CHAPITRE IV : Dean ou le choix de la raison

Ecrit par dotou

Plusieurs heures plus tard, Dean se retournait encore sur sa couche, incapable de trouver le sommeil. Il sentait qu’après ce qui s’était passé ce soir, plus jamais ses rapports avec Cora ne pourraient demeurer les mêmes.

Il ferma les yeux avec force et pria afin de trouver le sommeil qui le libérerait de sa tourmente. Malgré lui, l’image de la jeune fille lui revenait sans cesse. Mais il s’interdisait de penser à Cora, non plus comme la petite sœur, mais comme une jeune fille qui a su allumer en lui les feux du désir.

Inlassablement pourtant, il ressassait ces quelques minutes de délicieuse torture. Vaincu, il sut qu’il ne trouverait le sommeil qu’en abandonnant cette lutte inégale qu’il menait contre ses pensées. Le soleil dardait déjà ses premiers rayons lorsque Morphée consentit à l’accueillir dans ses bras.

Au déjeuner, Cadia s’inquiéta de ne pas trouver son fils à table.

- Ali, ton fils est encore couché, ce n’est pas normal.

- Tu sais bien qu’il est rentré très tard hier soir, pour ne pas dire ce matin.

- Je n’en disconviens pas. Mais ce n’est pas dans ses habitudes. Il est déjà une heure de l’après-midi.

- Laisse donc ton fils se reposer. De plus on est dimanche aujourd’hui.

Mais une demi-heure plus tard, tandis que le déjeuner s’achevait, Cadia demanda à Cora :

- Veux-tu aller chercher ton frère ?

- J’y vais maman.

Le cœur chantant tous les hymnes de l’amour, Cora comme à son habitude pénétra sans frapper dans la chambre de Dean. Elle se figea instantanément et admira l’homme. Celui-ci sortait en effet de la douche, une serviette nouée autour des reins, le corps encore ruisselant de gouttelettes. Pour la première fois, Cora remarqua combien ses épaules étaient larges, son corps d’athlète contre lequel elle voudrait encore se blottir.

Le jeune homme lui aussi la regarda avec admiration. Aujourd’hui en effet, la jeune fille avait apporté un soin particulier à sa toilette. Elle avait opté pour une légère robe ovale qui révélait la finesse de son corps. De plus, un audacieux décolleté offrait une vue admirable de la naissance de ses seins au regard de Dean qui sentit aussitôt son corps réagir.

- Qu’est-ce que tu veux ? Et pourquoi n’as-tu pas frappé ? Désormais, apprends à frapper avant de franchir cette porte.

- Mais Dean, d’habitude…

- Je ne parle pas d’habitude. Et d’ailleurs, Qu’est-ce que tu fous ici ?

Désemparée, Cora sentit des larmes traîtresses lui brûler les yeux et s’enfuit en courant. Elle traversa le séjour où étaient installés ses parents et se rua au portail sans tenir compte de leurs interpellations. Abasourdie, Cadia se tourna vers son mari :

- Ali, qu’est-ce qu’elle a cette petite ? Il y a cinq minutes, elle était radieuse. Y comprends-tu quelque chose ?

- Non, mais Dean peut nous renseigner là-dessus. Regarde-le arriver, il n’a pas l’air en meilleur état lui non plus.

Cadia se tourna vers les marches de l’escalier et vit son fils les descendre, le visage fermé. Manifestement, il était de très mauvaise humeur.

- Qu’est-ce qui se passe encore entre vous deux ? Voulut-elle savoir.

- Il n’y a rien maman. Elle est juste en colère.

- Mais pourquoi ?

- Je n’en sais rien maman, répliqua Dean avec humeur. Je suis entrain de sortir.

- Tu ne déjeunes pas ?

- Non, je n’ai pas faim.

Une fois seule avec son mari, Cadia se plaignit :

- Tu y comprends quelque chose ?

- Non, pas plus que toi.

Cora installée sur la plage située à cinq minutes de la maison parentale, versait toutes les larmes de son corps. Elle ressentait dans son être une douleur jusque-là inconnue, qui à chaque instant s’intensifiait. L’océan, par vagues souples venait mouiller les pieds de la jeune fille qui y mêlait ses larmes. Lorsqu’elle prit la décision de rentrer, le soleil se confondait à l’horizon.

Péniblement, elle se prépara pour le dîner qui lui parut interminable car elle avait du mal à supporter la froideur que Dean affichait à son égard. Le dîner tirait déjà à sa fin lorsqu’il prit brusquement la parole :

- Je voudrais vous informer que je viens de fixer, avec Andréa, la date de notre mariage. C’est en juin, c’est à dire dans trois mois.

La réaction des trois personnes présentes fut très différente. Ali, fidèle à son habitude, prit la nouvelle avec flegme mais haussa un sourcil :

- Eh bien fiston ! Il était temps que tu sautes le pas.

Cadia quant à elle, écarquilla un instant les yeux avant de laisser éclater sa joie. Elle se leva de son siège et alla serrer son fils dans ses bras, les yeux déjà brillants de larmes d’émotion.

- Oh Dean, j’ai tant attendu ce moment ! Tu ne peux pas imaginer le bonheur que tu me donnes.

Dean sourit et entoura sa mère de ses bras. Instinctivement, ses yeux par-dessus la tête de celle-ci, rencontrèrent ceux de Cora qui se tenait immobile sur son siège. L’homme soutint quelques instants les yeux sans expression de la jeune fille, puis détourna le regard, gêné.

Toute à sa joie, Cadia ne remarqua pas le silence de sa fille, ni sa raideur.

- Eh bien Cora, viens donc féliciter ton frère ! Il se marie, n’est-ce pas merveilleux ?

Cora se leva et effleura de ses lèvres la joue de Dean qui se sentit frissonner.

- Félicitations Dean, murmura Cora du bout des lèvres avant d’ajouter, tu sais maman, il n’est pas vraiment mon frère.

Sans se préoccuper de la stupéfaction de ses parents, elle se précipita vers sa chambre où elle se jeta sur le lit.

- Je l’aime, Oh que je l’aime ! Psalmodiait la jeune fille à travers ses larmes.

 

Cadia comblée par le prochain mariage de son fils qu’elle voulait grandiose, s’absorba dans les préparatifs avec sa future bru. Dean avec amusement les laissa prendre toutes les décisions, ne donnant son avis que sur la robe de la mariée et sur le nombre d’invités.

Il vit très peu Cora durant cette période. Mais très souvent il se surprit à penser à elle. Une où deux fois, il eut la sensation d’avoir prit la mauvaise décision.

Cora quant à elle passa brillamment son baccalauréat un mois avant la date prévue pour le mariage. Elle comptait maintenant s’inscrire dans une école de stylisme. Pour elle, la mode était en effet une seconde nature. Cette réussite exacerba la joie de Cadia qui rayonnait. Un soir, revenue des courses en compagnie d’Andréa qui lui reprochait gentiment de trop s’épuiser, elle s’exclama fatiguée mais heureuse :

- Que ne ferais-je pas pour mes enfants, tant ils me comblent ? C’est le devoir d’une mère d’être aux côtés de ses enfants. Ne l’oublie jamais Andréa. Au-delà de tout, ton mari et tes enfants doivent être pour toi la seule véritable richesse.

- Je suis du même avis que vous. Je vous fais la promesse de tout faire afin de rendre Dean heureux.

Leurs yeux se rencontrèrent et elles se sourirent, complices. A cet instant, Cora pénétra dans la pièce où les deux femmes se rafraîchissaient.

- Bonsoir Cora. Je désirais justement te parler. Il est temps qu’on s’occupe de ton habillement pour le jour du mariage.

- Ne te fais donc pas du souci pour cela maman. Ma garde-robe est assez fournie.

- Il n’en est pas question Cora. C’est ton frère qui se marie et il te faut quelque chose de neuf. Ne me contredis surtout pas. N’ai-je pas raison Andréa ?

- Ta mère à raison Cora. Par ailleurs, je cherchais l’occasion pour te dire que je t’ai choisie comme une de mes demoiselles d’honneur.

A ces mots, Cora répliqua sèchement :

- D’accord pour la robe, mais je ne veux pas tenir ce rôle de demoiselle d’honneur.

- Mais pourquoi Cora ? Tu peux bien me faire ce plaisir !

- Non Andréa. Désolée.

Sur ces mots, elle s’éclipsa sous l’œil navré des deux femmes. Ce fut Cadia qui rompit le silence dans un soupir :

- Je dois t’avouer que quelques fois je ne comprends pas ce qui se passe dans la tête de cette petite. Excuse-la, je vais essayer de la convaincre plus tard.

- Je doute que cette tentative porte des fruits. J’ai tout essayé afin de me rapprocher d’elle, mais à chaque fois je me heurte à un mur de défense.

- Ce n’est pourtant pas dans ses habitudes. Je ne comprends pas cette attitude à ton égard.

- Oh moi je la comprends, c’est pour cela que je ne lui en veux pas. Elle est jalouse de moi car elle éprouve pour Dean de très forts sentiments.

- Oh oui ! Elle lui est très attachée. Mais ce n’est vraiment pas une raison pour refuser d’être ta demoiselle d’honneur. Après tout c’est son frère qui se marie.

- Excusez-moi mais je pense qu’elle est tout simplement amoureuse de Dean.

Choquée, Cadia fusilla son interlocutrice du regard.

- Quelles sottises ! Dean est son unique frère et ils ont toujours été très attachés l’un à l’autre. Même si ces derniers temps ils sont presque comme chien et chat, je ne vois pas…

Estomaquée, Cadia s’interrompit et à toute vitesse, des images défilèrent dans son esprit : Dean sortant et claquant la porte après une visite de Cora dans ses appartements, Cora jetant presque que Dean n’était pas son frère et surtout le regard enfiévré de Cora lorsque Dean était dans ses parages. Ses épaules s’affaissèrent comme si elle y portait tout le fardeau du monde.


Le Droit d'aimer