opportunité pour m’encercler, comme je suis l’épicentre de sa vie, mais c’est
rien. On va régler ça au moment voulu. Toujours aucune nouvelle de madame Ciara ?
— Son numéro ne
fonctionne toujours pas, elle soupire lourdement.
— Ils devaient
partir en croisière, mais je pensais qu’ils garderaient leurs lignes actives puisqu’ils
s’en allaient pour un peu plus d’un an. Qu’est-ce que je dois faire ? je demande en remontant nerveusement mon tissage.
Arthur était mon dernier espoir et la compassion qu’il m’a démontrée après mes
explications m’a mis du baume au cœur.
— Toi aussi, c’était
une erreur de ne pas avoir le numéro de Mr Magnim. C’est quand même l’oncle
de ton mari. Comment tu expliques ça ?
— Pardon ma
tante, ce n’est pas le moment !
— Eh doucement, ce
n’est pas la peine de te fâcher.
— Dans ce cas, ne
me parle pas de choses que je ne peux plus changer. Tu l’as son numéro toi ? Non. Alors pourquoi tu me rappelles ça ? je lui réponds agacée.
9/10 je parlais à la
famille de Romelio quand il les appelait, donc je ne me suis jamais dérangée
pour avoir leurs numéros en dehors de ceux des jeunes, sinon ses parents.
— Je pense à une solution,
commence ma tante. Madame Ciara est très amie avec la maman de la reine de Saba
non ?
— Oui ?
— C’est elle qui
conduit la grosse voiture non ?
— Où veux-tu en
venir ?
— Je pense que je
l’ai vu les fois où on allait à l’hôpital.
— Impossible.
Elle est aux États-Unis avec la reine de Saba.
— ça ne te coûte
quand même rien de l’appeler pour__
— Pour lui dire quoi
en fait ? Tu comprends ce que tu
me proposes là ? On
parle de la mère d’Elikem ! C’est
moi Jennifer qui doit prendre mon téléphone pour appeler la mère de cette vipère
parce que ?
— Pendant que tu
gonfles tes narines sur moi ici, la sorcière est en train de barricader ton
mari. Au moins, moi je te donne tes solutions concrètes. C’est la reine de Saba
qui est vipère et pas sa mère. En plus d’être l’amie de madame Ciara, elle est
aussi mariée au patron de ton mari. Elle peut intervenir à plusieurs niveaux si
on sait bien lui parler. Il y a même les petites cousines là, je ne me rappelle
plus des noms, mais tu as refusé de leur demander de l’aide aussi. Il a même
fallu que je parle jour après jour pour que tu te décides à appeler Arthur,
pourtant c’est toi qui as pleuré que tu voulais récupérer ta maison. Je ne sais
pas si tu crois que c’est avec ta parole uniquement que tu regagneras ta
maison, mais en tout cas, je te laisse avec tes idées, elle me sermonne et s’en
va.
Macy marche avec Aurore
et Snam est carrément la belle-sœur d’Elikem. Comme la position de meilleure
amie ne suffisait pas à madame, elle a placé ses sœurs sur les cousines de mon
mec. Genre, les Lare Aw ne peuvent pas se chercher ailleurs ? C’est quel cliché ennuyant ça ? En tout cas, je préfère directement appeler Romelio
et le supplier de venir me chercher au lieu de me tourner vers le côté des cousines.
Je ne vais pas me livrer pour qu’on se foute de ma gueule ! Je ne suis pas un clown. Arthur c’est ma solution
et s’il me faut le harceler pour qu’il revienne à de meilleurs sentiments, je
ne vais pas me gêner. Il est célibataire, en tout cas il l’était trois mois plutôt
et je sais que Romelio le taquinait de regarder vers Oyena, qui est très célibataire.
On verra jusqu’où le petit plan de primaire de Hana ira lorsqu’Arthur mangera
dans la main de Oyena.
***Arthur Sodji***
En vérité, j’ignore quoi
dire à Jennifer. Je lui ai déjà servi trois messages d’excuse bidon pour justifier
mon silence. Sa visite remonte à cinq jours, et je ne sais toujours pas comment
aborder le sujet avec Romelio. J’ignore ce qui me retient tant. Il y a cette
petite voix qui me dit que ce n’est pas le moment de déranger mon type, surtout
que sa relation avec Hadassah s’améliore petit à petit. Elle ne se barricade plus
dans la chambre dès qu’elle finit de manger ou faire ses petites tâches
ménagères et pour le coup, je dois dire qu’elle m’épate la petite. À 13 ans,
j’étais autonome aussi, mais je n’avais
pas vraiment de parents. Elle a grandi entourée et pourtant elle ne laisse pas
ses assiettes traîner quand elle finit de manger. Elle fait son lit chaque
matin avant de se rendre à l’école. À cause de la petite, on ne jette plus les
ordures dans le même sac chez moi. Imaginez, c’est ma dame de ménage qui nous a
imposé ça. Elle a vu que la petite triait les cartons et sachets des os d’animaux,
d’arêtes ainsi que légumes ou fruits. Intriguée elle l’a donc interrogée. J’ignore
ce que la petite lui a dit oh, mais ma vieille dame de ménage s’est transformée
en une savante en environnement durable. Il faut voir comment elle m’a regardé
de travers les fois où je me suis trompé. Autant vous dire, qu’elle est sous le
charme de Hadassah. Elle s’imaginait tout comme moi qu’une fille ayant passé
toute sa vie en Occident serait paresseuse selon nos standards ici, sinon très
capricieuse, mais elle nous a eu sur ce coup et qu’on pardonne nos préjugés. Malgré
les louanges que chante ma dame de ménage sur la petite, il y a un truc qui me
dérange. Autant de perfection à treize ans, c’est étrange. J’admets qu’on ne la
côtoie pas depuis si longtemps, mais je vous assure que la petite est trop
parfaite. Parfois j’ai même l’impression qu’elle veut être invisible. Elle ne
touche pas à la télé. Quand elle est dans sa chambre, on n’entend pas de vacarme.
Elle ne saute pas sur son lit. Les fois où j’ai essayé de faire mon curieux et
je l’ai visité, je l’ai généralement trouvé à table, casque sur sa tête et la
face devant son téléphone. Toute cette perfection me fait souvent penser qu’elle
s’applique à être parfaite pour éviter une punition. Le fait qu’elle reste
vague quand je l’interroge sur la vie qu’elle a mené avant de venir ici m’intrigue
davantage sur son passé. Romelio s’est fait la même réflexion et considère l’option
de lui faire passer un examen médical complet, histoire de s’assurer qu’elle n’a
rien subi. Hormis ce détail, les deux gravitent un peu plus l’un vers l’autre. Bon,
Romelio gravitait déjà, mais elle commence à faire des petits pas vers lui. Actuellement,
je me prépare pour une sortie, pendant que les deux sont dans la cour. Elle
devant ses cahiers et lui son téléphone.
— Tu vas déranger
qui frais comme ça ? me
lance le chef quand je fais mon apparition sur la terrasse.
— Laisse-moi dans
ma chasteté, je réponds et il rigole. Je reviens bientôt Hada, tu ne pleures
pas d’accord ?
— Han ? elle réplique confuse.
— Un petit rire à
ma blague n’allait pas te tuer hein ma puce.
— Emmène tes
blagues loin de l’enfant et qu’on ne voit pas tes pieds ici ce soir, tu verras
ce que je dirai à ta mère, il dit avec humour.
— Appelle-moi
frère chaste, je fais la fierté de maman Hana, je lui envoie tout en m’installant
au volant de m a Suzuki.
Ce n’est pas de gaieté
de cœur que je mens à Romelio, mais je ne peux décemment plus feinter Jennifer.
Je n’ai certes aucune nouvelle pour elle, mais ça ne me coûtait rien d’apaiser
son esprit, du coup j’ai accepté son invitation et me dirige vers son Snack. Je
la retrouve sans difficulté dès mon entrée. Elle me fait signe de la main de m’approcher
à la table où elle se trouve en compagnie d’une femme si je me fie à la silhouette
du dos que j’ai en face.
— Bonsoir
mesdames, je les salue une fois à leur hauteur.
— Ouh tu es beau
hein. Tu te souviens d’Oyena ? Elle
est chirurgienne à l’hôpital Li. Oyé, voici Arthur, mon beau-frère, elle s’empresse
de nous introduire.
— OK ? la hautaine qui se dit chirurgienne répond en
soulevant son sourcil et ne dévisage que Jen. La main que je lui ai présentée
est toujours suspendue.
— Euh, Jen
commence après un rire nerveux et étonné.
— C’est assez
risible qu’un médecin qui est responsable de vies manque autant de cordialité, on
se demande comment survivent vos patients, je commente après avoir rangé ma
main et reçois des soupirs choqués de je ne sais qui. En tout cas ils ne viennent
pas de miss la hautaine qui daigne enfin me regarder.
— Tant que tu te
le demandes loin de moi, merci, elle m’assène en retour et reçoit plus de
soupirs choqués que moi.
Jen est horrifiée et s’excuse
auprès de moi, avant de se lancer à la poursuite de madame qui après m’avoir
versé sa bile s’était levée. Je m’installe gaillardement et j’attends le retour
de Jen. J’avais eu des échos sur cette Oyena et son fameux caractère qui la
rend insupportable pour beaucoup. La question, c’est qu’est-ce qu’une femme posée
comme Jennifer fichait à la même table que celle-là ? Depuis quand elles se fréquentent ?
***Yasmine Sani***
C’est en rigolant que
j’entre chez moi et lance l’appel vers le numéro de ma sœur. Trois tentatives, Emily
ne répond pas. Depuis qu’elle a soulevé son papi, elle n’a plus le temps des
gens, pourtant elle n’arrive pas à se faire épouser. Tu te demandes ce qu’elle
fiche pour être indisponible en dehors de travailler pour sa belle-fille. Moi je
pensais qu’au début, elle avait infiltré le Spa pour se rapprocher du type,
mais il faut croire que ma sœur a définitivement changé. Elle baise le père et
la fille la commande en journée. Les choses qu’on ne me trouvera jamais en
train de faire. Bref, je l’appelais pour lui raconter la dernière en ville, ou
plutôt chez Jennifer. Je n’aurai pas cru si on me l’avait raconté, mais c’est
bel et bien avec mes deux yeux que j’ai vu cette Oyena planter le type au Snack
et en suivant Jen pour ne rien rater, j’ai entendu le scoop du siècle. Donc Jen
qui se joue l’autoritaire sur les gens peut aussi parler avec crainte devant
une autre femme ? En moins
de cinq minutes, cette Oyena a sacrément piqué ma curiosité.
George aussi n’est pas
à la maison pour qu’on cause, donc je vais voir les filles après avoir libéré
la bonne. Je cajole un peu mon fils avant de le laisser sous la supervision de
Gemma et vais voir ce que fait Maya. Elle est couchée sur son lit. Les cahiers
d’un côté, le téléphone dans la face et voulait sauter pour le cacher quand
elle m’a vu.
— Laisse ça, on
est né avant toi.
— Je faisais des
recherches pour__
— Oui oui. Dis-moi
un peu, des nouvelles à l’école ? Tu as
appris quelque chose concernant votre fondatrice ?
— Yes ! elle me lance sur un ton très enjoué. Figure-toi
que je suis amie avec sa nièce ! Elle m’a
dit que Mme Nicol prépare une immense fête très glamour pour ses 31 ans
maman ! Et pour l’occasion, elle
va se livrer dans le magazine Source. Ce sera une édition spécialement
consacrée à sa vie, son parcours et ses projets. J’ai trop hâte !
— C’est quel
magazine ça ?
— Oh attend, elle
saute et me montre son téléphone. C’est un magazine dont on fait la promo à l’école.
La prof de français nous a recommandé de nous y abonner, mais selon mon amie, il
lui appartient.
— Non ! Je dis en rigolant. La femme est folle. Elle
a créé un magazine entier juste pour son anniversaire ? C’est quel degré de narcissisme ça ?
— Bah elle est riche,
fabuleuse et veut nous inspirer à aspirer au meilleur.
— N’est-ce pas,
je continue en rigolant.
— Je peux m’abonner
s’il te plaît ? Il coûte
normalement 1000 francs par mois, mais si on s’abonne par l’école il revient
à 700 francs et en plus des histoires inspirantes, il y a des sections sur
la finance ainsi que des conseils sur comment préparer son entrée dans des
universités cotées.
— Comment tu sais
ça toi ?
— Bah je t’ai
dit. Ils font une grosse pub sur Tik Tok et Instagram depuis que je les suis. C’est
là-bas que j’ai vu quelques scènes des coulisses de la séance photo du Dr Oyena.
Sa nièce dit qu’on l’a tourné chez elle. Il paraît qu’elle a même des paons
dans sa maison. Tu imagines ça ?
— C’est normal qu’elle
envoie chier les hommes en pagaille quand elle a tout ça, je commente avec
humour. Le magazine en question sort quand ?
— Dans six jours ! Je suis le décompte régulièrement.
— Demain,
rappelle-moi de te donner l’arge__
Je n’ai pas fini qu’elle
s’est déjà jetée à mon coup, en me criant que je suis la meilleure maman au
monde. On papote tellement que le rabat-joie de George doit venir nous
interrompre pour qu’on arrête. Monsieur bavarde parce qu’il est rentré à 23 h
un dimanche et ses enfants ne dorment pas pourtant ils ont école demain. Il ne
va pas adresser le fait qu’il est lui-même resté dehors jusqu’à une heure
inconcevable hein. Un imbécile.
— Tu n’oublies
pas de finir tes devoirs avant de dormir hein, je dis à Maya avant de la
laisser.
***Elikem Akueson***
Une photo, un message « bae af », et
deux heures plus tard, je me retrouve encore dans une position inconfortable.
La photo vient d’Océane, l’accro aux peaux d’ébènes. Je ne connais aucune femme
qui salive autant sur la couleur de peau que mon amie. La photo, c’est celle de
Cédric. Apparemment, monsieur joue au mannequin à ses heures perdues. Il était
en couverture de la première édition d’un tout nouveau magazine, qu’Océane n’a
cessé de me vanter. Elle m’envoie donc la photo et se met à s’extasier en
messages sur la fameuse beauté de Cédric que je ne vois toujours pas. Il n’est
pas laid, loin de là. Il est juste régulier et surtout bien noir quoi, le saint
Graal d’Océane. Je n’attache pas autant d’importance à la couleur de peau. Bref,
je reçois la photo, on papote et comme les étoiles s’alignent dernièrement pour
m’emmerder, le fameux « bae af » tombe sur sa photo dans mon cell. Bon, tomber
est un grand mot. Le mariage de Dara approchant à grands pas, on se retrouve
régulièrement pour quelques répétitions et il se fait que monsieur est le témoin
de Cédric. Un témoin que je n’ai jamais vu jusqu’à ce qu’il insulte mes chaussures,
je tiens à le préciser ! Un
témoin qui n’était pas présent et choisit le jour où Océane bave sur sa fameuse
beauté pour l’être, mais en plus il envoie sa face vers mon cell et me dit qu’il
évitait à Solim de me renverser de l’eau dessus.
Pour sa défense, Solim
a effectivement attrapé mon verre pendant un moment d’absence et l’a renversé
tout près de moi. Monsieur trouve donc sa photo, sourit comme s’il venait de
découvrir un grand secret et me demande de supprimer le magazine si je l’ai,
parce qu’il préfère répondre directement à mes questions. Il me remercie
carrément pour le « bae af » que je n’ai jamais dit. J’ai essayé de le
corriger et j’y suis peut-être allée sèchement, mais voilà que je me rends trois
heures plus tard, à la villa rosa à cause de la longue tête d’Océane. Madame
aspire à poser pour un magazine maintenant. Elle veut raconter son histoire,
inspirer la jeunesse, bref, des rêves que je ne lui connaissais même pas. Donc
pour Océane, j’ai ravalé ma fierté et demandé à Cédric comment il a fait pour
se retrouver mannequin d’une journée. Monsieur me répond par message qu’il vient
me chercher pour qu’on discute parce qu’il n’écrit pas de message. Je répète,
monsieur me dit par message que lui n’écrit pas de message ! Si ce n’est pas se foutre de la gueule du
monde ça, qu’est-ce que c’est ? Bref,
il a proposé de passer me chercher, j’ai préféré le retrouver, ne voulant pas
qu’il vienne ici et que Snam se fasse davantage d’idées sur nous. Il est étrangement
retourné dans les bonnes grâces de Dara. Je ne prévoyais pas que ma sœur lui en
veuille éternellement, mais le revirement de situation m’intrigue quand même. Quoiqu’il
en soit, j’ai préféré aller à sa rencontre, pour qu’on évite les quiproquos.
— Je descends à
la piscine là, donc ramène-toi un maillot si tu veux aussi en profiter, il me
texte ça pourtant je suis déjà en chemin.
— Qu’est-ce que
je viens de voir là ? C’est
un message venant de toi ?
Il n’a pas répondu à
ça hein. Le type abuse. Je débarque à la villa rose et me fais escorter par un
majordome jusqu’à une piscine qui se trouve devant une salle de gym. Le gars se
tape un crawl digne de Phelps et sort au ralenti comme le frimeur qu’il est.
— Tu ne voulais
pas profiter de la piscine ? Elle
est chauffée.
— Pour que tu puisses
me reluquer facilement ? Tu peux
toujours rêver, je lui réponds du tac au tac.
— Sauf ton
respect, tu n’as pas le genre de forme qui nécessite la nudité pour être admiré
et ce n’est pas mon genre de prendre des détours lorsque j’ai une intention. Si
je voulais te voir en petite tenue, je te l’aurais simplement dit, il me répond
si calmement que je me sens conne pour mon ton abrupt.
— Soit, je m’excuse
de t’avoir prêté des intentions peu glorieuses.
— C’est oublié,
il dit en s’installant. Tu voulais savoir comment je me suis retrouvé en couv
de Source si je comprends bien.
— Oui. J’ai une
amie qui est intéressée par l’opportunité.
— Voilà, il dit
en avançant une carte d’affaires vers moi. J’ai été approché pour la couv. Elle
peut appeler Siaka, la rédactrice en chef et dire qu’elle vient sur ma
recommandation.
— Wow, euh, c’est
tout ? je demande surprise.
— À ma
connaissance oui. Il y a des critères pour gracier la couverture. Je pense qu’il
faut être entrepreneur et à la direction d’une entreprise florissante, mais bref,
Siaka lui en parlera en détail. Si elle ne répond pas aux critères du magazine,
obviously, elle ne sera pas retenue.
— Oui, je
comprends, euh merci, je dis sincère et toujours surprise. Je m’attendais à ce
qu’il me fasse chier pour me filer cette info. La preuve, il m’a fait sortir
juste pour ça. Tu n’aimes vraiment pas texter ? J’ose lui demander, parce que ça me dépasse.
— Je préfère
parler de vive voix et étudier mon interlocuteur. On apprend beaucoup en observant
les gens.
— Genre tu m’étudies
là ? C’est quoi le projet ?
— Non, mon
cerveau est au repos actuellement. J’apprécie simplement ta compagnie. C’est drôle
qu’on se retrouve ainsi. Ta sœur qui épouse mon ami. Je l’ai souvent entendu
parler d’une certaine Elie ou Perla, mais jamais je n’aurai pensé qu’il s’agissait
de toi. Il a fallu que je lise sur ta tablette, le début de ton CV pour faire
le lien.
— Tout comme j’entendais
Yafeu et jamais je n’ai fait le lien, c’est fou.
— Nos profs à l’époque
ont simplement opté pour le prénom français, sinon mon nom complet c’est Yafeu
Cédric Asamoah.
— Je t’aurais
demandé un autographe si j’avais su que tu deviendrais le PDG du plus grand fabricant
de matériel médical de l’Afrique, je lui dis et il pouffe de rire.
— C’est ce qu’ils
ont écrit dans l’article ?
— C’est ce que j’ai
entendu de Hilda. Je n’ai pas lu l’article.
— Hilda c’est qui ?
— Comment ça c’est
qui ? La fille qui s’est mise
entre nous durant notre altercation. La copine de ton frère ? C’est Godson ton frère non ?
— Oui c’est mon frère.
Tu dis que la fille c’est sa copine ?
— Bah c’est ce qu’elle
nous a dit. Je sais pas, peut-être que je me suis trompée, je tente par crainte
d’avoir dit un truc qu’il ne fallait pas.
— Je vois. J’espère
que ma compagnie atteindra le niveau auquel elle la place dans cinq ou sept
ans. Pour le moment, nous essayons de solidifier notre place dans de nouveaux marchés.
J’ai appris que tu es devenue médecin comme ton père ?
— Tu savais que
mon père était médecin ?
— Elikem Akueson,
la fille de Laré Aw, un pédiatre reconnu. Pour une raison inconnue, tu étais
bien connue au lycée.
— Raison inconnue
mon œil, j’étais studieuse et polie.
— Polie mon œil,
il dit avec humour. J’ai toujours en mémoire notre altercation et la vulgarité
avec laquelle tu as répondu aux autres.
— Disons que j’étais
constamment sur la défensive à cette époque, je dis en souriant en souvenir de
cette époque.
— Qu’est-ce qui t’a
changé ?
— Je sais pas. La
vie en général. Assez parlé de moi, comment tu te retrouves à la tête d’une
compagnie pareille ? Tu n’étais
même pas studieux au lycée, no offense.
— Lol,
none taken. J’ai rencontré une
femme, j’en suis tombé amoureux, on avait des plans et je me suis appliqué pour
les réaliser.
— C’est beau, tu
confirmes la théorie que la bonne femme peut influencer positivement l’homme,
je dis soulagée. J’aurais su depuis le début qu’il était en couple que je n’aurais
pas autant paniqué qu’on crée un quiproquo.
— Yes, je le
confirme, mais nos chemins se sont séparés.
— Oh, je__désolée
pour toi.
— C’est la vie,
on ne peut rien contre certains phénomènes. Nous avons au moins passé de beaux
moments ensemble.
— C’est bien de
le voir ainsi, je dis un peu admirative. Je ne m’attendais pas à le trouver si
posé et réfléchi ? J’ignore
si c’est le mot que je cherche, mais je le trouve très posé dans ses mots, un
trait que je n’aurais pas associé à son côté frimeur.
— Tu penses qu’un
jour tu verras ta relation sous cet angle ?
— De quoi tu
parles ? Pourquoi on parle tout d’un
coup de moi quand on était sur toi ?
— Ton corps est
fascinant, mais ce n’est pas lui qui m’intrigue. Ce sont tes pensées. Tu m’intrigues
déjà au lycée, mais j’avais ma vie à gérer et des années plus tard, tu m’intrigues
davantage. Ton visage exprime beaucoup et pourtant, tu contrôles énormément ce
que tu laisses passer. Pourquoi tu as besoin de contrôle ? Je suis curieux.
— Bonne nuit, je
lui annonce en me levant et m’éloigne de lui en pressant le pas. Qu’il appelle ça
de la fuite, je m’en fiche. Je ne cherche pas qu’on lise mes pensées. Ce qui se
passe dans ma tête me regarde.