
Chapitre 1 - tome 2
Write by Josephine54
10 ans plus tard
Beverly
- Bonjour monsieur Domou, dis-je en entrant dans le bureau de mon patron.
- Bonjour madame Kamdem, répondit mon supérieur. Quel est le programme d'aujourd'hui ?
- Vous avez un premier rendez-vous avec Monsieur Etoa, du ministère des Mines. À 10 h, Monsieur Etogo devrait arriver, suivi de Monsieur Owono. Après votre déjeuner, nous sommes attendus dans l’entreprise de Monsieur Chopkeng pour une prise de contact. Vous devrez...
Je lui énumérai son programme de la journée dans les moindres détails.
- D'accord. Ce n'est pas facile tout ça pour un vieil homme comme moi. Heureusement que la retraite est pour bientôt. C'est bien dommage qu'aucun de mes fils ne veuille prendre la relève.
- Je vous comprends, monsieur, répondis-je poliment en retournant à mon bureau.
J'essayais de me concentrer sur ma tâche, mais ce n'était pas facile. Mon esprit ne cessait de vagabonder, principalement guidé par l'inquiétude.
Je travaillais dans cette boite depuis cinq ans maintenant. Mon boss l'avait fondée il y a près d'une quarantaine d'années. Il l'avait ensuite développée et fait prospérer, faisant ainsi croître son chiffre d'affaires. De quatre employés à sa création, nous étions désormais une quarantaine. Nous étions une société de conseil. Notre société avait pour but d'améliorer le fonctionnement et la performance, actuels ou futurs, d'une organisation publique ou privée : entreprise, association, ministère, collectivité territoriale, syndicat, etc...
La société comptait également deux succursales à Douala et Bafoussam, mais son siège principal restait à Yaoundé.
À l’entreprise, nous étions tous sur des charbons ardents. La retraite prochaine de Monsieur Domou n’était un secret pour personne, et les rumeurs allaient bon train. Certains murmuraient qu’il comptait vendre l’entreprise, tandis que d’autres affirmaient qu’il envisageait simplement de la fermer, nous laissant tous au chômage.
Si le patron décidait de céder l'entreprise, serais-je maintenue à mon poste ? Et s'il comptait vraiment la vendre, qu'en serait-il de mon avenir ? Autant de questions qui m'occupaient l'esprit, m’empêchant de travailler avec sérénité.
Je me fis tout de même violence et me mis à la tâche. Les dossiers des différents rendez-vous de Monsieur Domou étaient déjà sur son bureau, et je m'occupais de ceux des jours à venir. J'aimais toujours prendre de l'avance dans mon travail, cela m'évitait des surprises de dernière minute et me permettait aussi d'ajuster facilement le tir en cas d'erreur.
- Monsieur Domou, je pensais prendre ma pause maintenant, dis-je en entrant dans le bureau de mon patron.
- Oui, allez-y. À quelle heure devons-nous quitter l'entreprise ?
- À 15 h monsieur.
- D'accord madame Kamdem. À plus tard, lança monsieur Domou.
C'était vraiment dommage que le patron aille à la retraite maintenant. J'avais rejoint la société il y a cinq ans et je m'y sentais vraiment bien. J'y travaillais comme secrétaire de direction. J'avais été embauchée immédiatement après l'obtention de mon diplôme. Mes rapports avec monsieur Domou étaient cordiaux. C'était un homme d'une soixantaine d'années, courtois, respectueux envers moi et mon travail, et également compréhensif. J'aurais bien travaillé avec lui pendant de nombreuses années encore.
Je me rendis au bureau d'Éveline , ma collègue. Elle travaillait au sein du département de comptabilité.
- Eveline, je vais manger maintenant. Je dois sortir avec le boss après. Tu viens avec moi ? demandai-je depuis l’entrebâillement de la porte.
- Oui, allons-y, répondit Éveline en fermant son ordinateur.
Nous nous rendîmes dans un restaurant à proximité de notre lieu de travail. Nous nous installâmes rapidement et passâmes notre commande.
Le serveur nous apporta de l'eau tandis que nous attendions notre repas.
- N'as-tu aucune nouvelle ? demanda Éveline d'une voix inquiète.
- Non, rien du tout. Il n'en parle pas.
- Ne pourrais-tu pas le lui demander ?
- Ce n'est pas évident, ma belle. Je sais que tu es inquiète, et moi aussi, mais je ne veux pas lui poser une telle question.
Éveline m'incitait à demander au boss ses intentions après la retraite. J'avais certes de bons rapports avec lui, mais je maintenais toujours une certaine réserve, bref, nos rapports étaient purement professionnels.
- En tout cas, moi, j'aurais demandé au lieu de rester comme cela dans l'ignorance, rétorqua Éveline.
- Je te comprends, ma belle. Ce n'est pas facile pour moi non plus, mais je pense que nous aurions des nouvelles d'ici peu. Il ne reste plus que trois mois à son départ.
On mangea en papotant, puis, on retourna au travail. Je passai le reste de l'après-midi à faire les tours dans les différentes entreprises dont nous nous occupions.
- Nous avons pensé dès le début à ...
Monsieur Domou et moi étions en train de nous rendre dans l'une des entreprises donc nous avions la gestion. Tout en marchant, je pris rapidement ma tablette et l'allumai, prête à prendre des notes plus tard.
- Ha, madame Kamdem et ses gadgets. Je vous ai déjà dit que tout cela n'est absolument pas nécessaire. Il vous suffisait d'un bloc-notes et d'un bic, et le tout est joué.
Roman écrit par Justine Laure (page Facebook Plume de Justine Laure)
- Haha, monsieur Domou, c'est pourtant plus rapide ainsi, répondis-je en rigolant.
- Et si ce truc ne s'allume pas après ? Comment ferons-nous pour récupérer vos notes ?
- Haha, j'ai déjà pensé à tout. Je sauvegarde tout sur Dropbox avant d'éteindre la tablette.
- Drop quoi ? demanda mon boss en riant.
- Dropbox monsieur, rigolai-je à mon tour. Le papier peut se perdre, se mouiller et devenir irrécupérable.
- Haha, je n'insiste pas. En tout cas, je trouve vos histoires-là très compliquées.
Monsieur Domou avait horreur des nouvelles technologies. Il avait même du mal à utiliser l'ordinateur présent dans son bureau.
L'après-midi se déroula ainsi, nous, allant d'entreprise en entreprise. Je pris autant de notes que je pouvais.
Il était 17 h et j'avais fini de travailler. J'étais dans ma voiture, en route pour rentrer chez moi. Le lecteur diffusait une douce mélodie de Locko, un artiste camerounais. Mon esprit était tellement ailleurs que je n'arrivais pas à savourer pleinement les belles notes de cette chanson.
Je rentrai dans la cour et garai la voiture.
J'étais en train de descendre de la voiture quand je fus envahie par les enfants.
- Maman Beverly, hurla Gabin en se jetant contre moi.
- Mamannnn, hurla à son tour Ophélie, en essayant de bousculer Gabin pour s'installer dans mes bras.
- Du calme les enfants, du calme. Maman a de la place pour tous les deux, dis-je en riant.
Je soulevai Ophélie et la pris dans mes bras tandis que je serrais très fort Gabin contre ma chance. On entra ainsi à la maison.
- Bonsoir Beverly, me salua Virginie qui était assise sur le divan au salon.
- Bonsoir Virginie, répondis-je en m'installant sur le divan en face d'elle.
Ophélie prit immédiatement place sur une jambe tandis que Gabin en faisait de même sur l'autre.
- Haha, après une dure journée au travail, je n'ai même pas droit au repos dans ma propre maison, lançai-je en rigolant.
- Haha, maman Beverly, tu vas te reposer après, non ? lança Gabin d'un air charmeur en me faisant une bise.
Cette plainte était simplement dans le but de les provoquer. J'adorais ces enfants et je me sentais heureuse de les voir manifester ainsi leur joie à ma vue.
- Y a-t-il quelque chose à manger ? demandai-je en regardant Virginie.
- Euh... euh... grande sœur, je pensais m'endormir pour quelques minutes, mais j'ai sursauté il y a peu. Je n'ai pas eu le temps de rentrer à la cuisine.
Je me levai simplement de ma chaise et me rendis dans ma chambre, les deux enfants à mes trousses. Virginie avait toujours une excuse pour ne rien faire dans cette maison.
- Maman, tu vas préparer quoi ? demanda Ophélie.
- Oui, maman Beverly, qu'allons-nous manger ? renchérit Gabin. Je préfère d'ailleurs que ce soit toi qui nous prépares à manger. C'est toujours très bon.
- Merci mon cœur, répondis-je en lui faisant un baiser sur la tête.
Je me changeai rapidement et enfilai une robe en pagne.
- Je vais aller à la cuisine maintenant. Gabin, vas faire tes devoirs et donne un coup de main à ta sœur, dis-je en sortant de ma chambre avec eux.
- D'accord maman Beverly.
Je me rendis à la cuisine et concoctai rapidement du riz avec de la sauce tomate et du poisson frit.
Je jetai un bref coup d'œil à l'horloge à la cuisine et m'aperçus qu'il était déjà 20 h. Je soupirai en réalisant qu'une fois de plus, nous dînerons sans Benjamin.
- À table, hurlai-je depuis le salon.
Virginie sortit de sa chambre et nous rejoignit. Les enfants firent de même.
- Mais maman, où est papa ? Pourquoi ne mange-t-il pas avec nous ? demanda Ophélie.
- Euh... euh... il a eu des problèmes au boulot, chérie. Il ne pourra pas manger avec nous, répondis-je embarrassée.
- Mais, c'est tout le temps comme ça, se lamenta Ophélie.
Virginie secoua simplement la tête.
On mangea en essayant de discuter, mais mon esprit était ailleurs. Benjamin se faisait de plus en plus rare à la maison. Les enfants se chargèrent d'animer la conversation. Après le repas, Virginie débarrassa la table et se rendit à la cuisine avec les plats. J'entendis ensuite le bruit de l'eau, signe qu'elle était en train de laver les assiettes.
- Gabin, va enfiler ton pyjama.
Roman écrit par Justine Laure (page Facebook Plume de Justine Laure)
J'emmenai ensuite Ophélie dans sa chambre et l'aidai à enfiler le sien.
Elle avait tout juste cinq ans et n'était pas encore autonome. Je me rendis ensuite avec elle aux toilettes afin qu'elle se brosse les dents.
- Gabin, nous t'attendons.
Il arriva quelques minutes plus tard et se brossa à son tour les dents.
- Allez souhaiter bonne nuit à Virginie et je vous attends.
- Bonne maman, entendis-je depuis les toilettes.
- Bonne nuit tata Virginie.
Je mis les enfants au lit et me rendis aux toilettes et pris une douche rapide. J'enfilai ensuite mon pyjama et m'étendis sur ce grand lit... vide. Je me couchai et mon regard se posa sur la place de Benjamin. Il m'avait averti qu'un de ses supermarchés avaient un problème et qu'il rentrerait certainement tard.
Je me mis à fixer le plafond et mes pensées se mirent à vagabonder. J'étais mariée à benjamin depuis dix ans aujourd'hui, c'est-à-dire, trois mois après sa fameuse demande en mariage. Nous avions aménagé immédiatement après le mariage. J'avais demandé à Benjamin l'autorisation que Virginie s'installe avec nous. Gabin avait à peine deux mois au moment de notre mariage. Même la venue de son petit-fils n'avait en rien changé le comportement de maman envers Virginie. Elle continuait à l'ignorer et je ne l'avais jamais vue tenir Gabin dans ses bras. Elle ne lui avait jamais donné le bain.
Je n'eus pas à cœur de la laisser toute seule dans cet enfer. La maison de Gabin était énorme et regorgeait de nombreuses chambres. Je lui avais demandé d'héberger Virginie en attendant qu'elle puisse voler de ses propres ailes. J'avais ensuite proposé à Virginie de reprendre le chemin de l'école, mais elle n'avait pas voulu. Je lui avais alors conseillé de faire une formation professionnelle. Elle avait demandé à faire de la coiffure. J'avais alors trouvé un salon de coiffure et j'avais payé entièrement sa formation. Après près de six mois, Virginie m'avait dit que cela ne l'intéressait plus. Je lui avais alors demandé ce qu'elle voulait faire de sa vie. Elle m'avait dit avoir envie de devenir couturière. Elle rêvait de confectionner des vêtements. Je l'avais alors inscrite dans une école de formation. Virginie avait fini depuis deux ans et je lui avais acheté une machine à coudre et tout le matériel qui va avec. Je ne l'avais jamais vu l'utiliser. La machine était abandonnée à elle-même. J'avais l'impression que ce qui l’intéressait principalement, étaient les sorties avec ses amies et ses virées nocturnes. Elle avait un toit, une belle maison bien équipée en plus, à manger sans devoir presque jamais cuisiner, que demander de plus ?
Je secouai la tête de dépit. Je ne savais que faire d'elle.
Près de cinq ans après mon mariage, nous avons accueilli l'arrivée d'Ophélie.
J'étais tellement perdue dans mes pensées que je sus à quel moment le sommeil me gagna. Je sursautai après quelques heures. La chambre était totalement plongée dans le noir. Je tendis la main vers la place près de moi et je soupirai en me rendant compte qu'elle était toujours vide. Je me redressai et pris mon téléphone pour regarder l’heure. Il était 1 h du matin et Benjamin n'était pas encore rentré.
Je restai éveillée, le regard vide. Benjamin rentrait de plus en plus tard. J'entendis tout à coup la porte de la chambre grincer. Je fis semblant d'être profondément endormie. J'entendis Benjamin rentrer dans la chambre et ensuite regagner les toilettes. Il y resta près de dix minutes avant de me rejoindre dans le lit. Il se coucha et me prit dans ses bras. Quelques minutes plus tard, sa respiration se fit régulière, signe qu'il s'était endormi. J'ouvris immédiatement les yeux et me remis à fixer le noir, l'esprit en tumulte.