
161: j’ai aussi droit à ma part du gâteau
Write by Gioia
***Le lendemain du mariage des Bemba***
***Elikem Asamoah***
Vu la tête que fait Saahene à notre arrivée, je me dis que
le problème doit être sérieux parce qu’il n’a même pas répondu aux blagues de
Richie avec qui il aime rigoler pourtant. J’emmène directement les enfants à
l’étage afin que les frères puissent parler sans être interrompus. Cédric se
présente quand les enfants sont déjà endormis et je lisais moi-même mes cours
pour lutter contre le sommeil. Sa face est aussi assombrie, donc je panique un
peu.
— Qu’est-ce qui se passe ?
Il soupire, s’assoit sur le lit et soupire à nouveau.
— Est-ce que Garcelle Ekim est liée à ton ex ?
Mon esprit s’embrouille à cette question.
— Oui. Pourquoi ?
— Elle prétend être enceinte de mon frère.
Je me lève subitement à cette nouvelle.
— Qu’est-ce que tu dis ? Comment ça elle est
enceinte ? De quoi tu me parles ?
— Il l’a rencontré l’année dernière durant son tour de
l’Afrique centrale. Les choses se sont vite passées entre eux, elle l’a visité
ici quelques fois et le mois dernier, elle lui parle de grossesse. Il cherche
maintenant du soutien pour en parler aux parents.
Ses mots sont bien arrivés à mes oreilles, mais j’ai du mal
à les comprendre. Comment ça Garcelle couche avec Saahene ? Comment est-ce
possible ?
Une semaine plus tard, j’ai ma réponse et une lourde charge
sur mon cœur. J’ai remis à Saahene le cadeau de mariage des Ekim quand j’ai su
qu’il comptait passer par le Gabon dans son tour de l’Afrique centrale. J’ai
confié Saahene à Denola, afin qu’il lui fasse découvrir un peu son pays. Ce
dernier a essayé de me joindre sans succès, probablement pour me fournir des
explications parce que l’affaire est connue désormais de la majorité des
Asamoah qui sont actuellement en direction de Libreville pour rencontrer les Ekim.
Cédric et sa mère essentiellement. Saahene a été puni et renvoyé à Abetifi. Je
suis à Accra parce que les enfants ont besoin de moi, mais je suis uniquement
présente de corps. Aussi égoïste que ça puisse sonner, une partie de moi prie
avec ferveur que cette grossesse ne soit pas de Saahene. Il n’a que 17 ans
et je ne peux pas porter ce poids sur ma conscience. Je ne peux pas dormir
tranquille en sachant que j’ai introduit ce poison dans sa vie. Je désespère
tellement que j’en pleure parfois les nuits. Tout ce que je fais depuis que
Cédric a pris l’avion, c’est fixer mon téléphone, attendant qu’il me donne une
nouvelle qui effacera ce cauchemar.
***Cédric Yafeu Asamoah***
Maman et moi prenons place en face des Ekim dans leur
demeure familiale qu’on a rejoints dès notre arrivée à Libreville.
— Je suis Toni, le frère aîné de Garcelle, bienvenue
chez nous, commence-t-il après avoir introduit le reste de sa famille.
— Et je suis Cédric, celui de Saahene. Nous avons la
version de ce dernier et voulons également entendre celle de la jeune dame, je
réponds.
— Tu peux m’appeler Garcie et l’histoire est assez
simple. J’ai rencontré Saahene l’an dernier, durant ses vacances ici. Il m’a
fait du rentre-dedans, j’ai accepté, sans connaître son âge. Nous avons gardé
contact à son retour chez vous, il m’a invité plusieurs fois à venir au Ghana.
J’ai hésité, n’étant pas habituée à voyager pour un homme, mais il m’a
tellement charmé que j’ai fini par accepter. On a remis le couvert et c’est à
mon retour que j’ai découvert ma grossesse. C’est également après avoir pris
cette grossesse qu’il me parle de ses études et je découvre même son âge. Votre
fils s’est joué de moi.
— Merci Garcelle, réplique durement son autre frère,
celui qui s’est présenté comme étant Denola. Je suis vraiment navré Cédric et
Madame Asamoah, il continue sur un ton peiné. C’était à moi de garder un œil
sur votre fils et d’éventuellement prévenir des situations désagréables. Je ne
sais comment vous exprimer mon désarroi.
-Let’s get
back to the story, shall we? rétorque maman, ignorant sa tentative. If I
followed your timeline young lady, you said met my son this year in Ghana?
(Revenons à l’histoire, s’il vous plaît. Si je me fie jeune
fille à votre chronologie, vous dites avoir rencontré mon fils cette année au
Ghana ?)
—Yes.
—And how do
you date a student in his final year of SHS and actively preparing for his WASSCE
without knowing this? And how does it not cross your damn mind that a student,
is most likely underage or 18 at best? Maman lui demande avec la même
froideur qu’elle démontre dans sa profession.
(Et comment fréquentez-vous un élève en dernière année du
lycée, préparant son diplôme de fin d’études sans le savoir ? Et comment
ça ne vous a pas traversé la cervelle qu’un élève est probablement mineur ou au
plus n’a que 18 ans ? )
—With all
due respect Ma’am…
(Sauf votre
respect, Madame…)
— You
either call me Madam or Attorney General Asamoah, elle l’interrompt toujours
sur ce ton.
(Adressez-vous à moi en m’appelant Madame ou Procureure
générale Asamoah.)
— Pardon je reviens en français pour bien vous
expliquer. J’ignore comment ça se passe chez vous Madame, mais ici, quand un
enfant comment une bêtise, c’est le parent qu’on questionne et non la personne
que l’enfant a entraînée dans sa connerie.
— Garcelle ça suffit, intervient à nouveau son frère
Denola. On essaie de trouver une solution ici et certainement pas d’envenimer
la situation.
— C’est en m’accusant que vous trouvez votre solution
alors ?
— De toute façon, l’acte est déjà posé, je dis, pour
ramener la conversation sur le sujet. Saahene reconnaît avoir entretenu une
liaison avec toi.
— Bah alors ? Si vous avez les aveux du concerné,
pourquoi on m’attaque ? De toute façon, je n’ai pas forcé votre fils. Il
vous confirmera que depuis qu’il me sait enceinte, je n’ai pas une fois appelé
pour lui mettre la pression. Je peux très bien prendre soin de mon enfant, donc
ne croyez pas que votre argent m’intéresse. Je ne crève pas la faim ici.
— Garcelle ! Tais-toi un peu ! intervient sa
mère qui jusque là était silencieuse.
— Comme l’a dit ma sœur, nous ne crevons pas la faim
dans notre famille, continue son frère Toni. Un test de paternité sera fait
pour établir le lien avec votre frère pour que vous ayez votre preuve,
cependant vous êtes libres de vous engager pour l’enfant ou pas.
— Et je vous recommande de bien penser vos mots avant
de les prononcer. Nous n’avons pas la réputation d’être des fuyards. Si cet
enfant est Asamoah, il sera traité comme tel. Le test d’ADN sera effectué chez
nous. Sentez-vous libre d’en faire ici également si ça vous rassure.
— Nous le ferons, confirme son frère.
***Garcelle Ekim***
Bien dit Toni, je l’acclame au départ des pompeux là.
— Bien dit ? s’échauffe le gay qui s’ignore.
Il se lève même du sofa, le visage froissé comme ma jupe
paysanne.
— Un putain de gosse Garcelle ! Tu savais
pertinemment qu’il était le frère du mari d’Elikem. Tu m’as entendu le dire à
maman quand je l’ai ramené à la maison pour qu’il mange avec nous.
— Et alors ? Tu as 18 ans toi en étant frère
de Toni ?
— Et comment tu vas dans le pays d’un lycéen en pleine
année scolaire sans te rendre compte qu’il fréquente ? Hein ?
— Je sais pas hein, on était trop occupé à bien baiser
pour discuter.
— Imbécile !
— C’est bon Deno, ça ne sert à rien de s’époumoner,
Toni essaie de le calmer, mais il rejette la main qu’on lui pose sur l’épaule.
— On ne peut pas être des gens corrects dans cette
famille pour une fois ? Quand ce n’est pas un criminel qui détruit la
famille, c’est cette conne qui va faire un enfant à un mineur. Vous me donnez
envie de changer de nom ! il conclut et s’en va.
— Tu vois les choses de ton fils ? j’interpelle
maman.
— Et tes propres choses Garcelle ? Tu les
vois ? elle rétorque fâchée. Qu’est-ce qui te dérangeait dans les deux
années de quiétude qu’on a enfin obtenues depuis le fiasco créé par ton
père ?
— J’ai compris, c’est toujours ma faute de toute façon,
je conclus pour éviter qu’elle palabre davantage, mais rien ne l’arrête.
Elle me sermonne sur le « baiser » que j’ai
utilisé comme si je n’avais pas fait ça, et elle continue à libérer son
cœur.
— En tout cas, commence Toni à la fin de sa diatribe, tu
es déjà enceinte.
— Effectivement, je renchéris, soulagée que quelqu’un
ici se concentre sur l’essentiel.
— Apprête-toi donc à être mère et pense aux
explications que tu fourniras à tes nombreuses amies concernant le père de ton
enfant, parce qu’en fin de compte, même s’il t’a réellement caché ton âge, tu
garderas l’étiquette de la meuf qui a rendu un adolescent père Garcelle, il
m’annonce et quitte également le salon.
— C’était ça son soutien ? Tes fils me veulent
même quoi ?
— Tu penses que c’est le jeu Garcie ? continue
maman. Les temps ont changé. Qui ne sait pas que les jeunes sont influençables ?
Tu ne vois pas que pour les gens, incluant sa famille, tu es l’adulte de 32 ans
qui a laissé un enfant de 17 ans utiliser son corps au point d’avoir un
enfant ?
— Je demande pardon, je dis et quitte aussi le salon.
Les pensées réductrices de ce style ne me servent à rien. Maman
ne va pas me frustrer avec son éducation chrétienne qui diabolise la femme dès
qu’elle sort de leur droiture ennuyante. Je marque une pause devant mon miroir
et colle ma courte robe à volants contre mes cuisses pour dévoiler mon ventre
qui a dix-sept semaines. N’en plaise à la terre entière, je suis bien enceinte
de Saahene et je me sens chanceuse. Je ne l’ai pas cherché. D’ailleurs, je ne
l’ai même pas vraiment remarqué quand Deno l’a emmené à la maison. J’ai tracé
ma route dès que j’ai entendu Deno le présenter à maman comme appartenant à la
famille du thon qui se disait copine de Ray. C’est au Cotton club que je l’ai
revu et il m’a abordé comme un grand hein. C’était à base de bouteilles envoyées
à ma table. Mon amie qui m’avait incité à l’accompagner pour se trouver un bon
poisson a totalement oublié sa mission. C’est sur la piste tandis que je me
trémoussais qu’il s’est décidé à m’aborder et jamais son âge n’a été abordé. Le
gars ne m’a même pas dragué comme un ado, même si j’ai fini par découvrir avec
le temps des détails qui trahissaient son côté novice. Quoiqu’il en soit, il
affichait une assurance que je n’ai même pas vu chez certains de ses aînés que
j’ai fréquentée dans le passé. C’est ainsi qu’on s’est chauffé quelques fois
durant son séjour ici et il a demandé que je vienne à Accra. Comme j’ai dit à
sa famille, il a été insistant sans être lourd. Il m’a vraiment fait la cour
comme on ne me l’a pas fait depuis longtemps. Qui va me juger ? Quelle
femme ne veut pas se lever avec les messages touchants, qu’on multiplie les
efforts pour la convaincre quand elle hésite et quand enfin j’accepte de venir,
il me paie le billet ? J’ai sauté dans l’avion s’il vous plaît. J’ai sauté
sachant qu’il était un lycée de 17 ans. Même si on n’a jamais parlé de son
âge, il a quelquefois mentionné ses études sans spécifier qu’il était lycée et
je ne suis pas conne non plus. Ça ne se fait pas d’aller dans un pays inconnu
pour les beaux de quelqu’un sans se rassurer sur sa sécurité. Ce sont mes
recherches qui m’ont fait découvrir l’importance du nom d’Asamoah Eliza au
Ghana. Elle n’est pas la seule connue dans leur pays, mais c’est son nom qui
était en tête de liste des résultats. C’est une fois sur place, dans son pays
que j’ai compris le trésor que j’avais entre mes mains. J’en ai vu des choses
du haut de mes 32 ans. Je viens moi-même d’une famille qui fut aisée, mais
les Asamoah nous écrasent de loin. Ce petit m’a reçu dans une maison dont je
mate encore les vidéos parfois. Il m’a emmené dans des lieux qui m’ont donné
envie de tout plaquer pour le suivre et il m’a baisé comme si sa vie en
dépendait. Pas une fois je n’ai vu sa mère et son frère, donc que personne ne
vienne me pomper l’air. Quand on veut que son enfant soit sage, on s’en occupe
et c’est évident qu’elle ne le fait pas, parce que la maison où Saahene m’a
accueilli était remplie de domestiques. Très vite, l’idée de prendre une cloque
m’est venue. Saahene étant déjà accro à moi, je n’ai pas vu le souci. Aussi, je
suis en âge où j’ai envie d’une famille. J’attendais simplement que le bon se
présente. J’ai donc opté pour la vieille méthode de la femme séductrice qui déchire
passionnément avec ses dents l’emballage du préservatif avec l’intention de
tuer son gars au lit. La nuance c’est que je m’étais préalablement entraînée à
faire une entaille dans le préservatif en déchirant l’emballage, ce n’est pas
une mission pour celles qui se découragent vite. Et franchement, après tout le
mal que je me suis donnée, le gay qui s’ignore croit que ses crises de nerfs
valent quoi à mes yeux ? Qu’est-ce que j’en ai à foutre de l’opinion de
Toni qui à 37 ans n’a toujours pas réussi à convaincre une femme de
l’épouser ? Moi je suis sur ma trajectoire hein. La nature a choisi de
couronner mes efforts en me donnant cet enfant que j’attends avec impatience. Saahene
comme la majorité des porteurs de couilles s’est mis à me sortir les discours à
la con quand je lui ai parlé de l’enfant. Subitement, il s’est rappelé de son
âge et du fait qu’il allait à peine finir le lycée. Je l’ai bien lavé au
téléphone avant de le bloquer et voilà qu’il a fait venir sa famille ici parce
qu’il tient à moi. Je sais donc que je tiens le bon sur tous les plans, donc je
n’ai aucune intention de lui mettre la pression. Comme j’ai dit, cet enfant je
l’ai voulu d’abord parce que je me sens prête à être mère, donc je suis prête à
m’en occuper financièrement. Seulement, je n’ai aucune intention de laisser
Saahene me filer entre les doigts. Vu la ressemblance avec son frère Cédric,
j’ai une idée de la cote qu’il aura d’ici ses 25 ans. Mon cœur réagit
positivement rien qu’à la pensée. Personne, je dis bien personne, ne touchera
mon diamant brut et de toute façon, il sera majeur avant mon accouchement donc
qu’on me libère les oreilles avec les lourdes leçons.
***Elikem Asamoah***
Et on ne peut rien faire ? Elle ruine la vie d’un jeune
garçon et Cédric m’explique froidement que légalement, rien ne peut être fait, parce
qu’ils ont couché ensemble au Ghana et ici l’âge de consentement sexuel est
fixé à seize ans. Je ne comprends vraiment pas.
— Essaies-tu de me dire que quelqu’un peut simplement
toucher Malike à seize ans et tu me répondras naturellement qu’il est dans ses
droits ?
— Qu’est-ce que tu entends par naturellement ? Tu
penses être plus dégoûtée par ce qui arrive à mon frère que moi ? Ou tu l’es
plus que ma mère ? il rétorque sur un ton cassant.
— Mon cœur brûle de rage. Je m’en veux et je ne peux
pas accepter ce qui arrive. Je suis désolée si ma question tendait à l’accusation,
je suis juste révoltée Cédric.
Il soupire et m’entoure l’épaule de son bras pour me coller
contre lui.
— Je suis tout aussi dégoûté que toi et déçu de
Saahene. Quoi qu’on dise, il a reconnu qu’il n’a jamais mentionné son âge à
cette femme. Pour lui, elle lui a donné une chance parce qu’il a réussi à la
séduire malgré cet obstacle. Ce n’est qu’un gamin qui s’est retrouvé dans une situation
où il croyait faire l’homme. Il l’a même reçu dans l’une des maisons de maman,
tu imagines ? Aujourd’hui, il est en passe de devenir un vrai homme avec
les responsabilités requises. Les parents ont déjà instauré les mesures
nécessaires pour le mettre en face à la réalité qu’il a choisie, mais on ne
peut rien faire à cette femme, si elle porte effectivement un enfant de nous.
Un enfant chez les Asamoah est un être sacré. Nous n’avons pas le droit d’en
avoir hors de l’union maritale, mon père a toujours été intransigeant sur cette
règle.
— Qu’est-ce que tu veux dire par un être sacré ?
je demande pour qu’il clarifie.
— Je n’y accorde pas énormément de crédit, mais il est
dit que chez nous, un enfant naît sous la protection d’un de nos ancêtres et
doit être traité avec égard sans quoi la fureur de cet ancêtre s’abat sur la
famille. Mon père y croit dur comme fer parce qu’il a…, bon peut-être c’est
mieux que je te parle de sa vie.
— Ta mère m’a dit qu’il est le survivant d’une fratrie
de sept ?
— Elle t’a raconté ça quand ? il s’étonne.
— À Nairobi durant notre première rencontre.
— Elle doit toujours me devancer, bref. Ceux qui intimidaient
et traitaient mon père d’enfant de sorcière pour son statut de survivant ont, pour
la majorité, connu des fins bizarres ou tragiques. Les seuls qui vivent bien
sont ceux qui ont essayé de faire amende honorable auprès de lui une fois
adultes. Depuis, mon père croit dur comme fer à cette légende de leur famille,
parce qu’il porte le nom de son oncle, le frère aîné de son père qui lui aurait
dit sur son lit de mort qu’il s’en va, mas son esprit demeurera avec lui comme celui
de son grand-père a lui-même veillé sur lui. C’est dans cette logique qu’ils m’ont
aussi appelé Yafeu.
— Donc Malike a…
— Non. Je t’ai dit que je n’y crois pas à 100% et je n’aurais
pas proposé un prénom lié à un esprit sans t’en avoir parlé. Je me suis quand
même inspiré du prénom d’une de mes cousines favorites.
— OK, je dis soulagée parce que je me méfie de ce que
je ne maîtrise pas, même si je respecte leur tradition. Du coup, l’enfant de
Garcelle est sacré même si elle ne l’a pas dans l’union maritale ?
— Des présentations familiales seront requises et
quelques rites devront être faits pour que l’enfant soit totalement reconnu par
nous.
Donc Saahene sera banalement engagé par l’enfant à une
vieille de 32 ans quoi. Super, je pense, le cœur serré, sans le verbaliser.
Je ne digère tellement pas, que je n’ajoute rien. On passe une sale soirée et
la semaine continue sur cette note. Les jours s’enchaînent et l’idée commence à
s’imposer. Les pensées philosophiques ont pris l’ascendant sur mes émotions destructrices
et j’essaie de les communiquer à Deno qui ne cesse de me demander pardon.
Au final, le sort des humains c’est de vivre, profiter et
subir la vie. Le bonheur n’est pas réservé à ceux qu’on croit méritants, parce
que notre vision humaine est colorée par nos idéologies et sentiments. Ça serait
hypocrite de dire que ma réaction à la grossesse est purement liée au fait que
je me soucie pour Saahene. Dieu sait que pour moi, Garcelle n’est pas une bonne
personne, mais mon avis ne changera rien à la situation. Elle sera présente à l’anniversaire
de mon bébé, ma lumière dans ce chaos, celle dont la présence me rappelle que
la vie, même si elle me semble parfois injuste, mérite la peine d’être vécue. Garcelle
sera à l’anniversaire parce que les rencontres familiales entre Asamoah et Ekim
se tiendront après la fête.
La fête se déroulera chez maman Eliza, elle l’a demandé et j’ai
accepté sans réfléchir, parce qu’elle a besoin de se changer les idées après les
derniers mois qu’on a vécu. Participer à l’anniversaire de mon dauphin m’a fait
voir les choses différemment, parce que dans le passé, je n’aurais jamais vu l’utilité
d’organiser une fête pour un être qui ne s’intéresse qu’à tout casser et
courir. Malike ne s’intéresse effectivement qu’à ça en général et elle aime taper
bruyamment sur mon ordi quand je l’ouvre à ses côtés, mais je ne doute pas qu’elle
s’amusera à sa fête, même si elle ne comprend pas tout. Son propre Disney world
l’attend dans la cour de sa mamie. L’idée vient de Yafeu qui n’a aucune
intention d’ici les cinq ans à venir de se farcir une journée dans un parc d’attractions
bruyant pour les beaux yeux de Malike. Celle-ci devra se contenter de cette
journée pour en profiter et attendre patiemment ses six ans, en espérant que baisse
l’aversion que ressent son père pour les foules.
J’ai forcé pour trouver une tenue proche de celle qu’elle
portait à notre sortie d’hôpital. Nous avons également maintenu la célébration
sur sa date de sortie l’an dernier. Comme toujours, mamie a rajouté ses touches
personnelles, des personnes déguisées en mascottes de Donald Duck, Dingo,
Mickey, Minnie, Daisy et Pluto, dont Malike ne voulait rien savoir lol. Dès qu’ils
s’approchaient d’elle, elle courrait vers Richie et pourtant, quand elle
croyait passer inaperçue, elle tentait des pas timides vers eux.
Saahene aussi est présent. C’est la première fois que je le
revois depuis son exil à Abetifi. Il discute actuellement avec Cédric et
Godson, mais je lui ai parlé à son arrivée et il m’a l’air assez posé. Mon
téléphone me signale un message entrant qui vient de Romelio.
— Les retardataires sont toujours acceptés à la fête du
pays ?
— Arrive seulement. Tu vas voir comment Malike s’amuse.
— Dis-lui que je n’aime pas l’infidélité, je suis un
homme jaloux.
— Lol, viens le dire à son père, je réplique en rigolant
et range mon téléphone.
Une dizaine de minutes plus tard, il arrive avec Hadassah et
les deux ont les bras remplis de sacs cadeaux.
— Alors, voici la part des Tountian, commence Romelio.
— Et la nôtre, termine Hadassah.
— Merci ma puce, je dis reconnaissante en lui faisant
la bise. Est-ce qu’on aura encore de la place pour dormir dans la maison avec
tous ses cadeaux ?
— Mon problème se trouve où dans ça ? Tu vas
simplement dormir sur le toit, Ma Malili mérite tout ça, n’est-ce pas ma nièce
chérie ?
— Elle est trooopppp mignonne tata, c’est fou ce qu’elle
a grandi, roucoule Hadassah tandis que Romelio se lève en portant Malike.
— Et toi alors ? Tu grandis pour aller où ça ?
Je n’aime pas ça.
— Oh, elle rigole.
— S’il te plaît, explique-le-lui, parce que madame se
presse pour avoir seize ans comme si on lui a dit qu’elle obtiendrait un trésor
après ça.
— Vous êtes fous en fait, elle rigole de plus belle et
on la laisse partir avec la petite pour rejoindre Thema qui l’interpelle.
— Seize ans déjà ? je commente en l’observant avec
émotion.
— Je suis heureux et craintif à la fois. L’année prochaine
c’est le bac et à la fin, elle me quittera pour prendre son envol. Dire qu’on
se croyait grands en débarquant en France à 17 ans, tu t’en rappelles ?
— Et comment, je dis avec humour. On se prenait trop
pour des as, pourtant on a accumulé les erreurs de débutants. Tu es déjà prêt
pour le fameux discours d’au revoir ?
— C’est elle qui n’est pas prête, il dit sur un ton blagueur
qui nous fait rire.
— Tu as laissé ta moitié où même ?
— Elle est au repos dans son lit. Hier, elle a été
insémi….
— Et c’est maintenant que tu me le dis ? je m’écrie
en sautant sur son bras et il en rigole.
— C’est justement pour cette réaction que j’ai attendu,
il m’explique en se marrant. Regarde comment tu me sautes dessus comme si je t’ai
annoncé la venue de Jésus.
— Ne me perd pas le temps, raconte-moi les bonnes
nouvelles !
— Zéro
douceur lol. On l’a inséminé hier comme je te disais. Le médecin a dit
qu’elle n’était pas obligée de garder le lit toute la journée, mais elle ressentait
quelques crampes hier, donc j’ai préféré qu’elle reste à la maison, même si
elle me boudait à mon départ.
Garcelle choisit ce moment pour se manifester, avec un
sourire satisfait sur le visage.
— Excusez l’interruption, tu as une idée d’où se trouve
les toilettes ici Elikem ? J’ai besoin de me soulager depuis un moment.
Je lui indique, en essayant de garder un ton neutre.
— Qu’est-ce qui se passe là ? Je suis dans quel
film ? Qu’est-ce qu’elle fiche ici ? m’interroge un Romelio perdu.
En dehors de ma mère, je n’ai parlé de cette histoire à
personne. Océane était occupée avec sa grossesse qui l’a même empêchée d’être
présente aujourd’hui et Romelio venait juste de se marier. Je ne me voyais pas
emmener mon humeur noire chez mes amis qui vivaient des moments heureux, mais
bien sûr, Romelio me passe un savon parce qu’il ne partage pas cette mentalité.
Le savon passé, il a une réaction similaire à celle que j’ai eue en apprenant
la nouvelle.
— C’est quoi cette connerie Elikem ? On ne vient
pas de dire qu’on se croyait super adultes à 17 ans et la vie nous a rapidement
ramenés sur terre à coups d’épreuves ? Comment une femme de son âge fait
un gosse à un jeune influençable et elle ose se promener fièrement comme une
reine dans sa cour ? il s’emporte.
Je n’ai aucune réponse à ses questions.
***Garcelle Ekim maman d’un enfant sacré***
Des figures géantes de Disney, des mascottes, un magnifique
gâteau en forme de poussette vintage, sans parler des nombreux cadeaux, le rêve
de toute femme pour son enfant, c’est ce que j’ai vu ici. J’ai hâte d’avoir mon
enfant dans mes bras. Il n’aura pas moins que ça.
P.S : Je suis dans les cartons de déménagement depuis
un moment, donc parfois je n’ai pas le temps ni l’énergie d’interagir avec
vous, je suis désolée. Après une fidélité à toute épreuve, ma queen m’a
sécurisé un coin paradisiaque que vous ne connaîtrez pas même si vous cherchez
jusqu’à. Occupez-vous des souhaits de votre Garcie choute, elle porte l’enfant sacré
de votre famille de rêves.