
124:Go slow
Write by Gioia
***Cédric Yafeu
Asamoah***
Croyant qu’elle
m’aurait poursuivi, j’ai verrouillé la porte pour ne pas me faire agresser à
domicile, mais étrangement elle est sagement assise sur un côté du lit et
fouine dans ce qui ressemble à son sac. Je zoome autant que possible sur elle
grâce à l’application reliée à la caméra installée dans ma chambre tout en me
préparant un sandwich. Après la journée massacrante que j’ai eue, on ne pouvait
pas m’offrir une meilleure distraction. On ne peut pas me dire que c’est un
humain équilibré qui est assis là. Il y a neuf jours de ça, elle a clos la
discussion sur notre futur bébé avec un « dans tes
rêves » quand je lui ai dit de
venir à la source. Pour l’inciter et la provoquer un petit peu, je lui avais
envoyé par courriel mon bilan de santé que je fais toujours en début d’année. Elle
n’a pas répondu et pendant neuf jours, je n’ai pas vu son front gigantesque qui
me rappelle les montagnes qui font la réputation du village de ma mère, Kwahu.
C’est également son insulte favorite que je lui ai balancée en fermant la
porte. C’est ce matin que je reçois un message me demandant si j’étais
disponible, parce qu’elle à de quoi me dire. Ça m’est sorti de la tête que
j’avais prévu l’appeler pour qu’on en parle de vive voix, donc imaginez ma
surprise quand je l’ai trouvé dans ma chambre, et il sonnera dans quelques
minutes 22 h.
Je finis mon sandwich
qui ne ressemble à rien et me concentre sur la bête dans son environnement pour
comprendre ce qu’elle trame. Elle ne fouine plus dans son sac, mais pour une
raison inconnue, ses deux mains sont derrière sa tête et elle a l’air de se
débattre. Le cerveau rempli de questions, je la vois renverser sa tête vers
l’avant, se tordre dans des positions intéressantes les mains toujours derrière
la tête. Elle hèle mon nom sur un ton désespéré et en cinq enjambées je la
retrouve devant la porte, l’air désarçonné.
– J’arrive pas à
respirer ! elle me dit sur un ton
si paniqué que je m’empresse de voir ce qu’elle me montre derrière sa tête.
– Attends,
laisse-moi faire, doucement, je tente de la rassurer et retire ses mains tout
en essayant de soulever la fermeture localisée au milieu de sa tête.
La foutue fermeture
aussi ne veut pas bouger. Elle semble coincée par quelque chose et comme si ce
n’est pas assez, elle panique davantage et me communique sa nervosité.
— Bouge pas OK,
je vais chercher un ciseau.
Elle acquiesce si
rapidement la tête qu’elle l’aurait fait tomber. Je récupère en vitesse le
nécessaire et reviens découper de chaque côté ce fichu latex. La façon dont
elle a bondi avec force et respirait comme un animal qu’on venait de libérer
après des heures pénibles à souffrir dans un piège m’a fait tomber au sol de
rire. Même le coup de pied qu’elle m’a flanqué avant d’aller s’enfermer dans ma
salle de bain n’a pas réussi à calmer mon fou rire. Je suis resté au sol, je ne
sais combien de temps. En me levant, j’avais des traces de larmes sur le visage
et les côtes crampées. Je ramasse son sac au sol, le dépose dans mon bureau et
me prépare dans une autre salle de bain. De retour dans ma chambre, j’éteins la
lumière et la minute suivante, la porte de la douche s’ouvre doucement. Elle
avance à pas feutrés, cherchant sans doute ses effets pendant que je compte
mentalement jusqu’à dix. Je l’attends sur le bord du lit.
– Où est mon sac ? elle m’interroge quand je suis à quatre.
– Ce n’était pas
mentionné quelque part que les masques en latex sont prohibés pour les
asthmatiques ?
– Je n’ai pas la
tête à rire. Où est mon sac ? Une
longue journée m’attend demain.
– Ma montre
n’affiche pas encore minuit. Selon le programme que tu m’as présenté, tu es
supposée être dans ce lit avec moi, à l’instant même.
– Yafeu je ne
suis pas d’humeur. Pour la dernière fois mon sac.
– Tu me demandes
à Minuit dans ce cas, je dis, croise les mains sous ma nuque.
Dans cinq, quatre,
trois, deux…., l’autre côté du lit s’affaisse au lieu de me marteler le corps
de coups comme je m’y attendais.
– Fais ce que tu
as à faire, elle se résigne.
– C’était quoi le
but de tout le cirque de ce soir ? Si tu
ne veux pas coucher avec moi, tu restes simplement chez toi. À quoi tu joues ?
– Je sais pas….,
j’y arrive pas, elle murmure d’une voix qui me dit sans aucun doute qu’elle est
au bord des larmes.
Je soupire, contourne
le lit et m’accroupis devant sa face qu’elle s’est empressée de cacher avec la
couverture. Je soupire à nouveau quand elle se met à renifler et m’assois par
terre, le temps qu’elle se calme.
– Je pensais y
arriver je t’assure, elle commence d’une faible voix. J’ai même regardé plein
de films X pour noyer les images dans mon esprit, mais j’arrivais pas à me
débarrasser de cette crainte. Je craignais de t’appeler par un autre nom durant
l’acte donc je me suis dit que si je rendais l’expérience aussi absurde que possible,
je n’y serais pas mentalement, donc aucun risque pour que je m’emporte et manque
de respect à tout le monde.
– Je suppose que
l’autre nom c’est celui de monsieur ?
– Oui, je suis
vraiment désolée. C’est que je n’ai pas d’expérience avec un autre en dehors de
lui…, sa phrase s’arrête là, noyée par les reniflements.
Décidément, ce type
est déterminé à éveiller ma jalousie que j’essaie de garder sous contrôle.
– C’est mieux que
je parte Cédric, j’ai déjà tout foiré, elle dit en se redressant d’un bon,
prête à prendre la fuite.
Je commence à cerner son
fonctionnement donc je me redresse également et l’enlace doucement. Son corps
se fige au début, ses bras restent le long de son corps, mais je suis rassuré
par le fait qu’elle n’ait pas sursauté vers l’arrière comme si je venais de la
brûler.
– On peut finir
cette conversation avant que tu ne tires tes conclusions ?
– Si tu veux,
elle murmure contre mon torse.
Je nous ramène au lit,
face contre face et nettoie une larme sur sa joue avec mon doigt.
– Pourquoi tu n’as
simplement pas commencé en me disant la vérité ?
– C’est
totalement normal de prévenir quelqu’un qu’on a encore un autre en tête hein,
elle dit sur un ton sarcastique.
– Il n’y a rien
de normal entre toi et moi.
– Bref…, c’est
juste gênant, elle avoue en baissant la tête. Je ne voulais pas blesser ton égo,
risquer que tu me disqualifies à cause de ça, ou pire que tu m’énerves en me disant
un truc déplacé. Je voulais que ça se fasse vite fait bien fait et qu’on passe
à autre chose.
– Je n’aurais
jamais performé. Je n’aime pas le sexe impersonnel.
– Tu veux me dire
que tu n’as jamais eu d’aventure quoi, je devrais croire ça ? Tu m’as toi-même raconté que c’est fini avec
ton ex depuis quatre ans et qu’aucune n’a pu te faire ressentir ce qu’elle a
réussi depuis là.
– Je n’ai justement
rien ressenti de gratifiant dans les aventures que j’ai eues après elle. C’était
médiocre tout au plus.
– Médiocre ? Pendant ce temps, une femme est couchée
quelque part et croit qu’elle t’avait bien retourné le cerveau, tu es mal
mauvais, elle m’accuse et me fait sourire.
– Si elle raconte
ça, c’est pour se consoler alors, parce que je n’étais pas fameux.
– Wow, tu admets
être un mauvais coup ? Après
toute la frime là ? Wonders we dey hear for this earth
oh.
– Regarde comment
ta voix s’est teintée de rire dès que tu as entendu un point négatif sur moi. Hater.
– Ohrr raconte-nous
bien, on veut savoir. Comment ça tu es un mauvais coup ? Les meufs ne se sont pas plaintes ? elle continue sur un ton très intéressé.
– Le film plein
de rebondissements que tu cherches là…
– Yafeu raconte la
chose….pardon ? elle murmure
sur la fin et j’en rigole.
– Je n’étais pas
mon meilleur dans ses aventures.
– Les détails svp ! C’est ça qu’on demande. Long comme une bonne
partie des films de Marvel, merci.
– Des escapades
rapides, rien chez moi. Presque rien au pieux. En voiture, à la sortie d’un
resto, la plage, rien que des endroits incongrus. Il m’est arrivé de ne même
pas jouir tellement je n’étais pas dedans. On a dû arrêter parce qu’elle était
fatiguée d’encaisser. Généralement en levrette, une position dont je ne suis
pas friand en général.
– Eh, un homme
qui n’aime pas la levrette ? La
suite.
– Kwasia.
– Toi-même.
Pardon, continue.
– Tu vois comment
on est là? Je le vois dans ton regard que tu es plus détendue qu’il y a une
heure. Tu attends juste que j’en lâche une pour me charrier toute la nuit. L’intimité
qu’on partage depuis quelques minutes, c’est un truc qui m’est important quand
je fais l’amour. J’ai besoin d’embrasser, de goûter tout ce que mes yeux désirent,
voir l’orage commencer dans le regard de ma partenaire avant qu’il s’abatte sur
elle.
Elle s’humecte furtivement
les lèvres tout en regardant un peu partout, sans me fixer. Je place un doigt
en bas de son menton, le relève et j’effleure sa bouche avec la mienne.
– Ta moustache
recouvre toute ta lèvre supérieure, elle commente le souffle court et la voix
légère.
– Tu es terrible
toi, je dis amusé. N’importe quoi, tant qu’elle n’adresse pas le vrai sujet.
À ma surprise, c’est
elle qui s’approche et m’effleure aussi la bouche.
– Et elle pique,
elle commente le souffle toujours court.
– Je suis un
homme velu, deal with it, je réplique encore avec humour.
– J’ai un peu envie,
je crois, mais je ne garantis rien concernant la suite.
– De quoi as-tu
envie ?
– De voir si ça pique
entre tes jambes aussi.
L’entrejambe en
question réagit à cette proposition étonnante. J’aurais cru qu’elle m’aurait
demandé de la toucher plus tôt. Avant qu’elle change d’avis ou que la
culpabilité se réveille subitement en elle, je me redresse et devant son regard
que j’espère avide, je fais tomber mon pyjama. Elle s’était assise au bord du
lit. Je suis tout près d’elle, la queue semi-dure.
– Tu arrives à me
voir malgré l’obscurité ou on allume ?
– On garde l’obscurité
s’il te plaît.
Parfois, elle fait
preuve d’une tendresse qui m’étonne, puisque ce n’est pas son habitude. L’entendre
m’avouer avec peine qu’elle s’inquiétait de faire n’importe quoi et blesser mon
égo m’a fait plaisir, je ne vais pas mentir. Ce n’est peut-être que de la gentillesse,
mais ça me conforte dans l’idée qu’un jour cette gentillesse peut devenir de l’affection
et pourquoi pas l’amour. Je veux aimer à nouveau et cette fois définitivement.
– Est-ce que c’est
impersonnel si je te touche maintenant ? elle me
demande et me ramène à l’instant présent.
– Seulement si tu
ne remets pas le masque de dominatrice.
– Seulement si je
ne remets pas ? elle
répète interloquée.
– Comme ça je
pourrais m’amuser avec les oreilles de chat dessus.
– Pfff ! elle réplique quand elle saisit enfin ma blague.
Je te signale que c’était le seul en magasin.
– Lol, parce que
tu l’as acheté récemment en plus ?
– Parce que j’allais
faire quoi avec un truc pareil dans mes effets ? Mes 5500 Khs partis en fumée et il
voulait même m’arracher les cheveux ce fichu masque, elle dit avec une pointe d’irritation
qui me fait fondre de rire.
– Une carrière de
bdsm courte, mais riche en émotions.
– Continue. Tu oublies
que tes boules sont proches de ma face, elle me menace d’abord et avant que je réponde,
sa bouche a englobé une boule, m’arrachant un léger grognement.
Une après l’autre,
elle suce avec intérêt chaque boule. Sa main sur mon manche est plutôt lente.
Elle ne fait que la promener de haut vers le bas. Toute la fête se déroule sur
mes noyaux. Je caresse sa tête et ses épaules, mais j’ai tellement envie de plus.
Dans mon esprit, je déchire ses vêtements, hume son corps et colle sa peau à la
mienne. Elle coupe mon fil d’idées en ajoutant sa seconde main sur mon membre.
– C’est avec ça
que tu as osé être médiocre ? elle
susurre tout en me branlant de la base à la tête.
– Fais-moi confiance,
je ne serais pas médiocre avec toi, je lui affirme d’une voix rauque.
Elle embrasse mon gland
et le taquine de la langue avant de fermer sa bouche dessus. Mon souffle ne perd
pas de seconde pour s’accélérer. Mon esprit se rappelle qu’elle avait fait deux
trous sur son haut, dévoilant ses tétons normalement. Sans réfléchir, je
descends ma main sur sa poitrine à la recherche de l’un et le trouve quand un long
frisson me traverse l’échine après qu’elle m’ait pris profondément dans sa
gorge. Ce long frisson me fait la pincer directement et elle tique l’espace d’une
seconde qui m’assaillit directement de doutes.
– Désolé, je dis.
Elle secoue la tête,
la bouche toujours pleine de moi et recommence à me sucer. Je suis excité, ému
et tellement emporté qu’elle arrive à me faire jouir sur sa tenue après
quelques minutes. Lorsqu’elle se débarrasse de sa tenue, je crois presque qu’on
y est arrivé, mais elle me ramène sur terre.
– Je peux avoir
un habit ? Ça me gêne de dormir nue
comme on…
– Pas de souci,
je dis et vais lui sortir l’essentiel.
Elle me remercie, l’enfile
et nous sommes de retour au lit.
– Je n’ai pas eu
d’idée cheloue quand je l’ai fait. J’étais vraiment excitée, elle m’avoue d’une
voix si soulagée que je suis à nouveau ému. Même si ce qu’on fait et vit
actuellement semblerait sordide à quelqu’un si on le racontait, je suis heureux
qu’elle m’ait laissé entrer dans son intimité. Je l’embrasse à nouveau et un
peu plus longtemps cette fois.
– Tu étais ou tu
es excitée ? je lui demande bouche
contre bouche.
Elle rit contre ma
bouche également.
– Je le suis,
mais je préfère ne pas aller plus loin.
– Qu’est-ce que
tu entends par plus loin ?
– Je ne pense pas
être prête pour faire l’amour comme tu le vois toi. Je veux dire, avec regard
plongeant, souffle qui se mélange, longs baisers et tout.
– à quel niveau tu
penses être mentalement ?
– Hum…
– Je ne veux pas
dormir sans te voir jouir. Si tu sais le faire, ça ne me dérange pas de te
regarder.
– Je….tu es
certain ? Ça te convient ?
– Absolument. L’essentiel
pour moi, c’est que tu prennes ton plaisir, la méthode m’importe peu.
– OK, je…, elle rigole
à nouveau. Je n’ai jamais fait ça en présence de quelqu’un, juste au téléphone.
– On maintient la
lumière éteinte alors. Fais comme ci je n’étais pas là. Je serais silencieux.
– Tu ne te moques
pas après hein.
Je ne réponds même
pas. Comme je suis silencieux, je lui presse seulement la partie du corps que
ma main trouve pour lui signifier ma coopération, ce qui me vaut un « hey » d’avertissement.
Mes yeux bien habitués à l’obscurité la voient se mettre à genoux après avoir
retiré le pyjama puis prendre un coussin.
– Je vais garder
ma culotte, mais peut-être que je vais ruiner ton coussin, elle avoue sur un
rire gêné à nouveau.
Je lui presse une autre
partie du corps qui me vaut un « bandit » et un petit coup sur la main. Elle bouge pendant
quelques minutes sur le coussin, cherchant probablement la meilleure position,
mais, une fois qu’elle l’a trouvé, le plaisir est mien avant d’être sien. Je
devais me moquer de quoi concrètement ? D’elle
qui se frotte avec tant de sensualité sur le coussin ? De ses petits gémissements aigus ? De la façon dont elle renverse sa tête en
arrière et qu’une de ses mains agrippe fermement un sein ? De la rapidité avec laquelle elle commence
enfin à se déhancher sur ce coussin ? Ou des
petits cris qu’elle émet maintenant qu’elle s’est penchée vers l’avant et me
laisse voir son postérieur fourni rebondir avec rage ? Qui devrait se moquer au juste ? Elle qui est si enivrante au sommet du
plaisir ou moi dont le cœur tambourine fort et la bite tressaute comme si c’est
sur elle qu’on se déchaînait ?
—Oh my God…., oh my…..,
oh….my…, elle récite sans cesse et se contracte avec force dans un soupir étiré
avant de s’écrouler les minutes suivantes, le souffle haché.
C’est officiel. C’est
du coussin désormais que je risque d’être jaloux.
***Jennifer « de retour dans la course » Bemba***
C’est en sifflotant
que je me suis levée le lendemain d’une merveilleuse journée. Pour célébrer ma
bonne humeur, j’ai préparé un copieux et majestueux petit déjeuner à ma famille
d’amour.
– On fête quelque
chose ? m’interroge Jérémie.
– Le bonheur mon
chéri.
– Eh bien. Tu as
quelque chose à nous annoncer ? m’interroge
ma tante.
– Je suis entourée
d’amour grâce à vous, je vous aime.
– Ah, c’est tout ?
– Toi alors, elle
ne peut pas nous aimer parce qu’on est de bons parents pour elle ? Qu’est-ce qu’il te faut de plus ? commente mon oncle qui se gave joyeusement.
– Hum, aimez-vous
alors, ma tante continue sur un ton suspicieux.
J’attendais que mon
oncle sorte pour ses activités avant de parler à ma tante, mais cette dernière
me trouve sans tarder dès que son mari est hors de la maison.
– J’espère que
ton changement n’est pas lié aux fréquentes visites de ce jeune homme qui riait
avec ton oncle dernièrement, elle commence sur un ton réprobateur.
– Quel jeune
homme ?
– Celui aux
oreilles pointues.
Sa description me fait
éclater de rire, parce que je le place de suite.
– Tu es grave
hein ma tante et non ce n’est pas de lui qu’il s’agit. Il souriait avec mon
oncle quand ça ?
– Hier il était
ici qu’il vient prendre de tes nouvelles parce qu’il ne t’a pas eu depuis deux
jours. C’est même qui ?
– Il s’appelle Bruce
Attipoe, un ami d’Eben, tu te souviens de mon ami avocat non ?
– Inhein ? Et ton ami te présente un homme quand tu es
une femme mariée parce que ?
– Doucement avec
le reproche ma tante, je dis amusée. Il ne me l’a pas présenté pour ce que tu
imagines. Ils sont rentrés ensemble et comme Eben fréquentait souvent le resto,
Bruce a commencé à y venir régulièrement aussi. Ce n’est qu’un bon client qui
se soucie de ma santé parce qu’il m’a conduit une fois à l’hôpital après un
malaise.
– Hum, il se soucie
un peu trop pour une femme mariée. J’espère que tu ne lui as pas parlé de tes
problèmes. Les hommes n’ont pas de morale comme nous. Même enceinte, je me
faisais draguer, donc ne baisse jamais la garde avec lui. On n’a pas fini de
régler ce que tu as déjà créé dans ton mariage pour que tu m’ajoutes du
travail.
– Sache que j’ai
officieusement que j’ai réglé ce que j’ai créé dans mon mariage, j’annonce
enfin n’y tenant plus.
– Han ? elle fait d’un air confus.
– Hier, j’ai
rencontré Romelio.
Son visage d’étonnement
me fait rire davantage.
– Comment ? Mais…, Seigneur, dis-moi tout !
– Regarde comment
tu trembles, je rigole tellement.
– Ne me fais pas
languir Jennifer ! Tu
sais depuis quand j’attends ce moment?
– OK, OK, alors c’est
assez simple hein. Il a demandé qu’on se rencontre pour discuter de nous. Bien
sûr, il ne venait pas avec de bons sentiments, mais j’ai parlé à son cœur comme
tu me l’as conseillé. J’ai reconnu mes torts, lui ai expliqué ce qui m’a emmené
là-bas. J’ai peut-être fait un peu la fille légère hein.
– Pardon, est-ce
qu’on fait la fille légère quand on parle de mariage. C’est ton mari. S’il veut
même lécher ton crachat, tu lui donnes il lèche.
On entend un bruit de
vomissement derrière nous. C’est Jérémie qui nous observe avec un regard de dégoût
et se fait chasser par sa maman. La scène m’amuse tellement que je tombe dans
le fauteuil en riant. Je suis heureuse, c’est fou comment je me sens légère. J’ai
tout joué hier et je ne fais que commencer. Il a laissé mes lèvres le toucher.
Je l’ai embrassé et il ne m’a pas repoussé. Ce n’était certes pas un baiser ardent
comme les nombreux qu’on a déjà échangés, mais il ne m’a pas repoussé ! J’ai vu le regard vacillant qu’il a coulé sur
moi quand je me suis rapprochée. On n’a pas couché ensemble parce qu’il a
demandé que je me rhabille pour qu’on finisse la conversation et honnêtement,
je n’étais pas prête à aller si loin. J’ai improvisé sur le coup quand il m’a sorti
sa menace débile d’engrosser Elikem. Je voulais confirmer ce à quoi mon cœur s’accroche
encore et c’est fait. C’est mon corps qui fait réagir Romelio. Ma poitrine, ma
voix, mes yeux. Je ne lui ai jamais reproché d’être attiré par Elikem, ça n’a
jamais été ma crainte. Ce que je lui ai toujours reproché, c’est de lui donner
trop d’attention et laisser cette dernière penser qu’être son ami c’est tout le
travail de sa vie. Romelio n’a que faire d’une femme qui a plus de front que de
seins. Je n’ai même jamais su ce que son Ray lui trouvait en dehors de ses fesses
peut-être, bref, revenons à mon bonheur. Après un tendre baiser, j’ai remis ma
tenue parce qu’il ne faut pas gâcher cette chance non plus. Je suis loin de
croire que tout est gagné d’avance et le brusquer le jour là aurait créé le contraire.
J’ai même joué la carte de la gêne et me suis excusée de mon comportement
éhonté tout en descendant rapidement de la voiture, pour qu’il ne pense pas
aussi que je suis désespérée.
– Continue ! me relance ma tante qui est de retour après
avoir grondé le pauvre Jérémie.
– Bah on a parlé
de nous et vers la fin, il était moins en colère qu’au début.
– Très bien ma
chérie ! Très bien ! Oh viens que je t’embrasse ma petite fille ! Ceux qui ont voulu se réjouir sur toi essuieront
la plus grande honte !
– Amen ! Je dis en me laissant embrasser.
Elle danse tellement
que son pagne manque de tomber et se redresse avant de m’embrasser à nouveau.
– On fait même
quoi ici ? Commençons à ranger tes
affaires non. Il vient te chercher quand ?
– Kieee tu es
pressée de me jeter à ce point ?
– Oui ! Une vieille de 34 ans vit chez son mari.
En plus ton oncle prend trop de poids depuis que tu es ici, elle dit en riant
comme moi.
– Tu vas souffrir
de voir mon oncle profiter encore un peu. Il ne m’a pas donné de date pour le
retour à la maison. Il veut parler à ses parents d’abord.
– Voilà un homme
sensé ! Chacun doit connaître sa
place avant que tu ne retournes là-bas.
– Effectivement.
– Et l’affaire de
l’enfant ? Vous avez discuté de ça
aussi ?
– Tes prières
sont tellement efficaces ma tante. Apparemment la mère de l’enfant la néglige,
donc je vais m’en occuper.
– Tu vois ? Tu vois comment tu as perdu du temps pour
rien. Si ça se trouve, il te cachait l’histoire parce qu’il essayait de
récupérer l’enfant pour la ramener chez vous.
– L’essentiel, c’est
qu’on soit ensemble en famille.
– Tu as raison, doucement,
tu y arriveras, elle dit et reprend une autre danse heureuse.
Cette version
édulcorée est bonne pour elle. Je ne veux plus mettre la charrue avant les bœufs.
Le petit lien que je construis avec Hadassah restera entre nous jusqu’à ce que Romelio
m’ouvre totalement son cœur. Je veux qu’il entende de la petite combien je l’ai
traité avec affection et puisqu’il ne l’a pas encore soulevé, je suppose qu’elle
ne lui a rien dit. Sinon je n’ai pas menti. Romelio m’a bel et bien dit qu’il
devait parler à sa famille. Après la fuite, je lui ai écrit un message tout aussi
émouvant que mes mots quand nous étions dans sa voiture. Je me suis à nouveau
excusée pour mes erreurs et mon comportement de la journée, tout en réitérant mon
petit désir, une dernière chance de lui prouver mon amour. Il a non seulement répondu,
mais il l’a fait sur mon numéro bien que je lui aie écrit avec celui de Khaya
que j’ai basiquement réquisitionné. Il a répondu sur un numéro qu’il avait
bloqué, signe que j’ai passé un cap et un grand ! Je suis débloquée ! Je suis de retour dans la place !
Si Yasmine m’annonce que
cette pimbêche d’Océane se fait enfin défoncer par notre poulain, je risque de pleurer
de joie, mais elle est silencieuse depuis deux voire trois jours. Je vais donc
aux nouvelles, comme j’ai pris cette journée off.
– C’est comment ? je lui envoie par message.
– Coucou ma chérie,
ça va et toi ? elle répond
automatiquement.
– Donne-moi des nouvelles
intéressantes et ça ira.
– On fait les
courses avec Paulin actuellement.
Paulin c’est même son
nom hein lol.
– Super ! Il faut lui acheter beaucoup de couleurs
sombres et des hauts qui serrent bien ses bras.
– Lol, on dirait
que tu l’habilles pour toi.
– Pardon, tu as
vu sa face là ?
– On fait quoi de
la face d’un homme ? Ce qu’il
a dans le pantalon et les poches, c’est ça l’essentiel. La beauté c’est pour la
femme.
– Parle pour vous
hein. Un homme beau, plein dans le pantalon comme dans les poches, c’est ça la
base et ce que j’ai.
– Excusez-nous
oh, elle envoie suivi de plusieurs smileys qui rient aux larmes.
– En tout cas, j’espère
que ta théorie est vraie. Il lui en faut dans le jean pour bien traumatiser la
belle-fille de ta sœur. Vous êtes déjà allés chez ton type en question pour « ce qui n’est pas l’envoûtement » ?
Elle m’envoie un
smiley exaspéré d’abord.
– Ce n’est pas l’envoûtement
Jen, dans quelle langue dois-je te le dire ?
– Mais ce n’est
pas ça que j’ai dit ? Bref,
alors ?
– J’ai déjà pris
rendez-vous.
Carrément sur rendez-vous
lol.
– Il faut que j’y
aille en semaine, sinon en soirée et week-end, George est sur mon dos.
Et c’est parti pour
une série ennuyante de plaintes sur George. Quand je pense que les deux ont triché
dans le dos de Marianne pour une histoire aussi barbante, tu aurais cru qu’ils
allaient être les plus heureux au monde. Le karma ne rate personne en tout cas.
***Elikem Akueson***
Même dans mes rêves
les plus fous, je ne m’attendais pas à tomber sur quelqu’un avec qui je serais
à l’aise d’exposer toutes mes pensées. Je me voyais ne plus être folle
amoureuse de Ray avant de me remettre éventuellement en couple. Je m’étais même
projeté un plan qui me plaisait vraiment. Rencontrer à 40 ans un homme divorcé
ou veuf qui aurait déjà des enfants ados ou grands peu importe, tandis que j’aurais
mon adolescent. Je comptais lui dédier ainsi qu’à ma carrière ma trentaine. J’aurais
adopté un enfant de quatre ou cinq ans, c’est tout ce que je passais mon temps
à écrire dans mon carnet, une habitude qui m’apporte beaucoup de réconfort. Mon
divorcé ou veuf et moi aurions éduqué nos enfants ensemble et fini nos vieux jours
dans la paix. C’était l’essentiel de mes rêves ça, mais ce que je vis
actuellement, c’est tout aussi bien. C’est incertain, un peu étrange quand je
veux trop y penser, mais je me sens bien. Notre journée riche en rebondissements
remonte à deux jours. Je suis coincée au travail où on m’a menti. Le manager m’a
dit qu’on commencerait doucement pour mon premier mois. On n’était supposé que
m’assigner trois patients récurrents au début, mais je viens juste de finir
avec ma quatrième. Une petite fille de six ans, atteinte du syndrome de Cushing
qui a fait paniquer son papa par une succession de vomissements et difficultés
respiratoires. L’équipe de nuit m’a contacté à la rescousse à 3 h du mat à
la recommandation du pédiatre en chef, va savoir pourquoi quand je n’ai aucune
compétence en endocrinologie. Après mes longues vacances, j’ai perdu l’habitude
des « on call », mais bon c’est ma période de baptême et pour
l’instant, j’ai le temps de souffler un peu. Ils n’ont pas de pédiatre
endocrinologue dans l’équipe, mais j’ai trouvé un endocrinologue régulier pour
m’assister. On attend les résultats des examens prescrits.
Monsieur « Ya le feu », le
nom que j’ai assigné à son numéro, ne réponds presque jamais à ses messages,
donc ce n’est pas la peine de le texter, même si j’ai envie de l’embêter.
Monsieur est le typique CEO. Réunions sur réunions, quand il commence sa
journée, il ne lève la tête qu’en sortant de son office. Figurez-vous qu’il s’est
même loué un local comme office ici, parce que son esprit n’est pas disposé à performer
quand il est à la maison. Plus les jours passent, plus il m’intrigue. J’en sais
pas mal sur lui, mais j’ai la sensation qu’il reste tant de choses à découvrir.
Je vais gêner les deux qui n’ont pas le choix que de me supporter. Océane en
premier et Romelio par la suite.
– Même pas de bonjour
hein sauvageonne. C’est directement, « les
réconciliations avec le beau en sont où ? ». C’est pas toi, c’est moi, elle me répond.
– On dirait que
ça t’énerve d’avoir quelqu’un sur ton dos quand tu n’as pas envie de faire
quelque chose hein.
– Pfff, comme j’ai
dit ce n’est vraiment pas toi. Tu as déjà lu l’article qu’on a fait sur moi ?
– Arrête de me déconcentrer
Annie. L’article n’est pas encore sorti et je ne vais même pas le lire tant que
tu ne m’as pas emmené la preuve dans mon portable montrant ta réconciliation
avec le beau.
– LOL, tu es
conne hein. « Emmener
la preuve dans mon portable » c’est
pas une expression de la grand-mère internationale ça ?
– Qui peut
demander qu’on lui emmène dans son portable si ce n’est pas elle, je rigole en
écrivant.
L’endocrinologue me
fait appeler d’urgence et le reste de la journée défile si vite que je ne
souffle qu’une fois hors de la clinique. Océane a répondu. Maman m’a envoyé son
habituel « je pense à toi ma petite
chérie ». Cédric m’a appelé, mais
rien de Romelio. J’appelle d’abord Cédric qui me garde au téléphone jusqu’à la
maison. Pourquoi je trouve le même Cédric nonchalamment adossé à ma porte quand
j’arrive à mon étage ?
– Ne panique pas,
il commence sur un ton sérieux qui me fait hausser un sourcil. Thema n’est pas
de nature bavarde normalement. J’ignore comment je n’ai pas fait le lien. Il
paraît qu’un de tes cousins a le béguin pour toi, chose qui l’a tellement
énervé qu’elle s’est disputée avec lui.
– Quoi ? De quoi tu parles ? je l’interroge confuse.
– Asad, c’est son
nom. Apparemment il aurait dit qu’il compte te confesser ses sentiments quand
il sera majeur.
– HEIN ? je m’étonne et éclate de rire. Attends, ce n’est
pas une blague ?
– Aucune idée, à
toi de me le dire. En tout cas, il a réussi à convaincre Thema de ça et en
colère, elle a raconté à notre mère que quelqu’un voulait me voler ma fiancée.
Je ris de plus belle
et me fige subitement.
– Fian…., je
commence le cœur battant à tout casser.
– Tu as ma
parole, je n’ai rien dit. C’est l’alliance de….
– Ray…, elle a vu
l’alliance de Ray et comme on était collé pendant le mariage, elle a conclu….oh
mon Dieu, oh mon Dieu.
– Elikem, ne….
J’ignore ce qu’il dit par
la suite tant mes oreilles bourdonnent et je passe par toutes les émotions. Qu’est-ce
que j’ai fait ?
– Hey, j’entends
sa voix grave dire tout près et ses mains sont sur mes épaules. C’est un
malentendu d’accord ? Ça
peut arriver à n’importe qui. Ça ne veut pas dire que tu as gaffé. Et je suis
désolé de l’annoncer si brutalement, mais ma mère est déjà ici, à Nairobi, pour
te voir. Pour le moment, je ne l’ai pas encore eu. Je vais m’efforcer de garder
la situation sous contrôle, mais….comment dire, ma mère est un peu excessive et
imprévisible.
Mes jambes vacillent,
je me sens perdre de l’énergie. Dans quoi, je me suis embarquée ? Qu’est-ce que ça dit de moi ? Qu’est-ce que je fous de ma vie ?