143: our pride and joy deep inside

Write by Gioia

***Cédric Yafeu Asamoah***

Couché avec l’intention de me reposer après une matinée éreintante, je me fais réveiller par Elikem pour des trivialités.

— Bleu ou noir velours? elle me demande en soulevant deux de mes costumes.

— Dans quelle langue dois-je te dire que je n’ai pas envie d’y aller?

— Dans la même langue qu’a utilisée ta responsable des relations publiques pour t’expliquer que tu n’as pas le choix. Bleu ou noir velours? J’ai à faire donc, dépêche-toi.

— Je n’irai pas, j’insiste agacé.

— Tu as raison, c’est plus facile de trouver une tenue assortie au noir velours, elle réplique satisfaite et retourne vers ses deux valises défaites au sol tout en poussant la chansonnette.

Nominé aux TEA awards (The entrepreneur Africa Awards), je suis supposé m’y rendre cette fois parce qu’à la dernière minute, mon responsable des relations publiques chargé de me représenter dans ce genre de cérémonies s’est désisté pour raisons familiales.

— Je ne vois pas l’utilité d’y aller quand on sait que je ne vais rien gagner. Ce sont des Nigérians qui organisent cette cérémonie et ils dominent majoritairement dans les victoires avec un 3 % pour les autres, j’essaie de lui expliquer espérant qu’elle calme ses ardeurs.

— On t’a nominé dans cinq catégories Yafeu. Tu vas y aller et célébrer la reconnaissance qu’on accorde à ta compagnie déjà parce que tout le monde n’a pas eu la chance de passer par le tamis.

— Dois-je te rappeler qu’il te reste à peine 36 h de repos avant de retourner à tes patients?

— Je dis monsieur, ce sont tes 36 h?

— Tu crois pouvoir te taper cinq heures de vol, arriver à Lagos, chercher une tenue, assister à une cérémonie de trois heures voire plus, refaire ce tralala et être en forme au travail en 36 h? Tu te prends pour qui?

— Je me prrrrrrends pour ce que je suis mon cher, et je t’annonce déjà que le shopping à Lagos ne sera pas nécessaire. Quand tu as des gens qui se marient sans cesse dans ta vie, les robes de cocktail ne manquent pas dans ton armoire, elle rigole triomphalement après avoir étalé trois tenues sur le lit.

— Tu connais la femme qu’on appelle Belle? Je suis sa fille, ne nous néglige pas, comment ça! elle s’exclame et rigole à nouveau comme si elle venait de gagner je ne sais quoi.

Comprenant qu’on l’a perdu, je ne me fatigue plus. La minute d’après, elle est en appel avec son amie qui lui donne non seulement son opinion sur les choix, mais mentionne aussi ce qu’elle devrait porter comme bijoux. Des boucles prises à Paris dix ans plus tôt ainsi que l’huile dorée qu’on lui a offerte pour ses 28 ans parce qu’elle se mélange bien au parfum Guerlain Shalimar, rien que des suggestions qui me laissent bouche bée. J’ignore ce qui me choque le plus entre l’huile qu’elle a depuis 28 ans et le fait que quelqu’un se rappelle de boucles d’une autre depuis dix ans. Les femmes sont surprenantes.

— Maman Théodore on est bon, elle déclare fièrement après avoir déposé les boucles, le sac et les chaussures sur la robe choisie comme lui a demandé son amie.

— Imbécile, toi-même Théodore, se marre son amie.

— Le papa de Théodore n’a pas interdit les gros mots autour de son dauphin?

— Mais tu es malade hein. Dauphin carrément?

— Je te dis toujours que ce n’est pas n’importe qui tu as entre tes mains. Le nom du dauphin Ezer Théodoros Tountian Ajavon premier de sa lignée retentira dans diverses contrées et par les mers.

— Les bénédictions de la tante sont si lourdes que je crains même de dire amen, elle se marre. En tout cas, représente-nous bien là-bas et félicitations à notre oncle CEO pour ses accomplissements. La famille Tountian est de tout cœur avec lui.

— Mr le pessimiste, tu entends?

— Tcho! Elikem la personne est là et tu ne me dis pas de contrôler ma bouche?

— Tu ne peux rien dire qui dépasse mon niveau, elle répond amusé et me demande par un signe si je veux parler à son amie.

Je hoche la tête et prends le téléphone. Son mari apparaît avec le petit pendant qu’on se parle donc j’en profite pour lui dire également bonjour. C’est drôle quand on y pense. Il y a moins de six mois, je prenais l’avion prêt à faire de la vie de sa sœur un enfer si elle portait mon enfant. Nous aurions pu devenir ennemis jurés lui et moi, mais il a gagné mon estime par la façon dont il a géré l’histoire de sa sœur. C’est lui qui avait suggéré que sa sœur clarifie la situation par vidéo pour qu’Elikem entende la vérité de sa voix plutôt que ça vienne de moi. On se laisse assez vite parce qu’Ezer demande leur attention.

Trois heures plus tard, nous sommes prêts. Marley est en chemin pour venir nous conduire à l’aéroport.

— Mets ton business plan sur une clé comme ça tu pourras le relire le temps qu’on arrive à Lagos, je lui rappelle. 

— Mon business plan sur une clé? elle me questionne d’un regard dubitatif.

— Les cérémonies comme celles-là sont des opportunités pour rencontrer de potentiels investisseurs, partenaires et mentors. Assure-toi de t’inclure ta future clinique dès qu’on te demandera ce que tu fais ce soir.

— Non mais attends, de quoi tu me parles? Je n’ai que des prémices, on ne peut même pas parler de business plan.

— Tu n’as pas forcément besoin d’un plan détaillé. La majorité des investisseurs savent que les chiffres énoncés ne sont que des estimations vu que les charges sont des données qui fluctuent dans le temps. Il te suffit de mettre un accent sur la vision et les objectifs de ton idée ainsi que le marché ciblé.

— Mais…et c’est à quelques minutes du départ que tu me l’annonces?

— On sera dans les airs pendant un peu plus de cinq heures et il nous restera deux heures avant la cérémonie. Pourquoi tu paniques comme si on te demandait de composer un difficile examen dans les minutes suivantes?

— Tu sais quoi, tu es tellement soûlant quand tu t’y mets!

C’est ainsi qu’elle se fâche et le reste durant le vol au point de repousser ma main quand je la pose sur son genou. Est-elle déjà enceinte? Si oui, je serais le grand gagnant de la cérémonie.

De MMIA (l’aéroport) on s’engouffre dans un taxi en direction de l’appartement d’Eko Atlantic réservé par mon PA.

— On va rester fâchés? je lui demande pendant que l’ascenseur nous conduit à l’étage où se trouve notre appartement.

— Tu m’as entendu dire que je suis fâchée?

— Fatigante, je murmure quand l’ascenseur s’ouvre. L’embouteillage est monstrueux sur certaines routes de Lagos donc essaie d’être prête en max une heure, je lui lance avant que chacun s’engouffre dans les différentes salles de bain.

En 45 minutes je suis prêt. Je me donnais un coup de peigne quand son parfum favori m’a attiré vers la chambre d’où elle est sortie, splendide dans cette robe longue drapée orange qui souligne ses courbes affriolantes.

— Je suis à l’heure? elle demande un peu inquiète.

Je m’avance et du pouce j’efface la partie de son gloss qui déborde légèrement sur sa lèvre inférieure.

— Pile à l’heure, tu es ravissante.

Elle lisse de ses mains les revers de mon blazer, et me sort un pep talk inattendu.

— Que tu gagnes ou perdes, tu es déjà un conquérant! C’est ton travail qui t’a conduit ici, tu mérites d’y être et des nominations tu en recevras encore parce que ton équipe et toi travaillez d’arrache-pied pour nous fournir de l’équipement médical performant. Je suis fière de toi Yafeu.

— Tu me suivras pour récupérer les prix si je l’emporte, je lui annonce touché par sa reconnaissance.

— Mais oui bien sûr, j’ai mérité le podium aussi n’est-ce pas, elle rigole.

Bras à sa taille, nous descendons dès que notre chauffeur de la soirée me prévient de son arrivée.

La salle est à moitié remplie à notre arrivée à l’hôtel Oriental. Nous avons encore du temps d’ici le début de la soirée donc je la conduis vers des visages familiers pour des présentations et un peu de networking. Je la laisse mener les échanges et n’interviens que lorsque je la sens douter, mélanger ses mots ou considère qu’elle a omis des détails pertinents comme je connais les besoins médicaux de la population ghanéenne.

— Alors? Je me suis pas mal débrouillée pour quelqu’un qui s’est préparé en plein vol non? elle m’interroge sur un ton faussement confiant.

J’embrasse son front et passe le bras autour de son épaule.

— Tu te débrouilles toujours comme un chef.

Elle avance sa face donc je baisse la tête, croyant qu’elle veut m’embrasser, mais c’est une menace qui sort.

— Merci pour le coup de main, mais sache que ce chef fera pleuvoir des coups sur ta tête au point de te rendre chauve la prochaine fois que tu me mets devant le fait accompli. 

— OK boss, je dis amusé et pince sa lèvre inférieure pendant qu’on arrive à notre table.

Une heure plus tard, je suis surpris d’être encore là et d’apprécier la soirée. En général j’aurais commencé à me faire chier dès la fin du discours d’ouverture et trouvé une opportunité pour disparaître dès l’annonce des premières catégories, mais l’excitation d’Elikem est contagieuse. Elle ressemble à un enfant dans une boutique de jouets depuis qu’on liste les accomplissements des différents nominés. Quand je n’ai pas réponse aux questions qu’elle me pose sur eux, elle prend en note leurs noms sur son téléphone pour supposément les chercher après sur internet.

— C’est une connaissance, je chuchote à son oreille quand on désigne l’un de mes poulains parmi les lauréats de la catégorie « Top 10 Startups of the year ».

— Prépare-toi tu es le prochain! elle me déclare avec force tout en applaudissant avec vigueur comme si c’était ce qui allait faire pencher les choses en notre faveur.

Je hoche la tête, l’air amusé sans rien ajouter. Ne brisons pas ses rêves d’enfant.

Enfin arrive la première catégorie dans laquelle nous sommes retenus. Elle dégaine son téléphone comme une arme. On liste les faits saillants de Nyameba BME, les fellowships et awards à notre actif. Sans surprise, le prix passe à un autre.

— C’est rien Ceydoux, positive attitude hein, elle m’annonce directement.

Je hoche simplement la tête.

Seconde catégorie, elle continue à filmer. Le prix va à un autre.

— C’est cube maggi qui fait pub sinon sel est serein, elle m’adresse à nouveau.

— C’est toi qui connais, je confirme pince-sans-rire.

Trop occupée par son téléphone qu’elle bouge pour filmer, elle n’adresse même pas mon ironie.

Place à la troisième catégorie, « Global-standard company of the year», je me demande s’il faut lui expliquer qu’elle peut reposer son pauvre bras quand elle se lève brusquement et me regarde avec les yeux les plus ronds au monde.

— Ton té…., je commence, mais m’arrête parce que certains aussi me regardent avec des sourires triomphateurs.

— Nyameba BME? j’entends du micro.

Elle tire sur ma main pour que je me lève. Confus, j’avance vers le podium, mais je continue à m’interroger. On a remporté le prix? La présentatrice me remet le trophée tandis que son coprésentateur s’écarte pour que je me place devant le pupitre.

— Je m’excu.., sorry je me corrige sur un rire nerveux comprenant que j’ai parlé en français, my apologies, I wasn’t expecting it.

Quelques rires emplissent la salle. Elikem est la première que mes yeux croisent. Elle est toujours debout. Un pouce en l’air et son autre main tient le téléphone braqué sur moi. Son sourire est si immense que j’oublie le public et rigole avant de formuler un discours rapide.

Je finis la cérémonie avec deux trophées en main. En plus du « global-standard company of the year», j’ai personnellement reçu le «business coach of the year» et je continue à contempler d’un air incrédule les récompenses dans mes mains. Le troisième trophée, le plus important, joue au photographe parmi les professionnels. Tantôt elle prend des poses dangereuses, tantôt elle m’indique des gestes à faire pour ses photos personnelles. Ce qui me tue c’est qu’elle ne remarque même pas combien elle agace les professionnels.

***Elikem Akueson***

« Je ne vais pas gagner, au lieu de te reposer pendant tes 36 h tu préfères te rendre à une cérémonie où on perdra du temps ». Pfff, je lui aurais donné un coup à la tête si je n’étais pas si euphorique. Je suis même surprise qu’il se prête à la longue séance photos, mais il finit par me faire signe de m’approcher. Je chuchote à sa mère que je vais devoir arrêter la vidéo.

—Honey, you did more than enough. Go enjoy your night and we will talk later.

(Ma chérie, tu en as fait plus qu’assez. Va profiter de ta soirée et on se reparle plus tard.)

—Yes thank you my dear, ajoute son père.

Je hoche la tête et coupe avant que leur fils ne s’impatiente. Il me donne un trophée et m’attrape par la hanche pour me coller à lui.

— Tu m’as contaminé avec ta bonne étoile, il ironise.

— C’est la grâce de mon prénom. Tu veux rester après les photos ou on…

— Je t’emmène quelque part, il me coupe et m’embrasse furtivement sur la bouche.

Tout juste après les photos, on fait un dernier tour pour féliciter certains et direction la sortie pendant que je l’interroge sur l’endroit où on se rend.

— Tu verras bien.

— Mais donne des indices, on sera en public ou seuls?

— Tu veux faire…

— Cédric Asamoah? on entend d’une voix masculine.

Nous levons la tête et je sens que Cédric se raidit contre moi.

— Mr Meledje, bonsoir.

— Bonsoir et toutes mes félicitations, lui dit cet homme qui semble avoir l’âge de mon papa Eli.

Meledje c’est le nom de Bérénice. Je suppose donc qu’il s’agit de son père?

— Tu peux m’accorder une minute s’il te plaît? Puis-je? il s’adresse à moi pour la seconde question.

— J’ai rappelé notre chauffeur avant la séance photo donc il doit être probablement là. Tu peux m’attendre dehors? me propose Cédric.

— OK, j’accepte à contrecœur.

Les voitures sont disposées en file devant l’hôtel. Je trouve facilement notre chauffeur, mais je suis tellement assaillie de questions que je l’attends dehors au lieu de m’installer. Il me rejoint sans trop traîner, mais paraît songeur.

Comme nous sommes dans la dernière rangée d’une Escalade V, je considère que le chauffeur est assez éloigné pour qu’on puisse avoir une conversation privée.

— Je peux savoir ce qui se passe ou tu ne veux pas en parler? je l’interroge après de longues minutes silencieuses.

— Bérénice a disparu de la circulation et comme son père, invité aussi à la cérémonie, m’a vu récupérer le prix, il a cherché à me voir espérant que je l’aide à la retrouver.

— Pourquoi il se tourne vers toi pour la retrouver? Il vous pense toujours ensemble?

— Non, il sait que je la faisais suivre.

— Tu la faisais suivre? je demande étonnée.

— Mesure de précaution depuis qu’on a reçu des menaces quand nous vivions à Pretoria. Je te fais suivre aussi lorsque je ne suis pas à Nairobi.

— Yafeu, je m’exclame choquée. Comment ça tu me fais suivre sans mon consentement?

— Mesure de précaution, il répète comme si c’était une raison valide.

Il y a plus important pour l’instant donc je laisse couler.

— Alors? Tu fais comment pour Bérénice? Celui qui la suivait…

— Le détective, il clarifie. J’ai essayé de le joindre sans succès. Généralement, il me fait un rapport aux deux semaines quand il n’y a rien d’alarmant.

— Il est tard à Nairobi, il doit dormir. Qu’est-ce qu’on fait? je m’interroge embêtée. Tu as essayé d’appeler Bérénice?

— Non.

— Mais voyons, c’est la première chose à faire. Peut-être qu’elle était hors service quand son père…

— Il n’aurait jamais osé l’appeler. Je doute qu’il connaisse son numéro et même si…, bref ce n’est pas l’amour fou entre eux.

— Dans ce cas, tiens, je dis et lui présente mon téléphone. Avec un peu de chance, elle prendra puisque c’est un numéro inconnu. Allez! je dis et pousse le téléphone dans sa main. Il n’y a pas une minute à perdre. Peut-être qu’elle est malade ou je sais pas moi, elle a besoin d’assistance?

Il compose le numéro et porte le téléphone à son oreille tout en observant curieusement.

— Tu peux rejoindre son père quand elle répondra? Ça le soulagera probablement d’entendre sa voix.

— Tu es….allô? Bérénice? il dit surpris, qu’elle ait répondue.

Je suis tellement soulagée que j’en respire bruyamment, mais ce n’est que de courte durée. Yafeu se met à savonner si brutalement Bérénice que j’en suis muette d’étonnement. On croirait un frère avec sa sœur.

— Ose raccrocher et tu verras, il lui dit d’un ton menaçant tout en descendant et me dit par un signe de le suivre.

Ma présence est nécessaire? C’est la question que je me pose, mais je le suis malgré tout. Il passe l’appel en HP et comme je m’y attendais, le papa a l’air si soulagé que son regard devient mouillé. Yafeu finit l’appel avec une menace qui me fait sourire de gêne à cause de la présence du papa.

— Elle a besoin de vous, il lance soudainement sur un ton accusateur à l’endroit du père.

— Je sais, mais…

— Il n’y a pas de mais qui tienne Ferdinand, il l’interrompt rudement. Ce n’est pas tout de suivre sa vie à distance et forcer des relations avec son entourage. Prenez le taureau par les cornes.  

— Tu as raison, il approuve d’un air brisé.

Je me retire tout doucement pour ne pas ajouter à son embarras. Yafeu me retrouve quand je m’engouffre dans l’escalade.

— Juste pour qu’on soit clair, je ne suis plus amoureux de Bérénice, il commence après avoir dit au chauffeur de démarrer. Tu n’as pas à t’inquiéter.

— Je ne suis pas inquiète.

— C’est vrai ce mensonge? il demande avec un air moqueur.

— Je peux te reprocher beaucoup, mais pas la perfidie. C’est bien toi qui m’as dit l’an dernier que vous aviez vécu une histoire profonde et qu’elle appartient au passé non? Pourquoi dois-je m’inquiéter maintenant?

La voiture s’arrête avant qu’il n’ait le temps de répondre.

— Qu’est-ce qui se passe? Why are we stopping? je demande à l’endroit du chauffeur.

— Viens, répond Yafeu. On rentre par bateau.

— Comment ça on rentre par bateau?

— Le terminal là où tu vois les quelques traversiers s’appelle Five Cowries Creek. C’est assez loin, tu arrives à les distinguer? Il m’interroge, main au-dessus de ses sourcils comme s’il essayait de rendre sa vision plus précise.

— Attends, pardon, attends, tu as aussi un bateau? je demande prise de court.

— Non, j’ai demandé à mon cousin de me prêter celui de sa femme. On va traverser la lagune de Lagos jusqu’à la marina d’Eko Atlantic.

— Tchaiii, ton cousin a une femme qui a un bateau?

— Un petit yacht si tu préfères.

— Quand demandes-tu à ton cousin un petit yacht alors que ce matin, tu luttais par tous les moyens pour zapper ce voyage?

— Dans l’avion quand tu boudais. Yeah we will be fine now, thanks, il s’adresse au chauffeur qui venait de lui demander si nous savions comment nous retrouver.

C’est ainsi qu’on longe le pont qui mène au terminal en question et mes pieds touchent ce que monsieur désigne « un petit yacht » pour la première fois de ma vie. On rencontre le timonier, enfin…, je suppose, je ne sais même pas si c’est le bon nom pour celui qui tient la barre, mais bref, c’est lui qui nous accueille et nous fait faire le tour avant de nous laisser.

— Il y a petit dans petit hein Monsieur, je commente subjuguée par l’intérieur.

Il y a un lit, une sorte de salon et même un coin cuisine, pourtant de l’extérieur on ne s’attend pas à trouver autant. Ou c’est mon ignorance qui parle, je ne sais même pas. Le timonier…bref, le monsieur qui mène la barre revient nous avertir qu’il est prêt dès qu’on l’est.

— Rejoins-moi à l’avant dans une dizaine de minutes, pas moins que ça, il me dit et s’en va après un bisou sur le front.

Cet homme va finir par me rendre folle avec son amour pour les décisions de dernière minute. Dire que j’avais prévu l’inciter à faire une petite virée en club ou un endroit festif, histoire de faire pleuvoir les billets sur lui. J’ai même pris mon Chanel 2.55 pour y enfouir la liasse de coupures de 500 Khs dans tellement j’étais confiante qu’il remporterait au moins un trophée. Bref, je sors la robe que je devais porter pour le club et l’enfile maintenant.

— Ouais mes achats vraiment, je dis tout haut, mitigée devant la fente de l’enfer sur le côté de la robe.

Elle monte jusqu’à mon omoplate et pour je ne sais quelle raison, le styliste a cru qu’il faisait un compromis avec la décence en ajoutant une corde qu’on peut attacher au niveau du ventre. Pourtant, même le string le plus fin ne sera pas assez discret pour ça. Bref, il fait nuit noire, c’est l’heure d’Elikem after dark. Ce que je fais ici reste sur le yacht. (Quelque chose qui est after dark là c’est pour représenter ce qu’on fait quand les enfants et les grands-parents sont au lit.)

Je remonte à l’avant à pas d’escargots comme les filles qui portent les talons de 10 cm pour la première fois. Un petit faux pas et mes lèvres (celles de l’entrejambe) feront une apparition magistrale. J’arrive sur le pont, confuse et me questionne sur la présence de cet autre homme avec lui.

— What the…, il murmure et en un pas, il me cache la vue.

— À quoi tu joues? il m’interroge agité. Tu veux que je crève les yeux du saxophoniste?

— Le saxophoniste? je répète bêtement.

—Care to explain why you are scantily clad?

(On peut comprendre le pourquoi tu es presque nue?)

—I was supposed to be your hot little thing tonight, mais le saxophoniste…., il fout quoi là? Oh my God, Oh Lord, je m’écrie soudainement mains devant la bouche, yeux arrondis. (Hot little thing c’est une façon de dire une meuf aguicheuse)

Comment je suis bête alors! Il veut me demander en mariage, sinon pourquoi…

— Pourquoi tu prends l’air d’un babouin à qui on vient de faire une grimace?

— Imbécile. Il n’y a que toi pour comparer une femme qui veut te plaisir à un babouin. Garde même ta demande, pfff! je maugrée, mais il m’attire contre son torse dur et pose ses mains dans le bas de mon dos.

—You can start my guy, sorry for the delay, il dit à l’endroit du joueur.

Dès la première minute, je reconnais Spanish Guitar de Toni Braxton. Il me fait valser doucement contre son corps, mais son emprise sur moi est possessive.

— Tu es tellement incontrôlable. Une minute tu es sage et tranquille, la suivante tu viens avec l’agressivité au nom d’être « my hot little thing ». Je ne peux pas avoir la paix à tes côtés madame?

— Être ton hot little thing implique que tu aies chaud monsieur. C’est ce dans quoi tu as choisi d’embarquer donc il faut supporter.

Sans prévenir, il me mordille le nez et son haleine fraîche me fait tressaillir.

— Je n’aurais définitivement pas la paix, il conclut, mais bon, pour une tête pleine, un corps qui me rend si dingue que j’ai cette chanson en esprit depuis l’an dernier et une personnalité qui m’a attaché en si peu de temps, je suppose que je peux me passer de la paix.

— Oui, je dis émue.

— Oui quoi? Oui ton père?

— Tu peux ne pas gâcher ma demande en mariage s’il te plaît? Merci, je chuchote et colle ma tête à son torse.

Il m’enveloppe entièrement avec ses bras, pose son menton sur ma tête et on valse pendant je ne sais combien de minutes. Mes yeux sont fermés, je profite de la brise, le bruit de l’eau et la musique sensuelle. Les seules fois que j’ouvre les yeux, c’est pour contempler le spectacle des lumières de la ville que l’on voit durant notre traversée. Je ne me définis pas comme un méga romantique, mais il m’a eu sur ce coup. Mon cœur palpite comme si on venait de m’annoncer la nouvelle du siècle. Même s’il n’a pas prononcé le mot amour, je me sens chérie. De sa main, il vient soulever mon menton et dépose ses lèvres contre les miennes. On s’embrasse lentement, avec précision comme si chacun découvrait l’autre pour la première fois. En dehors des petits spots de lumière qui éclairaient les escaliers en remontant, il fait nuit noire sur le pont, mais je sens dans ses gestes que son regard doit être intense.

— Dans un mois, tu seras ma femme et tu porteras mon enfant, il me déclare solennellement.

— Oui chéri, j’acquiesce mû par un désir incontrôlable.

— Tout comme tu m’as dit dans la voiture que tu ne t’inquiètes pas de me voir m’impliquer pour mon ex, je m’engage à ne jamais te donner de raison de regretter cette confiance gracieusement offerte. Toi et la famille qu’on aura sous peu serez ma priorité. Je sais que tu connais bien mes défauts vu comment je t’y ai exposé, mais j’espère avoir également réussi à te communiquer combien je te chéris. Tu représentes l’avenir que j’espérais un jour trouver sans savoir quand.

— C’est toi qui représentes l’avenir que je n’espérais même pas Cédric. Tes défauts passent aux oubliettes quand je prends en compte ce que j’ai vécu et continue d’expérimenter avec toi. J’ai confiance que ma place est avec toi et prie que Dieu me permette de te garder jusque dans mes vieux jours, je m’effondre sur la dernière phrase.

— Je n’irai nulle part honey, nulle part avant toi, il chuchote et m’embrasse à nouveau.

On descend la minute suivante et je me dévêts lentement sous son regard avide comme il l’a demandé. « Laisse-moi voir mon réel trophée », c’était sa requête. On s’embrasse avec plus de passion. Pendant qu’il me doigte, sa main me pétrit aussi les fesses. Je suis plus pressée que lui, donc on ne se laisse pas le temps d’ôter ses vêtements. Pantalon à ses chevilles, il me pénètre après m’avoir fait coucher sur le lit. C’est de la démence ce que sa queue me fait. Plus mes doigts s’enfoncent dans son fessier musclé, plus ses coups sont profonds. Il encadre ma tête grâce à ses deux bras posés de part et d’autre de ma face.

—How much more of me can you take my hot little cheerleader?

(Combien peux-tu encore encaisser ma sexy cheerleader?) (Comprenez qu’une cheerleader c’est quelqu’un qui t’encourage avec entrain comme Elikem l’a fait pour lui à la soirée, je ne connais pas de mot français pour ça en dehors de pom pom girl. Bref, retournons au tchouk.)

-Moreeeeeee, je scande avant de me relever, tendue par le plaisir.

Mes bras agrippent son cou, mes jambes s’enroulent autour de sa taille, je creuse le dos en attente de l’extase que je sens poindre. Il m’attrape les fesses à deux mains et m ramone la cheminée. J’aurais ajouté qu’il le fait bien sec, mais je mouille tellement que mon entrejambe est devenu une patinoire pour sa bite qui parfois ressort dans les va-et-vient et cogne bien les autres endroits sensibles de ma chatte.

— Shit…là-bas Cédric, oui là-bas, je répète le cerveau brouillé par la course vers la montagne qu’il m’intime.

— Give me the twinsies Yafeu! c’est la dernière chose que je hurle avant de perdre le nord en tremblant tel un invertébré.

***Belle Laré Aw***

Pourquoi quelqu’un m’appelle à 5 h du matin en dehors de ma fille? je demande endormie devant l’écran qui m’affiche un numéro inconnu. C’est Elikem que j’attendais et c’est à cause d’elle que j’ai laissé ma sonnerie activée au lieu d’être en silencieux. Comme la personne insiste, je quitte doucement le lit pour ne pas réveiller Eli.

— Allô? je dis dubitative après m’être raclé la gorge.

—Hello? Am I speaking with Elikem’s mother? I am Yafeu…I mean Cédric’s mom.

(Est-ce que je suis sur le téléphone de la mère d’Elikem? Je suis la mère de Yafeu…, enfin je veux dire Cédric.)

—Did something happen to my baby? Je panique aussitôt.

(Qu’est-il arrivé à ma chérie?)

—Not at all. They should land soon in Nairobi from what she sent me via text when they were boarding.)

(Rien du tout. Ils devraient atterrir bientôt à Nairobi si je me fie au message qu’elle m’a envoyé quand ils embarquaient.)

Je relâche mon soupir et elle continue.

 —My apologies, I probably should have waited before calling but we are early birds over here and I just couldn’t contain my excitement.

(Je m’excuse, j’aurais probablement dû attendre avant de vous contacter, mais nous sommes des lève-tôt de ce côté et je ne pouvais simplement pas contenir ma joie.)

— No worries, je réponds, ne sachant toujours pas où la bonne dame veut en venir.

—So what does your schedule look like in the next three weeks? Since we are already in January, my husband and I were hoping to hold the ceremony around that time.

(À quoi ressemble votre calendrier des trois semaines prochaines? Comme nous sommes déjà en janvier, mon mari et moi espérions que la cérémonie se tiendra vers cette date.)

J’entends un homme lui parler en twi et elle converse avec lui. Ça me laisse le temps de me réveiller un peu et d’essayer de remettre dans l’ordre ce qu’elle m’a dit.

—My husband suggests we call you later. I am sorry, I tend to act fast when I am excited. What time will work for you dear?

(Mon mari suggère qu’on vous rappelle plus tard. Je suis désolée, j’ai tendance à agir rapidement quand je suis euphorique. Quelle heure vous conviendrait mieux pour un rappel?)

—Uh…let’s say 8 a.m. but since I am already up, we can continue.

(Disons 8 h, mais comme je suis déjà debout, on peut continuer.)

— Fantastic…uh, one moment please, elle demande et s’éloigne encore de la ligne pour parler en twi.

—Annnnddd, she said she wants to talk about it now Nyameba. Can you stop cutting me off please? God you’re so annoying, elle ajoute avant de revenir vers moi.

(Etttt, elle a dit qu’elle veut en parler maintenant Nyameba. Peux-tu cesser de m’interrompre? Dieu que tu es casse-pieds.)

—So…, what kind of venues do you have in Lomé? We need a big place, there’s a lot of us in the family.

(Alors…., qu’avez-vous comme salles de fêtes à Lomé? Nous avons besoin d’une grande salle parce qu’on est nombreux dans la famille.)

—I am sorry, but you lost me at the schedule in three weeks part. What are we exactly talking about?

(Pardon, mais vous m’avez perdu au niveau du calendrier dans trois semaines. De quoi parle-t-on?)

—Oh right, elle rit, I totally forgot to say that first. We are talking about the traditional wedding of the kids. Your daughter gave us a wonderful gift yesterday. Because of the way our son is, he doesn’t do huge ceremonies, awards, or parties so we never had the chance to see him get the accolades he deserves for his tremendous work until Elikem came into the picture. Not only did he attend but she was sweet enough to call us and stay on the phone for some time. Nyameba and I are so thankful for what she did that we think it’s time for our family to officially ask for her hand in marriage. So as I was saying, we need a huge venue because there….

(Je parle de la dot des enfants. Hier, votre fille nous a offert un merveilleux cadeau. À cause de sa personnalité, notre fils ne participe pas aux cérémonies grandiloquentes, remises de prix ou fêtes, du coup nous n’avons jamais eu l’opportunité de le voir célébré pour son immense travail jusqu’à l’arrivée d’Elikem. Non seulement il a assisté à une cérémonie, mais Elikem nous a cordialement permis de vivre en temps réel ce grand moment de notre fils en restant en appel vidéo avec nous pendant un certain temps. Nyameba et moi sommes honorés par son geste et considérons qu’il est grand temps pour notre famille de demander officiellement sa main. Donc comme je le disais précédemment, nous avons besoin d’une énorme salle parce que…)

Demander la main de ma petite fille in mariage? C’est tout ce que mon esprit a retenu. Comment on veut marier Elikem et cet enfant m’a envoyé il y a quatre heures de ça, un simple « on embarque bientôt maman, bisous ». C’est quelle enfant que j’ai ça? Elikem eh!

***Bruce Attipoe***

Ça y’est, c’est la fin du premier trimestre. Jennifer et moi avons les sourires les plus niais du monde à l’heure actuelle. Notre fierté et joie se porte à merveille. Son gynécologue ne nous a donné que des bonnes nouvelles. On sait déjà que le bébé sera AS puisque Jennifer est SS. Je suis bien portant pour ma part, on le savait depuis, mais malgré son génotype, je suis soulagé et confiant que notre boutchou vivra de longues années dans la santé sur cette terre. Pour célébrer cette excellente nouvelle, j’emmène ma chérie faire des courses. Janvier a été tendu entre nous. J’admets que j’ai exagéré, mais il fallait ça pour la ramener à la raison. Je ne suis pas son ex-mari que certains surnommaient Monsieur chat à l’école. Moi je suis un étalon, je ne léchouille pas, je donne le bâton bien dur. Quand je passe sur une femme, elle le sent et le sait, donc je ne vais pas accepter les comparaisons bêtes. Je baise longtemps, c’est mon habitude et les femmes m’ont couru après pour mon endurance. Bref, ce sont des histoires anciennes ça. On fait des courses pour le bébé dans une boutique pour enfants. C’est une joie de la voir si satisfaite. On regarde actuellement différents modèles de siège auto sans savoir lequel prendre.

— On pourrait demander à Eben, je propose et elle me décoche automatiquement un regard assassin.

— Ça ne te plaît pas quand je suis bien hein. Tu as un problème avec ma joie.

— Arrête, tu sais bien que non, mais jusqu’à quand tu comptes vivre en recluse? Océane est déjà la femme d’Eben. On n’y peut rien. Pourquoi ne pas passer l’éponge et essayer de la connaître?

— Quand tu te feras traiter de sale merde par quelqu’un, tu pourras me conseiller de passer l’éponge, elle répond avec hargne.

Une belle femme, mais si têtue.

— Prenons un siège auto noir, je lui propose pour revenir sur un sujet plus joyeux.

— Noir? C’est pour emmener une aura sombre dans la vie de ma fille? On prend le rose avec le nœud en haut de la capuche.

— Une fille hein, je dis amusé. Quelqu’un croyait attendre une fille aussi avant de se retrouver avec un garçon bien robuste.

— Je te brise les couilles à la prochaine comparaison avec l’anguille qu’Eben appelle femme.

— Eh pardon, les nerfs de femme enceinte. Prends le siège qui te plaît.

Je finis avec une facture avoisinant 470000 pour un siège, un set de trois sacs bien que je ne comprends pas l’utilité de deux parmi eux, une tétine et quelques habits. Pour bien finir la journée, Tessa nous accueille avec un repas bien chaud. Une sauce d’arachide fumante à la viande de bœuf frite et des morceaux de gombo dansant sur la sauce. Tout ce dont je raffole. J’ai du riz en accompagnement. Jennifer boude. Elle veut plutôt de la pâte de maïs que Tessa s’empresse d’aller lui faire. Personne ne peut nier qu’on est chanceux de l’avoir parmi nous depuis janvier. Jennifer sait très bien tenir une maison, mais sa santé ne lui permettait pas de s’occuper régulièrement de moi donc Tessa a pris le relai sans même qu’on lui demande. Même ma bonne n’avait pas à faire parfois parce que Tessa était déjà passée. Je sais que c’est le chômage qui la pousse à être hyperactive, donc j’espère plus que tout qu’elle trouve rapidement quelque chose.

— Tu connais du monde en journalisme normalement non? j’interroge Jennifer pendant qu’on mange ensemble mon riz.

Soudainement, elle ne peut plus attendre la pâte. Elle se distrait avec le riz en attendant. Les drôleries de femme enceinte.

— Ça date ça. C’est pour Thérèse?

— Tessa pardon, Thérèse c’est un peu vieux pour mon âge, nous dit l’intéressée qui revient avec la pâte qui repose dans une grande tasse.

— Tchieu tu es rapide hein, commente Jennifer tout en salivant devant nos regards amusés.

— On ne fait pas attendre notre future maman.

— Elle allait même bouffer mon bras si tu avais attendu une seconde de plus.

— C’est ton enfant, tu assumes, elle réplique et se jette sur son plat.

Les termites même ne grignotent pas le bois comme Jennifer a traité la pâte de maïs. Je n’ai même pas eu droit à une boule sous prétexte que c’est nom enfant la priorité. Repus, on s’affale chacun sur le sofa. Je suis penché, chemise ouverte en mode repos. Elle défait les achats qu’elle montre à Tessa. Cette dernière aussi a les yeux en cœur devant les effets de bébé, ce qui me fait lui demander.

— Ton petit gars de Durban là attend quoi pour m’envoyer la dot? Il ne sait pas que tu es prête pour les enfants?

— Oh Bruce, elle rigole. J’ai quel petit gars à Durban?

— Il ne faut pas mentir hein. C’est le rôle de ton cousin d’étudier les gars qui entreront dans ta vie. Prends-le comme un conseil, ça t’évitera de perdre des années avec un rigolo comme moi avant lui, lui dit Jennifer.

Bien parlé.

— Les hommes que j’ai rencontrés en Afrique du Sud, c’était pas trop ça, elle dit la bouche tordue. Ils pratiquaient la tromperie comme un sport national. Je me suis lassée de ça et maman ne voulait même pas que je sois avec un étranger donc je ne me suis dédiée qu’à ma carrière jusqu’à ce que mes plans flanchent. Trop mignon le sac pour bibis.

— Enfin quelqu’un a de l’œil dans cette maison. Dis-le à ton cousin.

— Sac pour bibi? Donc c’est le biberon qui ne peut pas entrer dans le gros sac quoi?

— Pardon Tessa, je n’ai pas la force. Explique-lui.

— Vous êtes marrants, elle rigole. Alors, le gros c’est le sac à langer. Tu y mets les couches, le nécessaire pour garder bébé propre, des vêtements et bavoirs. Le sac à dos c’est un sac de conservation pour les bibis. Par exemple, si Jennifer tire et vous comptez faire une longue route, vous pouvez mettre les bibis froids dedans sans trop de crainte. Il faudra juste mettre le bibi de lait dans l’eau chaude pour qu’il soit à une bonne température pour l’enfant. Et la pochette, je sais pas trop.

— C’est pour que la maman y range son maquillage, parce qu’on a tendance à s’oublier une fois qu’on a l’enfant dans nos bras. Il faut aussi que je trouve comment personnaliser une tétine.

— Oh je peux t’aider, tu veux faire quoi? lui demande Tessa.

— Dessiner une couronne et ajouter des pierres autour de….

— Les choses des enfants du 22e siècle, je commente hautement amusé par leurs plans grandioses.

— On est toujours au 21ème Bruce, rigole Tessa.  

Le soir, pendant qu’on se couche, Jennifer ramène le sujet de l’emploi de Tessa.

— Elle a bien étudié en mass communications et journalism hein?

— Oui oui. Elle a commencé dans les radios avant d’intégrer le monde de la télé.

— Comme tu le sais, mon ancienne émission n’a pas été renouvelée donc je doute que mes anciens contacts puissent faire quelque chose pour elle, mais je connais une blogueuse qui prend de l’ampleur ici. Elle fait un travail similaire à bellanaijaweddings tout en ajoutant sa touche personnelle et se concentre pour l’instant sur le public de l’Afrique francophone.

— Bellamachin là c’est quoi?

— Tu vis sous quelle roche pour ne pas connaître bellanaijaweddings? C’est la plateforme où tu te retrouves quand tu as un mariage digne de ce nom.

— Ah bon? Eben et Océane y étaient?

— Ils ont eu un mariage digne de ce nom ça?

— Tu exagères, c’est le plus beau mariage auquel j’ai assisté.

— C’est que tu n’as pas assisté à beaucoup de mariages et de toute façon le nôtre sera plus raffiné. Compte sur moi.

— Ça c’est vrai, j’approuve. Je n’ai pas attendu 36 ans pour me marier simplement surtout qu’on a expédié la dot.

Je me réjouis d’entendre les plans de Jennifer concernant notre avenir. J’avais raison quand je disais à Eben qu’il s’inquiétait pour rien. Parlant de lui, il m’a remis depuis un moment l’invitation pour la présentation de son fils qui aura lieu au début de février, mais ça ne sert à rien d’en parler à Jennifer maintenant. Elle est de bonne humeur et j’ai bon espoir de vider un peu mon énergie d’étalon avant de dormir.

Je disais donc qu’Eben se faisait des idées. J’admets que le début avec Jennifer était bizarre, mais je peux affirmer sans crainte que le passé de Jennifer est derrière elle. Elle est totalement à moi et bientôt portera officiellement mon nom.

***Jennifer traditionnellement satisfaite dans son règne Attipoén***

Avant Bruce, je n’aurais pas cru que ça existait des hommes capables de faire l’amour bien qu’ils tombent de sommeil. Dieu merci, il dort, je peux m’occuper de mes affaires. Je m’occupe d’accoucher pour commencer et place au mariage de la vie. Océane sera aux premières loges pour souffrir de ma plénitude. Je vais enregistrer des images de robes éclatantes, rien à avoir avec ce qu’on trouve partout que j’avais à mon premier mariage. Par amour et parce que je croyais avoir trouvé la perle, je me comportais comme une énamourée devant les choses quelconques que Romelio m’avait offertes quelques années plus tôt. On n’a même pas eu de vraie lune de miel. Ma bouche pointue était forte pour le rassurer que ça ne me gêne pas puisqu’on commençait une nouvelle vie au Nouveau-Brunswick. La seule chose que j’ai gardée de ce mariage, c’est la nationalité canadienne. Au moins Romelio m’aura servi. Mon bébé sera libre de voyager comme sa mère et c’est au Canada qu’on ira se marier. Ouais! On va se marier à l’étranger, et comme Tessa sera employée chez Siaka, je vais payer pour qu’on nous dédie une semaine entière de pub sur toutes leurs plateformes. Même s’il s’isole dans un trou perdu, Romelio sera bien exposé à mon bonheur. Bébé dans les bras avec mon Bruce qui a une très bonne carrière, comparée à monsieur qui croyait être le meilleur parti du pays accompagné de sa vieille qui ne peut plus faire d’enfants, c’est qui que le karma a visité finalement? 

D’amour, D’amitié